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Édition du mardi 1er octobre 2024
Climat

Le Haut Conseil pour le climat critique les coupes budgétaires envisagées

Alors que le Fonds vert risque d'être fortement amputé en 2025, l'organisme estime que les annulations de crédits sont « contre productives ». D'autant que « les aléas climatiques s'intensifient plus rapidement que les moyens mis en Å“uvre pour en limiter les impacts ». 

Par A.W.

« Les annulations récentes de crédits nuisent à la confiance dans la transition climatique. »  Alors que le Premier ministre va présenter, cet après-midi, son discours de politique générale et que son gouvernement cherche à réduire le déficit public, le Haut conseil pour le climat (HCC) a décidé de mettre la pression à Michel Barnier lors de la publication, vendredi, de la version grand public de son rapport annuel.

Les experts du HCC ont insisté sur la « nécessité »  de définir « une direction claire et stable », tout en critiquant les coupes budgétaires et en rappelant « l’urgence »  d’adopter les « textes stratégiques qui encadrent l’action climatique ».

Des coupes budgétaires « contre-productives » 

En juin déjà, l’organisme indépendant chargé d’évaluer l'action publique climatique avait envoyé un message aux candidats aux élections législatives, lors de la parution de son rapport. Il prévenait ainsi que si la France était bien partie pour tenir ses objectifs de réduction de 55 % de gaz à effet de serre à l’horizon 2030, elle ne devait, toutefois, pas relâcher ses efforts et maintenir « le cap de la décarbonisation ». 

Depuis, le dérapage des comptes publics pour 2024 a été acté et Michel Barnier a confirmé qu’il s’attaquerait à la réduction du déficit dans le prochain budget, en se fondant en grande partie sur la feuille de route laissée par l’ancien gouvernement Attal. 

Et celle-ci laisse augurer des coupes claires dans les dépenses en faveur de la transition écologique. En témoigne la prévision de réduction de 1,5 milliard d’euros des crédits du Fonds vert, celui-ci passant potentiellement de près de 2,5 milliards d’euros en 2024 à 1 milliard d’euros en 2025, selon les lettres-plafonds concoctées sous l'égide de l'ancien Premier ministre Gabriel Attal, désormais chef de file des députés macronistes à l’Assemblée nationale. 

Alors que les collectivités vont devoir « plus que doubler »   leurs investissements climatiques actuels si elles veulent tenir les objectifs affichés à l’horizon 2030, le président du Haut conseil, Jean-François Soussana, a confirmé, de manière générale, lors d’une conférence de presse, que « lorsqu’il y a des annulations de crédits, cela nuit à la visibilité de l’action et donc cela nous semble contre-productif ».

Les « financements pluriannuels »  sont ainsi indispensables à l’atteinte de la neutralité carbone en 2050, répètent les experts du HCC. 

D’ici à 2030, « l’action climatique nécessitera de consacrer des financements publics et privés de 60 à 70 milliards d'euros par an tout en arrêtant les subventions aux énergies fossiles », estiment-ils, en rappelant que pour atteindre les objectifs fixés en 2030, les émissions de gaz à effet de serre devront « baisser 1,3 fois plus vite entre 2024 et 2030 que la baisse annuelle moyenne des émissions constatée entre 2019 et 2023 ».

Lois, décrets et planification prennent du retard 

Bien que « les politiques publiques connaissent des avancées significatives qui produisent des effets », l’organisme indépendant constate que « l’élaboration des dispositions législatives prend du retard alors que les concertations ont été effectuées ».

Parmi ces « textes stratégiques »  qui encadrent l’action climatique et qui n’ont « pas encore été adoptés », il pointe la stratégie nationale bas carbone, le plan national d’adaptation au changement climatique ou encore la programmation pluriannuelle de l’énergie.

Pourtant, « l’adoption des lois, la publication des décrets, l’élaboration des documents de planification sont urgentes ». 

Prônant une « direction claire et stable », de la « lisibilité et cohérence dans le temps de l'action climatique », les experts du HCC demandent, notamment, la mise en place de « trajectoires d’incitations publiques, d’investissements verts, de renouvellement des infrastructures et de régénération des écosystèmes forestiers ».

Intensification des aléas climatiques

Le Haut Conseil rappelle, dans son rapport, combien la France est « durement touchée »  par le changement climatique et les moyens pour l’adaptation restaient « insuffisants ».

D’autant que si la baisse des émissions brutes de gaz à effet de serre en France est bien conforme à ce qui était prévu, il s’inquiète de la faible absorption du CO2 par les puits naturels, que sont par exemple les forêts.

Résultat, le second budget carbone (2019-2023) de la France ne sera « vraisemblablement pas respecté du fait de l’effondrement du puits de carbone forestier, fragilisé par le changement climatique », alors pourtant que « les émissions totales ont diminué au rythme prévu par ce budget ». 

« Malgré les efforts faits par les pouvoirs publics pour développer les politiques d’adaptation au changement climatique, les aléas climatiques s’intensifient plus rapidement que les moyens mis en œuvre pour en limiter les impacts », observe-t-il. Sans compter que le continent européen continue de se réchauffer deux fois plus rapidement que le reste du monde, devenant le continent qui se réchauffe le plus vite sur la planète.

Le Haut Conseil estime ainsi qu’il « faut accélérer la baisse des émissions d’ici à 2030 et restaurer le puits de carbone des forêts et des sols », avant de rappeler que « les besoins d’adaptation s’accroissent avec les niveaux de réchauffement et seront d’autant plus importants et coûteux qu’ils seront traités tardivement ».

Les experts mettent, par ailleurs, en garde sur un ensemble de « fragilités »  pour la trajectoire française : visibilité insuffisante du déploiement des énergies renouvelables et nucléaires, « manque de maîtrise de la demande en mobilité », faible taux de rénovations performantes des bâtiments et transition agricole insuffisante. 

Ils notent, toutefois, qu’au niveau mondial, les engagements actuels des pays sont « insuffisants »  pour respecter les objectifs de l’accord de Paris, conditions pour limiter le réchauffement en dessous de 2 °C et le plus près possible de 1,5 °C.

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