Avances remboursables sur les DMTO : comprendre le dispositif
On le sait depuis la troisième loi de finances rectificative du 30 juillet 2020 : l’État va verser aux départements et à certaines grandes collectivités une « avance remboursable » permettant de compenser les pertes sur le produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Le décret détaillant le dispositif est paru ce matin.
Qui est concerné ?
Les collectivités ou établissements concernés sont, outre les départements, la Ville de Paris, la métropole de Lyon, la collectivité de Corse, le département de Mayotte et les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique. Les communes – qui touchent, elles aussi, une part de DMTO, ne sont pas concernées par ce dispositif spécifique.
Alors que, selon les estimations contenues dans le rapport du député Jean-René Cazeneuve, les pertes sur les DMTO pourraient atteindre 20 % en 2020, le gouvernement a décidé de consacrer une enveloppe de 2,7 milliards d’euros (au maximum) au versement d’une avance, que les collectivités concernées devaient demander aux préfets avant le 21 septembre dernier. La décision de verser ou non l’avance sera prise au cas par cas par le gouvernement, « après avis du directeur départemental des finances publiques », précise le décret.
Mode de calcul de l’avance
Le montant de l’avance est calculé en faisant la différence entre la moyenne des recettes perçues entre 2017 et 2019 et celles qui seront estimées en 2020 : si les collectivités ont été perdantes – ce qui devrait, selon le CFL, être le cas pour 80 d’entre elles – l’État versera la différence.
Pour estimer les recettes de 2020, les collectivités devaient partir de l’exécution comptable au 31 août 2020 et y ajouter, détaille le décret, « le tiers du montant des mêmes produits perçus en 2019 ». Au moment de la présentation du décret, les départements avaient contesté ce dernier point, estimant qu’il leur serait plus favorable d’ajouter plutôt un tiers de la moyenne des recettes sur 2017-2019.
Si, à la clôture des comptes de gestion définitifs pour 2020, le montant réel des recettes se trouve inférieur à celui qui a été estimé, l’État procèdera à un second versement pour compenser la différence, « au plus tard le 31 mai 2021 ». Si au contraire les recettes ont été supérieures au montant estimé, les collectivités rembourseront à l’État la différence au cours de l’année 2021, sous forme d’un prélèvement sur les attributions mensuelles de fiscalité.
Quand aura lieu le remboursement ?
Il s’agit bien d’avances remboursables et non d’une dotation. Au départ, le gouvernement comptait demander aux départements de rembourser dès le « rebond » escompté en 2021. Les sénateurs, lors de l’examen du projet de loi, ont obtenu l’adoption d’un dispositif dit « clause de retour à bonne fortune » : le remboursement n'interviendra qu’à partir du moment où les recettes perçues sur une année complète seront supérieures ou égales à celles perçues en 2019 – ce qui est très favorable aux collectivités, puisque l’année 2019 a été un cru exceptionnel pour les DMTO.
Dès lors, les départements et autres collectivités devront rembourser l’avance en trois fois, sur trois années. Il leur est également loisible, s’ils le souhaitent, de procéder à un « remboursement anticipé ».
Les grandes villes souhaitent bénéficier du dispositif
Il est à noter que l’association France urbaine souhaiterait que le gouvernement s’inspire de ce dispositif d’avances remboursables pour compenser les pertes de recettes des grandes villes. Dans un communiqué publié mi-septembre, Jean-Luc Moudenc, alors président de France urbaine (il a depuis été détrôné par Johanna Rolland, maire de Rennes), écrivait qu’un tel système est « gagnant-gagnant » : « Sans préjuger du niveau exact des pertes de ressources à venir – lesquelles ne sont pas encore établies avec certitude et varieront grandement selon les territoires – (…) les grandes villes et grands EPCI auraient ainsi la possibilité de solliciter une avance remboursable dont le rythme de remboursement serait ajusté au montant constaté in fine de baisse de recettes et donc, à l’amputation de capacité d’autofinancement finalement établie. Le dispositif ne présente pas de coût pour l’État in fine car l’avance est remboursable. »
France urbaine souhaitait que ce dispositif soit intégré au projet de loi de finances pour 2021. Le débat sur ce sujet reprendra donc très certainement lors de l’examen du texte au Parlement.
Franck Lemarc
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