Intercommunalité : le difficile « chemin de crête » entre adaptation et stabilité
Alors que le gouvernement offre une posture plus à l’écoute des communes, après les bouleversements provoqués par la loi Notre, les récentes évolutions de l’intercommunalité montrent bel et bien un blocage, notamment chez les maires de communes rurales, dont beaucoup ont manifesté hier leur sentiment de dépossession lors du premier débat du congrès, intitulé « Intercommunalité : quelles organisations territoriales pour le prochain mandat ? ».
« Les dernières études montrent que 25 % des maires souhaitent une révision de la carte intercommunale, mais aussi que 70 % des citoyens voudraient que leur commune retrouve des compétences perdues », a lancé André Laignel, premier vice-président délégué de l’AMF et maire d’Issoudun (36), en introduction du débat.
En même temps, la diversité des territoires fait que si certains veulent que « les bouleversements s’arrêtent », d’autres veulent au contraire « que ça bouge », a ajouté l’élu.
Le ministre chargé des Collectivités territoriales, Sébastien Lecornu, a reconnu que « nous avançons sur un chemin de crête compliqué, entre besoin de stabilité, et adaptations nécessaires » à la loi Notre, et pris acte du « sentiment de dépossession » de nombre de maires. Selon lui, pourtant, il est possible « d’avancer sans détricoter » les textes précédents, notamment via le nouveau projet de loi « Engagement dans la vie locale et proximité de l’action publique », qui comporte plus « d’assouplissements » que de nouvelles contraintes.
Le ministre a promis que lors de l’examen en plénière du texte à l’Assemblée, cette semaine, il allait « revenir sur un certain nombre de dispositions » apportées par le Sénat en première lecture, et écartées par la Commission des lois du palais Bourbon – 17 amendements ont été déposés par le gouvernement. Ce dernier va appuyer ainsi, « tel que le Sénat l’a imaginé, un pacte de compétences » à passer entre l’EPCI et ses communes, pour éviter les « effets de bords » de la loi Notre.
En revanche, sur le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement, dont des améngaments sont prévus pour les communautés de communes, mais pas les communautés d'agglomératiion, il a maintenu la position du gouvernement : transfert obligatoire, avec possibilité aux EPCI de la déléguer en retour aux communes
« Pourquoi les transférer en premier lieu alors ? C’est de la bureaucratie stupide », a réagi un maire de Haute-Loire dans la salle, critiquant notamment le transfert de la compétence « eau pluviale », relevant par excellence de la proximité.
De manière générale, nombre des maires s’exprimant dans la salle ont rapporté leurs incompréhensions et leurs critiques quant à l’évolution de l’intercommunalité, avec un vrai fossé apparent entre les maires des bourgs et villes-centre et les maires ruraux, dont beaucoup ont du mal à trouver leur place, en particulier dans les intercommunalités « XXL ».
Ainsi s’est exprimé l’un des 94 maires de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées, en Ariège, qui, avec d’autres collègues, a arrêté de siéger au conseil communautaire, où ils « restent inaudibles ». Ou une autre maire affirmant que « les maires ruraux sont souvent laissés de côté, pas représentés dans les bureaux », et qu’ils ne peuvent pas suivre le changement d’échelle qui impose « un dédoublement du temps de travail » : « On ne peut pas y arriver même en faisant 70 ou 80 heures par semaine, et si nous ne siégeons pas, beaucoup de choses nous échappent », a-t-elle fait valoir.
« Il faut reprendre la question de la représentativité », a acquiescé Pierre Jouvet, président de la communauté de communes Porte de DrômArdèche. « Il n’est plus possible d’avoir un délégué pour certaines communes, et 25 ou 35 pour les plus grandes ! »
Ce à quoi Sébastien Lecornu a répondu que si la loi, par exemple la proposition de loi de Jean-Pierre Sueur sur les accords locaux, peuvent amener des améliorations, « il y a aussi ce qui ne fera jamais l’objet de normes, mais relève des élus eux-mêmes, et il faut le dire aux concitoyens ».
E.G-E.
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