Édition du mardi 9 décembre 2003
Inondations : les digues au cœur de la polémique
Les digues, qui ont craqué en trois endroits inondant la petite Camargue gardoise et le nord d'Arles, sont au cur de l'inquiétude lors des inondations, suscitant des tensions entre les sinistrés, les collectivités locales et l'Etat.
Le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), Christian Frémont, a d'ores et déjà affirmé qu'il fallait "repenser fondamentalement le problème des digues".
L'Etat, qui "se décharge sur des organismes sans moyens", dit-on à la mairie de Fourques (Gard), une des communes inondées, est de manière générale montré du doigt. "Il faut que l'on ait les moyens nécessaires pour un problème qui n'est pas ponctuel mais saisonnier", a souligné Michel Vauzelle (PS), président de la région PACA. Le président du conseil général du Gard, Damien Alary (PS), a demandé "un grand emprunt pour faire de grands travaux et refaire les berges et les digues".
Dans les communes sinistrées, tant en Arles qu'à Fourques, on réclame "un gestionnaire unique" des ouvrages de protection contre les crues.
Deux syndicats se partagent la gestion des digues du petit Rhône et du grand Rhône, dans deux régions différentes, PACA et Languedoc-Roussillon, avec des financements, notamment de l'Etat, différents, alors que "le delta est un tout", soulignent les spécialistes.
D'un côté, le syndicat intercommunal des digues du Rhône, dans le Gard, regroupe onze communes, gère 50 km de digues, de l'autre, le syndicat mixte d'aménagement gère 180 km de digues du Rhône et de la mer (Symadrem) entre Arles, Port-St Louis-du-Rhône et les Saintes-Maries-de-la-Mer. Les deux trouveraient "logique de n'avoir qu'un seul interlocuteur".
Depuis sa création en 1998, le Symadrem a refait une vingtaine de kilomètres de digues avec de l'argile compactée pour les rendre plus stables, plus étanches, plus accessibles. Mais cette mission de confortement et de nettoyage de la végétation revient au bas mot à 2 millions d'euros les 10 km, explique-t-on à la mairie de Fourques (2 500 habitants), dont le maire, Gilles Dumas, également président du syndicat intercommunal gardois, estime qu'il n'a "ni la capacité structurelle", avec ses trois employés, ni la capacité financière pour assumer un gigantesque programme de confortement des digues".
Les responsables sont d'autant plus inquiets que, pour l'heure, leur seule mission est de remettre à leur niveau de 1885 les digues qui s'affaissent sous l'effet du tassement des sols. Mais, affirment-ils, la fréquence des crues "centenales" oblige à envisager de réhausser les digues de façon coordonnée. "Il faudra se préoccuper de la hauteur de l'autre rive, sinon le Rhône se déversera du côté le plus bas. Il suffit de 50 cm plus bas pour que l'ensemble de l'ouvrage soit en danger", soulignent-ils.
Autre préoccupation, les brèches apparues sous un remblai de chemin de fer de 15 km entre Tarascon et Arles appartenant à Réseau Ferré de France. Le problème n'est pas purement technique. Si certains conviennent que le métier de la SNCF n'est pas de conforter des digues, ils soulignent au passage que "personne ne gère ce morceau de digue et, pour cela aussi, il y a un problème institutionnel", souligne Romain Fater, directeur du syndicat intercommunal gardois.
L'urbanisation est aussi en cause. "Il faut savoir ce que l'on protège", s'insurge M. Fater. "On a construit là ou il restait des terrains constructibles, les zones inondables sont devenues des zones urbaines et, paradoxalement, la Camargue est devenue étanche".<scri
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