Inégalités d'accès à l'éducation : les maires remontent le sujet en haut de la pile des priorités
Par Emmanuelle Stroesser
Le sujet n’est pas mince. Comme l’a rappelé le sociologue Choukri Ben Ayed, « l’école française n’est pas mauvaise » mais elle fait partie de celles où « les écarts sociaux sont les plus élevés entre les plus riches et les plus pauvres ». Le système est donc « plutôt performant pour l’élite mais pas pour les élèves en grande difficulté ».
Agenda rural
Lutter contre les inégalités d’accès des enfants à l’éducation en milieu rural, cela passe par « rendre l’école rurale plus attractive ». Christian Montin, président de l’Association des maires du Cantal, croit pour cela dans les « conventions ruralité », signées entre l’État et des associations départementales des maires. « C’est un dispositif dérogatoire qui nous permet de réfléchir à ce que nous voulons comme école de qualité, et demander au ministère de nous donner les moyens pour cela ». Les acteurs locaux doivent davantage, selon lui, se saisir du potentiel offert par ce dispositif, l’école rurale ne devant pas se résumer à des ratios numériques.
L’école est « le sujet qui doit être un point déterminant de l’agenda rural », insiste Frédérique Leturque. Dans l'assistance, plusieurs élus d’outre-mer ont également rappelé la nécessité de mieux prendre en considération leurs difficultés liées à l’éloignement géographique et aux moyens dédiés à leurs écoles, par exemple pour financer les outils numériques.
Carte scolaire
« Chaque année on repasse sur la table de jeu. L’Education nationale raisonne parfois de manière comptable mais il faut qu’elle investisse sur le contribuable de demain aussi ! ». C’est le sujet de la carte scolaire. Les maires demandent à ce que leurs investissements dans de nouvelles classes, équipements, écoles, ne soient « pas remis en question du jour au lendemain sous prétexte d’un petit effritement des effectifs », et soient sécurisés. Carte scolaire et sectorisation scolaire, voilà bien « deux thématiques récurrentes », relève Delphine Labails, maire de Périgueux (24).
Cités éducatives et territoires ruraux éducatifs
Les territoires éducatifs ruraux, font partie des expérimentations lancées en 2021. Présentés comme le pendant des cités éducatives qui sont elles expérimentées dans les quartiers prioritaires de la ville depuis quelques années. L’enjeu, dans les deux cas, est de « fédérer la communauté éducative » et de « sortir de nos silos respectifs », résume Marc Andreu-Sabater, maire de Vire Normandie (14). Pour Catherine Arenou, maire de Chanteloup-les-Vignes (78), l’une des premières communes à lancer sa cité éducative en 2018, « cela change tout quand on créé cette éducation de la confiance, apaisée, où l’enfant comprend que tous les acteurs sont là pour sa réussite et non pas pour lutter contre son échec ». Elle revendique ainsi qu’ « aucun enfant » de Chanteloup n’ait été « perdu pendant le premier confinement ». ». L’enjeu est d’accompagner l’enfant vers sa réussite plutôt que de lutter contre son échec.
« Tous ces dispositifs n’ont de sens que s’ils inscrivent dans durée », c’est le message des maires au gouvernement. Outre la stabilité des dispositifs, Frédéric Leturque considère que le maire doit jouer un rôle prépondérant sur son territoire, en tant que chef d’orchestre.
La solution, c’est aussi la mixité « dès l’âge de la maternelle » ; interpelle une élue rurale lors des temps d’échange. Une intervention saluée d’applaudissements.
Restauration scolaire, activités périscolaires
Les maires disposent aussi de compétences qui sont autant de « leviers » auxquels ils croient pour « favoriser le développement de l’enfant ». Et « qui font que chacun peut apporter sa touche à cette politique publique », souligne Delphine Labails. À Poitiers (86), la municipalité mise sur les vacances, « un temps éducatif à part entière », défend la maire Léonore Moncond’huy. La ville a lancé un « plan vacances pour tous ». Et elle prépare pour février 2022, avec l’AMF, la première rencontre nationale de l’éducation populaire au regard de la pénurie des animateurs qui a été renforcée par la crise sanitaire.
Autre exemple avec la cantine. « Au travers de l’alimentation on questionne les rythmes, on redonne du temps à l’enfant, de ce temps de recréation essentiel pour se reposer avant de reprendre les apprentissages », assure Delphine Labails. Les enjeux sont autant de faire que ce soit un temps calme, de qualité et accessible à tous… À ce sujet, la Défenseure des droits Claire Hédon, a joué son rôle en rappelant aux maires que « dès lors que la cantine existe, elle doit être accessible aux enfants ». Une élue de Guyane a, elle, rappelé à ses collègues, que dans ce département français « tous les enfants ne vont pas à l’école ». Quant à la cantine… « Vous nous faites rêver ! Vos difficultés sont notre paradis ».
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