Débat sur la vaccination obligatoire, alors que l'inquiétude grandit sur une reprise de l'épidémie
Par Franck Lemarc
« L’épidémie gagne à nouveau du terrain dans notre pays. » C’est ainsi que le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a débuté son traditionnel compte rendu du Conseil des ministres et du Conseil de défense, hier. « Le retournement de la tendance se confirme, avec une forte hausse de l’incidence, qui s’accélère chaque jour. » Le variant Delta, plus contagieux que les souches précédentes, gagne très rapidement du terrain dans le pays, puisqu’il représente aujourd’hui 40 % des cas détectés, selon Gabriel Attal. Dans une douzaine de départements, le variant Delta s’est imposé, et approche ou atteint aujourd’hui les 100 % des cas détectés.
Premiers signaux d’alerte
Où en est-on réellement ? Certes, les chiffres restent bas, surtout si l’on compare à ce que le pays a vécu ces derniers mois, lorsque le taux d’incidence (nombre de cas pour 100 000 habitants) dépassait les 1000 dans plusieurs départements. Aujourd’hui, le taux d’incidence national est de 25. La tension sur les services hospitaliers a disparu, avec une occupation des lits de réanimation par des patients covid-19 de 19,3 % hier – on se souvient que ce chiffre, au pires moments de l’épidémie, a dépassé les 110 %. Il y a à ce jour 997 personnes en réanimation pour covid-19.
Ce ne sont donc pas les chiffres qui sont inquiétants, mais la tendance. Si l’on ne compte en moyenne que 2 345 tests positifs par jour cette semaine (à comparer aux 20 000 ou même 40 000 constatés lors des vagues précédentes, ce chiffre est en hausse de 31 % par rapport à la semaine précédente. Alors que toute la métropole était en-dessous du seuil d’alerte (50 cas pour 100 000 habitants) il y a une semaine, un département, Paris, est passé hier au-dessus de ce seuil, et d’autres s’en approchent déjà. À l’échelle de la métropole, plus d’une trentaine de départements ont connu une hausse de plus de 40 % du nombre de cas en une semaine : toute la façade méditerranéenne, une partie de la Bretagne, la moitié de l’Île-de-France, la Corse… Si le taux de croissance actuel devait se maintenir, la ville de Paris dépasserait un taux d’incidence de 110 dans une semaine seulement.
Forte recrudescence chez les jeunes
Toutes les statistiques le montrent : c’est la tranche d’âge des jeunes adultes (20-39 ans) qui connaît la hausse la plus appuyée des cas. À Paris, la hausse des cas dans cette tranche d’âge a été de 125 % en une semaine ! À l’échelle nationale, dans cette tranche d’âge toujours, la hausse du taux d’incidence est de 65 % - cette classe d’âge est la seule à dépasser à présent, nationalement, le seuil d’alerte, avec un taux d’incidence à 58. La différence entre le taux d’incidence chez les personnes âgées, très majoritairement vaccinées, et les jeunes, est frappante : le taux d’incidence est de 7 pour 100 000 chez les 70-79 ans, par exemple.
Cette tendance d’une forte poussée de l’épidémie chez les jeunes est constatée dans tous les pays développés. Dans la région espagnole de Catalogne, par exemple, les autorités tirent le signal d’alarme : le taux d’incidence atteint 2000 chez les 20-29 ans ! Dans cette région, ce taux, toutes tranches d’âges confondues, est passé en 15 jours seulement de 58 à 225. L’indicateur R0, qui indique le nombre de personnes qu’une personne infectée contamine à son tour, est en Catalogne de 3,3, un taux jamais atteint depuis le début de la première vague.
Deux causes paraissent expliquer cette évolution : d’abord, le taux de vaccination encore faible de ces tranches d’âges. Rappelons que si 77 % des personnes de 65 à 74 ans ont reçu les deux doses (et 86 % une dose), moins de la moitié des jeunes de 19 à 29 ans sont partiellement vaccinés (46,5 %) et seulement un cinquième complètement vaccinés (21,5 %).
Deuxième cause probable : le relâchement général qui a suivi la levée des restrictions sanitaires : baisse de la vigilance sur le port du masque et les gestes barrières, organisation de fêtes, fréquentation massive des bars – sans masque…
Mais attention : les experts insistent sur le fait que cette augmentation des cas, même si elle se poursuit, ne signifiera pas automatiquement une nouvelle situation de saturation des hôpitaux et d’explosion de la mortalité : les jeunes sont statistiquement moins touchés par des formes très graves – ce qui ne veut pas dire qu’ils ne le sont pas du tout, il faut, encore, le marteler.
Vers une loi sur la vaccination
La vaccination massive reste donc la solution la plus efficace pour éviter cette « quatrième vague » pour la première fois évoquée hier par le gouvernement comme une éventualité probable (« le risque d’une quatrième vague rapide est là », a déclaré hier Gabriel Attal).
Le gouvernement envisage donc de faire voter, sans doute dès la fin juillet, un projet de loi imposant la vaccination aux personnels soignants – a minima. Il semble avoir recueilli l’approbation, sur ce point, de la plupart des formations politiques représentées au Parlement. Il reste maintenant à recueillir l’avis des associations d’élus, cet après-midi, ainsi que celui des différents ordres et fédération des personnels de Santé, puis les partenaires sociaux demain, avant de prendre une décision qui devrait être annoncée lundi, à l’issue d’un conseil de défense.
On sait, à l’heure où nous écrivons, que l’AMRF (maires ruraux) a décidé, lors d’un bureau tenu hier, de défendre auprès du Premier ministre l’idée d’une vaccination obligatoire pour toute la population et non seulement pour les soignants. « Plutôt que de faire des oublis, on va préciser au Premier ministre qu'on est pour la vaccination pour tous », a déclaré tôt ce matin, sur France info, le président de l’association, Michel Fournier. « À un moment donné, il faut se dire : il y a une nécessité que l'on se sorte de cette pandémie et la seule potentialité, c'est le vaccin pour tous. ». Les positions des autres associations ne sont actuellement pas connues.
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