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Édition du vendredi 27 juin 2025
Commerce

La réforme des titres-restaurants suscite la colère des restaurateurs

À peine présentée et déjà critiquée: la réforme des titres-restaurants portée par la ministre du Commerce et des PME Véronique Louwagie, qui pérennise leur utilisation totale pour faire les courses alimentaires, a provoqué jeudi la colère des restaurateurs.

Par Séverine Rouby, AFP

« C'est un séisme pour la restauration et une trahison du gouvernement », s'est indigné auprès de l'AFP Franck Chaumes, responsable de la branche restauration de l'Umih, première organisation patronale du secteur. En cause: l'abandon dans la réforme de la piste d'un double plafond d'utilisation des titres-restaurants, qui aurait été plus élevé dans les restaurants que dans la grande distribution.

« Cette réforme vise à simplifier, moderniser et protéger, sécuriser le titre-restaurant. Le titre-restaurant concerne plus de 5,5 millions de salariés. Cela correspond à 10 milliards d'euros émis chaque année et c'est un élément important de pouvoir d'achat des salariés », a rappelé Véronique Louwagie lors d'une présentation jeudi.

La possibilité de faire toutes ses courses alimentaires avec ces titres (sauf l'alcool, les confiseries, les produits infantiles et les aliments animaliers), dispositif temporaire lancé en 2022 et prorogé chaque année depuis, sera pérennisée à partir de 2027.

Le gouvernement fait valoir la popularité de cette possibilité auprès des salariés ainsi qu'un changement des modes de consommation, entre télétravail et repas préparés à la maison puis apportés sur le lieu de travail.

« On est très en colère. Ça fait deux ans qu'on essaie de trouver un consensus, de trouver un usage qui convienne à tout le monde. C'est inacceptable d'abandonner le double plafond qui est pour nous une condition sine qua non. Nous ne soutiendrons pas ce projet de loi », a indiqué à l'AFP Franck Trouet, délégué général du GHR, autre organisation de la restauration.

Si le véhicule (projet ou proposition de loi) n'est pas encore arrêté, la ministre mise sur un calendrier « à l'automne 2025 ou au printemps 2026 ».

Commissions

Les restaurateurs de l'Umih et du GHR, qui évaluent à 1,5 milliard d'euros leur manque à gagner depuis l'extension du dispositif pour faire toutes les courses, ont annoncé à l'AFP leur intention de boycotter les assises de la restauration prévues à l'automne par la ministre.

Véronique Louwagie fait valoir que la dématérialisation des titres-restaurants prévue pour 2027, autre point de la réforme, « va simplifier la vie des restaurateurs ». L'utilisation le dimanche, la transparence demandée aux émetteurs de titres-restaurants sur les commissions avec la fin des remises de fin d'année, sont également selon elle des points favorables aux restaurateurs.

« Les salariés financent leurs titres, ils doivent pouvoir les utiliser librement », a réagi Layla Rahhou, déléguée générale de la Fédération du commerce et de la distribution, saluant une réforme « de bon sens ».

« La dématérialisation, on l'attendait pour 2026 et les commissions, ça ne représente rien : les adhérents de l'Umih payent en moyenne 3,5 %, si elles baissent d'un point, ça fait entre 1 000 et 1 100 euros par an par établissement, ce n'est pas ça qui va sauver la restauration », s'emporte Franck Chaumès.

La réforme ne prévoit pas de plafonnement des commissions versées par les commerçants, même si la ministre prévoit « une vigilance très active »  pour que les différents acteurs se mettent autour de la table pour faire baisser ces coûts.

Un point qui a bénéficié à Edenred, maison mère du Ticket Restaurant dont l'action a gagné plus de 6 % à la Bourse de Paris jeudi à la clôture. Le groupe estime que la réforme permettra à davantage de salariés de bénéficier des titres-restaurants, qui sont proposés aujourd'hui à 27 % d'entre eux.

Mais « nous regrettons que le gouvernement n'ait pas retenu l'idée du double plafond. Cela aurait été une mesure de justice et d'équité vis-à-vis de la restauration, reconnaissant que le montant d'un repas n'est pas le même dans un restaurant et au supermarché », a souligné auprès de l'AFP Ilan Ouanounou, directeur général d'Edenred France.

Même point de vue chez Pluxee (ex-Sodexo), autre émetteur de titres-restaurants qui soutient « l'instauration d'un double plafond de dépense ». « Toutes les mesures ne nous conviennent pas mais elles sont l'objet d'un compromis et certaines vont clairement dans le bon sens », a jugé de son côté Youssef Achour, PDG de Upcoop (UpDéjeuner).

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