Édition du lundi 14 mai 2018
Réforme constitutionnelle : encore bien des questions en suspens
Le Premier ministre et la ministre de la Justice ont présenté en Conseil des ministres, mercredi 9 mai, le projet de loi de réforme constitutionnelle, intitulé Pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace. Ce texte est la première salve d’une vaste réforme, qui inclura deux autres projets de loi, présentés « très prochainement » selon Édouard Philippe.
Le texte présenté mercredi dernier ne contient donc pas les deux mesures indiscutablement les plus sujettes à polémique pour les élus : la diminution du nombre de parlementaires et la limitation du nombre de mandats locaux dans le temps. Ces mesures apparaîtront dans le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire qui vont suivre.
Le texte constitutionnel présenté la semaine dernière, et désormais disponible dans la version revue par le Conseil d’État, contient de nombreuses mesures très importantes (lire Maire info du 17 avril). Parmi elles, on retiendra le « droit à la différenciation », clé de voûte du fameux « pacte girondin » voulu par le président de la République : deux phrases seraient ajoutées à l’article 72 de la Constitution afin de permettre à des collectivités d’une même catégorie d’exercer des compétences différentes en nombre limité (« Sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti, la loi peut prévoir que certaines collectivités territoriales exercent des compétences, en nombre limité, dont ne disposent pas l’ensemble des collectivités de la même catégorie » ) ; et par ailleurs que certaines règles qui régissent l’exercice de leurs compétences puissent déroger aux lois et règlements sur certaines parties du territoire ( « Les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l’a prévu, déroger, pour un objet limité, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences, éventuellement après une expérimentation autorisée dans les mêmes conditions » ).
Le texte propose aussi de réformer profondément le Cese (Conseil économique, social et environnemental). Jusqu’ici, le gouvernement avait prévu de le rebaptiser « Chambre de la participation citoyenne ». Après avis du Conseil d’État, ce nom est devenu « Chambre de la société civile ». Elle serait chargée notamment d’organiser la consultation du public et le nombre de ses membres serait ramené à 155, contre 233 aujourd’hui.
Les autres articles du texte concernent notamment la procédure parlementaire (limitation du droit d’amendement, raccourcissement de la période d’examen du budget), la Corse, dont la « spécificité » serait inscrite dans la Constitution, ou encore l’interdiction de cumuler un poste de ministre et une fonction exécutive locale.
Le même jour, mercredi 9 mai, a eu lieu à l’Assemblée une séance de questions au gouvernement spéciale, consacrée à la réforme des institutions. Les mesures contenues dans le premier projet de loi n’ont quasiment pas été évoquées, contrairement à ce qui se trouvera dans les deux suivants. De nombreux députés sont montés au créneau contre plusieurs mesures, au premier rang desquelles la limitation d’un tiers du nombre de députés et de sénateurs. Un député représente aujourd’hui en moyenne 116 000 habitants, a ainsi plaidé la députée Insoumise Clémentine Autain. Demain, « il en représenterait 195 000 ». « Le territoire à représenter sera beaucoup plus vaste, au détriment de la proximité », s’est aussi inquiété le député LR Sébastien Leclerc. Pour ces députés, la limitation du nombre d’élus va forcément augmenter la charge de travail de chacun d’entre eux (séance et commissions) au détriment de la présence en circonscription.
Autre question revenue dans la bouche de plusieurs députés : celle de la limitation à trois du nombre de mandats exécutifs locaux successifs. Même restreinte aux seules communes de plus de 9 000 habitants, cette réforme reste très mal vécue par les élus locaux. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, l’a pourtant pleinement assumée devant les députés, au nom du « renouvellement démocratique » et de la volonté « d’éviter toute confiscation de pouvoir ».
Un point cependant sera à suivre très attentivement lors de l’examen de ce texte (probablement à la rentrée) : son caractère non rétroactif. Devant le Congrès de l’AMF, en novembre dernier, le président Macron a été clair : la loi ne sera pas rétroactive. Elle ne s’appliquerait donc qu’à compter des prochaines élections municipales, en 2020, et interdirait aux élus de se représenter trois mandats plus tard, soit en 2038.
Mais une députée du groupe LaRem, Hélène Zannier, a bousculé les certitudes lors de ce débat, estimant qu’il faut « donner à cette réforme la plus grande portée possible, c’est-à-dire préciser qu’elle sera immédiatement applicable ». La ministre a répondu avec une formule plutôt ambigüe : « Il est actuellement prévu que le mandat en cours soit le premier comptabilisé ». Autrement dit, par exemple, les maires élus en 2014 seraient concernés et ne pourraient plus se présenter non à partir de 2038 mais à partir de 2032. Ceci est d'ailleurs confirmé dans l'exposé des motifs du texte. Quant aux termes « actuellement prévu », ils laissent apparemment la porte ouverte à des évolutions… par exemple par des amendements du groupe ultra-majoritaire à l’Assemblée nationale, La République en marche ?
