L'Assemblée nationale valide la possibilité d'annulations « locales » du second tour
L’Assemblée nationale a adopté, vendredi, le projet de loi du gouvernement sur le report éventuel du second tour des municipales. Même si cette perspective semble s’éloigner, le texte comporte aussi – quelque bizarre que cela puisse paraître – des dispositions qui s’appliqueront le 28 juin.
La chose avait plongé Philippe Bas, président de la commission des lois du Sénat, dans « un profond désarroi » (lire Maire info du 3 juin). Mais c’est ainsi : un texte dont l’objet est l’annulation du scrutin du 28 juin va réglementer… l’organisation du scrutin du 28 juin. Explication : ce texte devait, à l’origine, n’être que « conservatoire ». Le gouvernement prévoyait l’éventualité que le Conseil scientifique juge la tenue du second tour fin juin trop risquée, et se devait donc de préparer la situation en faisant adopter un texte organisant, au cas où, cette annulation, le report du scrutin et le fonctionnement des communes et EPCI concernés d’ici là (lire Maire info du 28 mai).
Sauf qu’entretemps, de nombreux parlementaires et élus ont réclamé que des mesures soient prises pour faciliter l’exercice du vote le 28 juin, notamment sur l’usage des procurations. Plutôt que d’adopter un texte spécifique sur cette question, le gouvernement a choisi la solution quelque peu biscornue consistant à transformer son projet de loi « conservatoire » en projet de loi classique, comportant à la fois des règles nouvelles pour le scrutin du 28 juin et des règles fixant l’annulation du scrutin et son report.
Deux procurations possibles
Le texte adopté vendredi comprend donc, finalement, un article 1er bis ajouté par amendement, qui autorise le fait que « chaque mandataire (puisse) disposer de deux procurations, y compris lorsqu’elles sont établies en France », au lieu, en temps normal, d’une seule établie en France et une établie à l’étranger. Cette mesure est d’ordre dérogatoire et valable uniquement pour le scrutin du 28 juin.
Le gouvernement et la majorité n’ont pas retenu, essentiellement pour des raisons techniques liées au répertoire électoral unique, la proposition de plusieurs parlementaires qui souhaitaient que des procurations puissent être établies par un mandataire et un mandant n’habitant pas la même commune, lorsqu’ils appartiennent à la même famille.
Annulations localisées
Un autre amendement proposé par le gouvernement a été adopté en séance. Il permet l’annulation du second tour non pas au niveau national (soit dans les 5 000 communes concernées par celui-ci) mais dans certaines d’entre elles, au cas où celles-ci constitueraient un foyer épidémique localisé au moment de la décision. Il serait donc possible, sur avis du Conseil scientifique et par décret pris en Conseil des ministres, d’annuler « localement » le second tour, sans pour autant l’annuler sur tout le territoire. Ceci à condition que « le nombre de communes concernées n’excède pas 5 % du nombre total de communes pour lesquelles un second tour est nécessaire » – soit un maximum de 250 communes environ.
Dans ce cas, le très long amendement adopté fixe les dispositions qui seraient mises en œuvre dans ces communes et dans celles-ci seulement. Elles devraient alors réorganiser les deux tours de scrutin « dans un délai de 4 mois après la publication du décret ». Les mandats de conseillers municipaux et communautaires, dans ces communes, seraient prolongés d’autant.
C’est évidemment dans les conseils communautaires que la situation pourrait s’avérer la plus compliquée : dans les EPCI dont au moins une commune serait concernée par cette annulation du second tour, il serait conservé le fonctionnement de type « mixte » actuellement en vigueur, mêlant conseillers communautaires élus le 15 mars et conseillers dont le mandat aura été prorogé. L’exécutif de ces conseils ferait l’objet de deux élections : les présidents, vice-présidents et membres du bureau verraient également leur mandat prorogé, jusqu’à l’élection d’un nouvel exécutif qui devrait intervenir « au plus tard trois semaines après la date de publication du décret » annulant le second tour dans certaines communes ; puis, si la composition du conseil a évolué après le second tour décalé dans certaines communes, une nouvelle élection de l’exécutif devrait être organisée « lors de la première réunion » du nouvel organe délibérant.
On ne saura le nombre de communes et d’EPCI éventuellement concernés par ces mesures qu’au moment de la parution éventuelle du décret.
La question des syndicats
Le texte va maintenant être examiné – demain – par le Sénat. L’occasion d’aborder, entre autres, la question de la gouvernance des syndicats mixtes fermés.
En effet, le calendrier « normal » voudrait que les syndicats mixtes fermés soient installés dans les quatre semaines qui suivent l’installation des conseils communautaires. Or, les conseils communautaires ne vont pas pouvoir s’installer, pour la plupart d’entre eux, avant la mi-juillet… ce qui impose une installation des syndicats mixtes fermés entre le 17 juillet et le 14 août.
Cela risque de poser problème, en pleins congés d’été : le quorum pourrait être difficile à atteindre. Dans ces conditions, deux amendements ont été déposés au Sénat. Le premier pour demander que le délai soit allongé, et que les syndicats mixtes fermés puissent s’installer jusqu’au « 30 septembre ». Par ailleurs, un second amendement propose qu’à titre exceptionnel, l’élection des représentants de l’EPCI au sein des syndicats mixtes ne se fasse pas à bulletin secret, si l’organe délibérant « le décide à l’unanimité ». Cela permettrait de pouvoir procéder à cette élection par visio-conférence.
On connaîtra dès demain, lors de l’examen de ce texte au Sénat, l’avis du gouvernement et des parlementaires sur ces options.
F.L.
Télécharger le texte adopté par l’Assemblée nationale.
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