Maire-info
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Édition du jeudi 15 avril 2021
Coronavirus

Covid-19 : où en est l'épidémie en France ?

La France va dépasser aujourd'hui le cap des 100 000 morts dans le bilan officiel dressé par Santé publique France. Même si le taux d'incidence a, semble-t-il, tendance à amorcer une lente décrue, les services hospitaliers sont toujours sous extrême tension et le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a mis en garde hier contre tout relâchement. Le point sur la situation. 

Par Franck Lemarc

100 000 morts. Qui aurait cru, en février 2020, que l’on attendrait ce chiffre 14 mois plus tard, au moment où les premiers morts du covid-19 étaient enregistrés dans l’Oise ? La barre est certes parfaitement symbolique, mais le chiffre est frappant. Et encore, selon plusieurs experts, il est assez largement sous-estimé : selon l’Inserm en effet, la barre des 100 000 morts a été franchie, déjà, il y a plusieurs semaines. 

Bilan incertain

Plusieurs sources existent en effet pour comptabiliser les décès. La plus connue est Santé publique France, qui donne un bilan quotidien des décès dus au covid-19 à l’hôpital sur son site internet (297 hier). Deux fois par semaine, SPF réactualise ces chiffres avec le bilan constaté dans les Ehpad. Mais le problème, c’est que les chiffres de SPF ne comptabilisent pas les décès au domicile ni ceux survenus dans les unités de soin de longue durée. Par ailleurs, soulignaient hier des experts de l’Inserm dans Le Monde, les décès qui surviennent dans certains services (psychiatrie ou soins de suite, notamment), ne sont « pas bien dénombrés ». Les chiffres de Santé publique France sont donc sous-évalués. 
Autre source : l’Insee. Celle-ci reçoit les certificats de décès (et de naissance) envoyés par les services d’état civil. Elle est donc en mesure de connaître très précisément le nombre de morts et de naissance, quotidiennement ; mais en revanche, elle n’a pas accès aux causes de décès. Les chiffres de mortalité fournis par l’Insee sont donc différents de ceux de SPF : pour 2020, alors que SPF a indiqué qu’il y aurait eu 64 632 morts du covid-19, l’Insee indique une « surmortalité »  (augmentation du nombre de décès entre 2019 et 2020) de 55 000 « seulement », si l’on peut dire. Explication de ce delta de près de 10 000 morts : la mortalité due à d’autres causes à nettement reculé : il y a eu beaucoup moins de morts sur la route en 2020 à cause des confinements, l’usage généralisé du masque a fait reculer la grippe, etc. 
Enfin, troisième source d’informations, l’Inserm, qui elle aussi reçoit les certificats de décès mais a également le droit d’avoir accès à la cause de la mort. Mais elle ne les reçoit qu’avec un certain décalage, qui peut parfois se compter en semaines. L’Inserm n’est donc pas en mesure de donner des chiffres quotidiens comme le fait SPF, mais les siens sont nettement plus fiables… et plus élevés. Fin 2020, selon l’Inserm, le bilan du covid-19 n’était pas de 64 632 morts comme l’établit SPF, mais de 75 732 – soit plus de 10 000 de plus. Ce chiffre correspond au nombre de certificats de décès reçus par l’Inserm indiquant que le covid-19 est la cause directe ou indirecte de la mort. Et ces chiffres sont encore provisoires, indique l’Inserm. 
Si la différence était de plus 10 000 fin 2020, elle n’a pu que continuer à se creuser depuis, ce qui implique que la barre des 100 000 décès a probablement été dépassée il y a plusieurs semaines déjà. 
Quoi qu’il en soit, au titre du symbole, le gouvernement a indiqué hier qu’un « hommage »  serait rendu aux victimes dans les prochains jours, sans que l’on sache à cette heure la forme qu’il prendra. 

Réanimations toujours en surtension

Si la flambée de l’épidémie semble un peu ralentir, « la troisième vague n’est pas derrière nous », a clairement averti hier le porte-parole du gouvernement. D’abord, les chiffres d’évolution de l’épidémie, la semaine dernière, sont marqués par un jour férié, lors duquel très peu de tests ont été réalisés. Ensuite, un coup d’œil à la carte des taux d’incidence par département montre que la situation est toujours critique. Certes, dans les départements les plus durement touchés en mars, les taux d’incidence baissent lentement. Ainsi la Seine-Saint-Denis et le Val-d’Oise, qui avaient dépassé les 800 cas pour 100 000 habitants, sont aujourd’hui entre 600 et 700. Mais il reste encore 15 départements qui sont au-dessus d’un taux d’incidence de 400, et une cinquantaine qui dépasse les 250. Il semble même que les taux d’incidence repartent à la hausse dans le nord-est du pays. 
Le nombre de contaminations à l’échelle du pays ne diminuant pas franchement (il y en a encore eu 43 505 hier), la tension sur les services de réanimation n’est pas près de diminuer – puisque les arrivées en « réa »  se font dix à quinze jours après la contamination. Le nombre de patients admis en réanimation a augmenté de 3 % en une semaine, et il s’établit aujourd’hui à 5 902. Soit, à l’échelle nationale, un taux de remplissage de plus de 114 %. 

Variant brésilien

Toutes les inquiétudes se portent maintenant sur la diffusion du variant dit « P1 », l’une des variantes du virus repérées au Brésil, en Amazonie. Dans ce pays, l’épidémie est totalement hors de contrôle, avec un chiffre de décès approchant les 60 000 morts… par mois. Ce variant semble non seulement particulièrement contagieux, mais également plus dangereux, puisqu’il pourrait partiellement résister à la vaccination. Il s’est diffusé à une vitesse impressionnante dans le pays (passant en moins de deux mois de 28 à 73 % des cas). Il a déjà commencé à se diffuser dans une partie de l’Amérique du sud, mais aussi sur le continent nord-américain, au Japon, en Allemagne… et en France, où il ne représente aujourd’hui que 0,5 % des cas.  En Guyane, en revanche, département frontalier du Brésil, le variant P1 est aujourd’hui majoritaire. 
Le gouvernement prend suffisamment au sérieux cette menace pour avoir décidé, hier, par décret, de suspendre au moins jusqu’au 26 avril les vols en provenance du Brésil et, en général, « les déplacements de personnes en provenance de ce pays vers le territoire de la République », ce qui inclut donc la fermeture de la frontière entre Brésil et Guyane. Cette interdiction prend effet jusqu’au 19 avril à zéro heure. 

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