Maire-info
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Édition du mardi 21 février 2023
Aménagement

Construction de gendarmeries : les sénateurs demandent à nouveau une modification de la réglementation

À peine un mois après la promulgation de la loi d'orientation du ministère de l'Intérieur (Lopmi), le Sénat se rappelle au bon souvenir du gouvernement pour qu'il tienne son engagement de réviser les règles budgétaires relatives au financement des bâtiments de gendarmerie par les collectivités locales. 

Par Franck Lemarc

« Créer une brigade sur le papier est une chose, construire les locaux professionnels et les logements pour l’accueillir en est une autre ». Le sénateur Philippe Paul, lors du débat sur la Lopmi, avait ainsi répondu avec bon sens à la volonté affichée par le gouvernement de créer « 200 brigades de gendarmerie ». Le Sénat avait alors introduit un amendement au texte visant à prendre ce problème à bras-le-corps. Un mois plus tard, des sénateurs ont déposé une résolution pour demander au gouvernement d’agir. 

Difficultés majeures

De nombreux maires ont expérimenté les difficultés majeures qui se posent lors de l’implantation ou de la réhabilitation d’une caserne de gendarmerie dans leur commune. Les règles de financement de ces projets, pour les collectivités, sont fixées par deux décrets (n° 93-130 du 28 janvier 1993 et n° 2016-1884 du 26 décembre 2016), que beaucoup d’élus jugent inadaptés. 

Par exemple, le décret de 2016, a expliqué un sénateur en séance, « prévoit que l’État garantit un loyer au maître d’ouvrage, dont le montant, plafonné, est proportionnel au nombre d’unités de logement de la caserne », loyer qui est donc « décorrélé de la  taille réelle de la caserne, dont les surfaces comprennent, en plus des logements, des locaux indispensables au service ». Par ailleurs, la durée du bail n’est pas toujours ajustée à celle du remboursement des emprunts contractés par les collectivités, ce qui en a placé certaines dans des situations difficiles. 

Les loyers payés par l’État sont « réellement trop bas », a fait valoir la sénatrice Nathalie Goulet, prenant l’exemple de la caserne de Tourouvre, dans son département de l’Orne, pour laquelle l’État a participé à hauteur de 193 000 euros, sur un emprunt de 1,75 million d’euros.

D’autres sénateurs ont relevé les délais bien trop longs, dus aux « innombrables grains de sable qui viennent bloquer les projets » : en Haute-Saône, a détaillé Olivier Rietmann, « le projet le plus récent a été lancé il y a dix ans », et n’a toujours pas abouti.

C’est pour essayer de trouver une solution à ces multiples problèmes que des sénateurs socialistes ont fait adopter un amendement au texte, portant l’engagement que les modalités de financement des gendarmeries par les collectivités seraient « adaptées, le cas échéant par l’adoption de dérogations aux règles comptables et budgétaires des collectivités ». 

Le ministre favorable

En séance, au Sénat, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait donné un avis favorable à cet amendement, le considérant comme « une invitation à réfléchir ». Le ministre a évoqué plusieurs pistes, dont la création d’une « foncière »  par le ministère de l’Intérieur, ou un recours plus important aux bailleurs sociaux. Le ministre s’est dit également favorable à la modification du décret demandée par les sénateurs. 

Reste à savoir quand elle se fera. C’est donc sans doute pour motiver le gouvernement à agir sans tarder que les sénateurs socialistes Olivier Jacquin, Jérôme Durain et Gisèle Jourda ont déposé la semaine dernière une proposition de résolution demandant la révision urgente des deux décrets de 1993 et 2016, « en ajustant, d’une part, la subvention d’investissement aux collectivités en fonction du nombre d’unités de logement de la caserne et, d’autre part, la durée du bail pour la rapprocher de celle du remboursement des emprunts contractés par les collectivités territoriales pour la construction de gendarmeries ». 

Les sénateurs constatent que « le problème de financement des gendarmeries en milieu rural pour les collectivités les moins fortunées ne sera pas résolu par cette programmation », et veulent « relayer la préoccupation de plusieurs maires confrontés à de véritables difficultés financières mais souhaitant ardemment s’engager dans l’amélioration des conditions de travail et de vie des gendarmes présents sur leur territoire ». 

L’examen de cette proposition de résolution, s’il a lieu, sera l’occasion de relancer le débat. Mais la balle est strictement dans le camp du gouvernement et non du Parlement, lui seul ayant la main sur la modification des textes réglementaires. 

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