Les élus ultramarins aux avant-postes
Par Fabienne Nedey
« L’hommage des maires de France aux maires ultramarins est le plus dense, le plus fort, le plus convaincu… », a affirmé François Baroin, président de l’AMF, en ouvrant le débat. Il a rappelé à quel point ces territoires ont été touchés par la crise (sanitaire, sociale, sociétale, économique…) déclenchée par la pandémie de covid-19. Il a souligné également que cette crise a mis en pleine lumière des difficultés structurelles de ces territoires.
Ce que les maires ultramarins ont confirmé et étayé d’exemples au cours des débats qui s’en sont suivis. Globalement, il était d’ailleurs frappant de constater, au cours de cette journée, à quel point leurs expressions étaient en phase avec le thème du 103e Congrès : « Les maires en première ligne face aux crises ». À partir de témoignages pratiques et concrets, ils ont dressé un certain nombre de constats : sur la gestion centralisée de l’État, son manque de concertation avec les élus locaux (au mieux réduit à de « l’information », comme l’indiquait Jocelyn Sapotille, maire du Lamentin et président de l’Association des maires de Guadeloupe), son incapacité globale à faire confiance aux maires… Il a été beaucoup question de la perte d’autonomie financière des collectivités, car dans le contexte ultramarin, comme ailleurs mais plus qu’ailleurs, s’exercent des pressions multiples sur les finances locales, s’agissant aussi bien de l’inflation des dépenses que de l’amenuisement des recettes. Ces éléments apparaissent clairement dans un document clé fraîchement publié par l’AMF : l’analyse des comptes de gestion des communes et EPCI de Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et La Réunion.
Rattrapage
Rappelons qu’après avoir impulsé une évaluation de l’écart existant, au regard du droit commun, en matière de dotations pour le bloc local dans cinq départements d’Outre-Mer, le Comité des finances locales (CFL) avait proposé des solutions pragmatiques pour corriger cet écart. Si ce rattrapage est désormais en route, il se fait au détriment des collectivités de métropole les plus défavorisées financièrement. Le financement de ce rattrapage est en effet pris sur la DGF, à enveloppe fermée : la solidarité s’exerce donc des collectivités métropolitaines vers celles d’Outre-Mer, sans que l’Etat contribue.
Pour revenir aux difficultés financières des collectivités ultramarines, elles sont bien résumées dans la motion adoptée à l’unanimité à l’occasion du 29e Congrès de l’ACCD’OM (l’Association des communes et collectivités d’outre-mer) qui s’est tenu la semaine dernière à La Réunion (https://www.france-accdom.org/site/PRESSE/Motion2021.pdf). La motion demande notamment que le gouvernement « renonce définitivement à intégrer l’octroi de mer dans le potentiel financier des communes », de « rétablir immédiatement le droit commun pour le FPIC », ou encore « d’augmenter et d’accélérer le rattrapage de la Dacom ».
La journée dédiée à l’outre-mer a aussi été l’occasion de faire le point sur le plan de relance gouvernemental. Pour la sénatrice de la Guadeloupe, Victoire Jasmin, « France Relance aurait pu et dû apporter une bouffée d’oxygène. Mais se saisir des opportunités qui sont ouvertes s’avère compliqué pour nos communes et EPCI ». Les élus ultramarins ont en effet largement dénoncé le cahier des charges imposé (calendrier, complexité de montage des dossiers …), un « fléchage » peu adapté à leurs territoires (des priorités « plaquées », qui ne sont pas les leurs), ainsi que la question du décaissement des fonds alloués (ce qui fait écho à un rapport du rapporteur général de la commission des finances du Sénat, Jean-François Husson, présenté le 27 octobre dernier).
Au cours du débat, à plusieurs reprises, des intervenants ont soulevé, une nouvelle fois, le besoin de différenciation dans la mise en œuvre des politiques publiques sur ces territoires (par une adaptation des règles et normes à leurs spécificités). Ce qui a relancé la discussion sur les enjeux du volet outre-mer du projet de loi « 3DS » (pour « différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification » ). Pour mémoire, le projet de loi adopté par le Sénat est actuellement examiné en commissions à l’Assemblée nationale.
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