Télécharger les propositions de l’AMF sur la réforme constitutionnelle.
Le texte présenté mercredi dernier ne contient donc pas les deux mesures indiscutablement les plus sujettes à polémique pour les élus : la diminution du nombre de parlementaires et la limitation du nombre de mandats locaux dans le temps. Ces mesures apparaîtront dans le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire qui vont suivre.
Le texte constitutionnel présenté la semaine dernière, et désormais disponible dans la version revue par le Conseil d’État, contient de nombreuses mesures très importantes (lire Maire info du 17 avril). Parmi elles, on retiendra le « droit à la différenciation », clé de voûte du fameux « pacte girondin » voulu par le président de la République : deux phrases seraient ajoutées à l’article 72 de la Constitution afin de permettre à des collectivités d’une même catégorie d’exercer des compétences différentes en nombre limité (« Sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti, la loi peut prévoir que certaines collectivités territoriales exercent des compétences, en nombre limité, dont ne disposent pas l’ensemble des collectivités de la même catégorie » ) ; et par ailleurs que certaines règles qui régissent l’exercice de leurs compétences puissent déroger aux lois et règlements sur certaines parties du territoire ( « Les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l’a prévu, déroger, pour un objet limité, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences, éventuellement après une expérimentation autorisée dans les mêmes conditions » ).
Le texte propose aussi de réformer profondément le Cese (Conseil économique, social et environnemental). Jusqu’ici, le gouvernement avait prévu de le rebaptiser « Chambre de la participation citoyenne ». Après avis du Conseil d’État, ce nom est devenu « Chambre de la société civile ». Elle serait chargée notamment d’organiser la consultation du public et le nombre de ses membres serait ramené à 155, contre 233 aujourd’hui.
Les autres articles du texte concernent notamment la procédure parlementaire (limitation du droit d’amendement, raccourcissement de la période d’examen du budget), la Corse, dont la « spécificité » serait inscrite dans la Constitution, ou encore l’interdiction de cumuler un poste de ministre et une fonction exécutive locale.
Le même jour, mercredi 9 mai, a eu lieu à l’Assemblée une séance de questions au gouvernement spéciale, consacrée à la réforme des institutions. Les mesures contenues dans le premier projet de loi n’ont quasiment pas été évoquées, contrairement à ce qui se trouvera dans les deux suivants. De nombreux députés sont montés au créneau contre plusieurs mesures, au premier rang desquelles la limitation d’un tiers du nombre de députés et de sénateurs. Un député représente aujourd’hui en moyenne 116 000 habitants, a ainsi plaidé la députée Insoumise Clémentine Autain. Demain, « il en représenterait 195 000 ». « Le territoire à représenter sera beaucoup plus vaste, au détriment de la proximité », s’est aussi inquiété le député LR Sébastien Leclerc. Pour ces députés, la limitation du nombre d’élus va forcément augmenter la charge de travail de chacun d’entre eux (séance et commissions) au détriment de la présence en circonscription.
Autre question revenue dans la bouche de plusieurs députés : celle de la limitation à trois du nombre de mandats exécutifs locaux successifs. Même restreinte aux seules communes de plus de 9 000 habitants, cette réforme reste très mal vécue par les élus locaux. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, l’a pourtant pleinement assumée devant les députés, au nom du « renouvellement démocratique » et de la volonté « d’éviter toute confiscation de pouvoir ».
Un point cependant sera à suivre très attentivement lors de l’examen de ce texte (probablement à la rentrée) : son caractère non rétroactif. Devant le Congrès de l’AMF, en novembre dernier, le président Macron a été clair : la loi ne sera pas rétroactive. Elle ne s’appliquerait donc qu’à compter des prochaines élections municipales, en 2020, et interdirait aux élus de se représenter trois mandats plus tard, soit en 2038.
Mais une députée du groupe LaRem, Hélène Zannier, a bousculé les certitudes lors de ce débat, estimant qu’il faut « donner à cette réforme la plus grande portée possible, c’est-à-dire préciser qu’elle sera immédiatement applicable ». La ministre a répondu avec une formule plutôt ambigüe : « Il est actuellement prévu que le mandat en cours soit le premier comptabilisé ». Autrement dit, par exemple, les maires élus en 2014 seraient concernés et ne pourraient plus se présenter non à partir de 2038 mais à partir de 2032. Ceci est d'ailleurs confirmé dans l'exposé des motifs du texte. Quant aux termes « actuellement prévu », ils laissent apparemment la porte ouverte à des évolutions… par exemple par des amendements du groupe ultra-majoritaire à l’Assemblée nationale, La République en marche ?
F.L.
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