Comité interministériel du handicap : le gouvernement n'annonce « aucune nouvelle mesure » mais acte des « progrès »
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« L’amélioration de la vie des personnes handicapées doit, jusqu’au dernier jour du quinquennat, rester l’une des grandes priorités ». Le volontarisme affiché par le Premier ministre, Jean Castex, hier en ouverture du Comité interministériel du handicap (CIH), tranchait avec l’analyse d’un collectif de responsables d’associations relayée trois heures plus tôt dans une tribune publiée par Le Monde. « Les personnes en situation de handicap voient leurs conditions de vie se dégrader profondément, alertent-ils. Le défaut de propositions de l’État français les laisse privées de leurs droits d’accès à des accompagnements adaptés, au logement et aux soins. Ces personnes, trop souvent exclues de la société, sont exposées à la pauvreté. Les observations du Défenseur des droits, publiées en mars 2021, démontrent encore une fois que les droits des personnes en situation de handicap et de leurs familles restent entravés », écrivent-ils, amers.
Le CIH n’a donné lieu à « aucune nouvelle mesure », déplore sur son site Handicap.fr, hormis peut-être la mise en place au 1er janvier 2022 d'un plan d'action visant à favoriser et à sécuriser les parcours professionnels des travailleurs en établissements et services d'aide par le travail (Esat). Il se déroulait, de plus, dans un contexte marqué par le vote, le 17 juin dernier, d’une révision contestée du calcul de l'allocation adulte handicapé (AAH) pour les personnes en couple. Soutenue par l’exécutif, celle-ci écarte son « individualisation » pourtant largement défendue par le monde associatif. Jean Castex est revenu brièvement sur cet épisode… « J’entends parfaitement les colères ou les prises de position qu’a pu susciter la position du gouvernement dans ce débat. La déconjugalisation n’est pas une question évidemment illégitime, bien au contraire ». Tout en maintenant son « cap » : « C’est une question que nous ne pouvions pas aborder sans considérer l’ensemble de notre modèle social [et] l’ensemble des leviers qui participent de l’autonomie financière ».
Ulcérée le 17 juin, l’Association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh) dénonçait, hier encore dans un communiqué de presse, un paradoxe : « Derrière la volonté affichée par le gouvernement de bâtir une société inclusive, cette décision empêche des millions de personnes d’accéder à leur pleine autonomie ». L’APF France Handicap s’est, elle aussi, émue de cette décision en relayant sur Twitter le témoignage, dans Le Parisien, d’un couple de Lavaur (Tarn), « obligé de divorcer pour pouvoir toucher l’allocation adulte handicapé ». Une manifestation contre cette décision réunira, le 16 septembre, les associations de défense des personnes handicapées. Le #AAH16septembre est déjà lancé.
« Des progrès réalisés vers une école inclusive »
Plutôt que sur les griefs des associations au sujet de la réforme de l’AAH, le Premier ministre a préféré se focaliser sur « les progrès que nous avons enregistrés depuis le précédent CIH » (lire Maire info du 17 novembre 2020). Et le Premier ministre de citer la décision de son gouvernement d’étendre massivement le zéro reste à charge pour les familles dont l’enfant âgé entre zéro et six ans présenterait des troubles du neurodéveloppement. « Quatre fois plus (de familles) qu’en novembre dernier (en) bénéficient ».
Jean Castex a aussi évoqué l’investissement annuel de 3,3 milliards d’euros dans l’école inclusive (« C’est quand même 60 % de plus par rapport à 2017 ! » ). Tout en soulignant les « progrès réalisés vers une école inclusive », le Collectif Handicaps a toutefois « rappelé que [l’école inclusive] reste chaque année un leurre pour de nombreux élèves qui se retrouvent sans école ou sans AESH [le nombre d’accompagnants d’élèves en situation de handicap est passé de 70 000 à 120 000, ndlr], dont le statut reste encore très précaire ».
Dans un communiqué, l’Apajh, quant à elle, « réitère [son] appel [portant sur] la généralisation des Pôles inclusifs d’accompagnement localisés (Pial) qui intègrent les équipes mobiles d’appui à la scolarisation […] le déploiement massif des unités d’enseignement dans les écoles, collèges et lycées, la création de dispositifs Ulis [Unités localisées pour l’inclusion scolaire], ainsi que la formation des enseignants et accompagnants, en lien avec le secteur médico-social. »
PCH parentalité, des démarches administratives bientôt plus accessibles
Citons aussi la mise en œuvre de la prestation de compensation du handicap (PCH) parentalité à laquelle « près de 1000 familles » ont droit depuis le 1er janvier 2021. « Le temps de la préparation du repas et de la vaisselle est désormais intégré dans l'aide à l'alimentation financée par la PCH [et] les personnes ayant droit à la PCH avant leurs 60 ans pourront continuer à en bénéficier après 75 ans », complète le Premier ministre. Aussi, 135 000 personnes bénéficient désormais d’un droit à vie à l’âge et plus d’un million d’une carte mobilité inclusion à vie ».
Jean Castex s’y était engagé à l’automne : le gouvernement a depuis « déterminé les outils d’une communication publique plus accessible » : 100 % des vidéos sont accessibles sur les sites gouvernementaux, une vingtaine de dossiers de presse ont été rendus accessibles depuis mars 2021. En léger progrès, 16 % des 250 démarches administratives en ligne les plus consultées par les Français sont désormais accessibles, « soit 4 % de plus qu’en janvier 2021 ». 32 millions d’euros sont dédiés dans le plan France relance pour atteindre 40 % de mise en accessibilité fin 2021 et 80 % en 2022.
L’accessibilité des campagnes électorales (obligation pour les candidats à l'élection présidentielle à partir de 2022 de déposer leur proposition de foi en langage facile à lire et à comprendre) est, en revanche, un point qui « n’a pas avancé », a souligné Jérémie Boroy, président du Comité national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). Les associations ont donc été invitées à formuler des « propositions » rapidement.
Ambassadeurs pour l'accessibilité
Enfin, comme Maire info l'expliquait dans son édition du 27 mai, le gouvernement a concrétisé le réseau d'ambassadeurs censés accompagner les ERP (établissements recevant du public) vers l'accessibilité. « Des jeunes en service civique sont chargés d’accompagner les différents acteurs des territoires recevant du public (gares, commerces, bibliothèques, centres médicaux et dentaires, etc.), pour renforcer l’accès aux services du quotidien. Ils pourront s’appuyer sur la plateforme collaborative « Accès libre », en cours de développement, qui vise à permettre de connaître en temps réel l’accessibilité des ERP d’un territoire (11 000 ERP recensés sur la plateforme au 28 juin 2021). »
En matière d'accessibilité au logement cette fois, l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) va mettre en place une fabrique à projet qui permettra d’accompagner des collectivités ou porteurs de projet associatifs ou privés dans 500 projets d’habitat inclusif.
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