Emmanuel Macron dit sa « confiance » aux maires, sans annoncer d'infléchissement de sa politique
Par Franck Lemarc
Dès l’entame et en conclusion de son discours, Emmanuel Macron a voulu redire sa « confiance » aux maires, et sa « reconnaissance » pour avoir « tenu » dans les crises qui ont ébranlé le pays depuis cinq ans.
Après avoir « déambulé » pendant plusieurs heures au Salon des maires, mercredi après-midi, le chef de l’État a reçu un certain nombre de maires dans ce qui est devenu une réception traditionnelle, à l’Élysée. Il a voulu à cette occasion saluer le rôle « essentiel » dans toutes les crises (gilets jaunes, pandémie, et maintenant crise inflationniste) du « couple maire-préfet », dont il « croit à la force et à la constance ».
Inflation
Emmanuel Macron a d’abord évoqué les dispositifs de soutien du gouvernement face à la hausse des prix de l’énergie : tarifs réglementés pour « 30 000 communes », « amortisseur électricité », que le chef de l’État a défini comme déjà mis en place, ce qui n’est pas le cas, et enfin filet de sécurité, dont les modalités étaient encore en discussion hier au Sénat. Le gouvernement semble ouvert à l’idée d’en élargir l’accès et le chef de l’État a parlé d’en rendre les critères « plus simples et plus opérationnels ». Emmanuel Macron s’est également félicité de la hausse, inédite depuis des années, de la DGF, et de la création du Fonds vert de 2 milliards d’euros. « Un geste important, mais je crois justifié, compte tenu d'abord du choc que vous subissez, et de ce que nos communes représentent aussi dans l'investissement public dont nous avons tant besoin. »
On sait que, sur le filet de sécurité comme sur la légère hausse de la DGF, l’AMF estime clairement que le compte n’y est pas. Au Sénat, hier, des dispositifs beaucoup plus proches de la réalité de problèmes vécus par les maires ont été votés (+ 800 millions d’euros sur la DGF et filet de sécurité « universel », lire article ci-dessous), mais il reste à savoir ce qui subsistera de ces mesures après le passage en commission mixte paritaire... et le prochain 49-3.
Montée des violences
Emmanuel Macron s’est ensuite longuement attardé sur la montée de la « violence qui s’installe dans notre société ». Avec des mots qu’il a voulus « très forts » : « En démocratie, la haine et la violence n’ont pas de place, parce qu’on choisit celles et ceux qui nous représentent (…). Chaque fois que quelqu’un dans notre société commence à choisir la violence, qu’elle soit verbale ou qu’elle soit physique, il trahit les fondements même d’une société démocratique. »
Face à cette violence Emmanuel Macron a d’abord évoqué « une réponse régalienne d’autorité », une réponse pénale « plus rapide et plus ferme », et surtout « un immense travail de rééducation », évoquant « un vrai travail de civilisation à bâtir », « la transition d’un ordre ancien à un ordre nouveau ».
Le ZAN
Emmanuel Macron a volontiers reconnu que le ZAN (zéro artificialisation nette) est un « sujet d’inquiétude » pour de nombreux maires, ce qui est peu dire. Il en a néanmoins défendu le principe (« c’est une très bonne idée » ), et a rappelé que sa philosophie correspond à « ce que veulent les maires », qui veulent « se développer sans faire de l’étalement ». Voulant rassurer les élus, Emmanuel Macron a affirmé qu’il ne s’agit pas de « tout arrêter, de dire qu’il n’y a plus de projets » : l’objectif est « d’aller deux fois moins vite [sur l’artificialisation] d’ici 2030 et d’aller vers une neutralité en 2050 ». Pour que le dispositif fonctionne, a poursuivi le président de la République, il faut qu’il soit « différencié et territorialisé » : « On va réfléchir et travailler sur nos friches à certains endroits, libérer de la capacité à créer des projets dans d'autres, c'est une bonne approche. Voilà comment on l’abordera. »
Décentralisation, un discours flou
Le chef de l’État a balayé toute sorte de sujets (petite enfance, école, grand âge, santé), mais se bornant essentiellement à faire des constats, sans proposer de solution nouvelle.
Emmanuel Macron a conclu son propos en parlant du « refondation » et décentralisation. Il a souhaité assurer le service après-vente du « CNR » (Conseil national de la refondation », qu’il a lancé en cette rentrée. Il s’est montré assez ferme sur le sujet, avec une véritable injonction aux maires à y « participer » : « Sur ce Conseil national de la refondation, j'attends vraiment votre participation. Saisissez-vous de cela. C'est un instrument de révolution. Ceux qui veulent mener la révolution doivent se saisir de cet instrument. Ceux qui ne veulent pas s'en saisir ne peuvent pas venir se plaindre après. »
Enfin, il a abordé la question de la décentralisation, dans une conclusion peu aisée à comprendre. Affirmant en même temps que « l’expérience montre que la décentralisation n’a jamais réglé aucun problème » puis, quelques minutes plus tard, que « la décentralisation, ça marche », Emmanuel Macron a répété ce qu’il avait déjà évoqué l’an dernier au congrès : la « vraie décentralisation » consiste à transférer « la compétence, la responsabilité, le pouvoir normatif et le financement ». Cela demande « un débat en profondeur », qui, selon lui, sera mené « au premier semestre de l’année prochaine », pour aller vers « une réforme institutionnelle ».
Les maires attendent maintenant la venue de la Première ministre, Élisabeth Borne, qui prononcera le discours de clôture du 104e Congrès. Annoncera-t-elle un « bougé » du gouvernement sur les nouveaux « contrats de confiance » ? Une ouverture du gouvernement sur un élargissement du filet de sécurité ou sur la hausse de la DGF ? Réponse en fin d’après-midi.
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