Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 16 octobre 2018
Catastrophes

L'Aude dévastée par une inondation historique

« Un paysage de guerre ». C’est ainsi que Jaqueline Gourault, alors encore ministre auprès du ministre de l’Intérieur, a décrit ce matin les conséquences des inondations survenues dans la nuit de dimanche à lundi et hier, dans l’Aude. Particulièrement touchées, les communes de Trèbes – déjà touchée, au printemps dernier, par le terrorisme – et celle de Villegailhenc. Le bilan s’établit ce matin à au moins onze morts, et des dégâts gigantesques – ponts effondrés, routes et lignes de chemin de fer coupées, demeures et bâtiments publics dévastés, emprises agricoles noyées – encore impossible à chiffrer.
C’est un épisode cévenol d’une rare intensité qui a fait, en quelques heures, sortir l’Aude et ses confluents de leur lit, après l’équivalent de trois mois de pluie tombés en cinq heures. Le niveau de l’Aude, dans les communes les plus touchées, est passé d’un mètre à presque 8 mètres, ce qui ne s’était jamais vu depuis le XIXe siècle.
Les victimes actuellement identifiées (6 à Trèbes, 2 à Villegailhenc, une à Villardonnel, à Villalier et à Carcassonne), ont pour la plupart été surprises par la montée des eaux dans leur logement en pleine nuit. De nombreux habitants témoignent d’un niveau d’eau qui a dépassé 2,5 m dans leur habitation.
Si le bilan n’est pas plus lourd, reconnaissent aujourd’hui les autorités, c’est grâce à la mobilisation exceptionnelle des secours, des élus et des habitants eux-mêmes, qui se sont secourus entre eux. Les maires et les élus des communes concernées ont été en première ligne dès la nuit de dimanche à lundi et toute la journée d’hier, cherchant à prévenir les habitants en danger, frappant aux portes pour prendre des nouvelles ou accélérer les évacuations, organisant l’accueil des personnes évacuées, les repas et le couchage dans les locaux municipaux. Jacqueline Gourault, ce matin sur RTL, a d’ailleurs salué « le rôle fondamental »  joué par les maires et salué leur engagement.

Premières polémiques
Au lendemain de cette catastrophe – qui n’est pas encore complètement terminée, le département de l’Aude restant en vigilance rouge aujourd’hui – des polémiques ont déjà éclaté sur le niveau d’alerte émis par Météo France : la vigilance n’est passée au rouge qu’à 6 h du matin lundi. Hier, un porte-parole du ministère de l’Intérieur a lui-même reconnu que cette alerte a probablement été « déclenchée trop tard ». Mais le Premier ministre, en déplacement dans l’Aude hier, a voulu calmer cette polémique naissante en affirmant qu’une alerte rouge qui aurait été déclenchée en pleine nuit, à trois heures du matin, n’aurait « pas changé grand-chose ». Seule annonce à ce sujet, ce matin : Jacqueline Gourault a précisé que l’État allait acheter un « super-calculateur »  qui sera mis à la disposition de Météo-France pour améliorer la précision de ses prévisions. Pour la gestion de l’après-catastrophe, elle a également confirmé que la procédure de reconnaissance de catastrophe naturelle allait être lancée « dès demain ».
À plus long terme, il est certain que de nouveaux débats vont s’engager sur la politique de prévention des inondations : plusieurs élus, dès aujourd’hui, s’expriment déjà pour dénoncer la lenteur des procédures en matière de construction d’ouvrages de protection ou la faiblesse des crédits. Il faudra aussi se poser des questions sur les moyens dont disposent – et disposeront – demain les collectivités, pour assumer la nouvelle compétence Gemapi, puisque maintenant la gestion des digues leur revient. Et s’interroger sur la cohérence, à l’heure où ce type de catastrophes se multiplie, de tailler dans le vif du budget des Agences de l’eau – dont chacun connaît le rôle essentiel en matière de gestion des cours d’eau.
Pour l’instant, l’heure est, pour les territoires touchés, à la gestion de l’urgence – réparer la voirie, reloger les habitants, rétablir l’électricité et les réseaux –, alors que, dans certains villages, 90 % des habitations ont été impactées.
F.L.

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