Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 12 décembre 2022
Budget

Le gouvernement retire les « contrats de confiance » du projet de loi de finances

Le gouvernement a utilisé une nouvelle fois l'article 49-3 pour faire passer la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2023, hier. Il a choisi de ne pas rétablir l'obligation faite aux plus grandes collectivités de limiter la hausse de leurs dépenses de fonctionnement.

Par Franck Lemarc

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© Ass. nationale

Est-ce le clap de fin pour les « contrats de confiance » ? Alors que la Première ministre, devant le Congrès des maires, avait émis l’idée de conserver le principe de la contractualisation, mais en supprimant toute sanction, c’est finalement le dispositif tout entier qui a été sorti du projet de loi de finances. Mais il reste encore possible de le faire figurer dans le projet de loi de programmation des finances publiques. Explications.

Les associations d’élus vent debout

C’est la suite d’un épisode qui a débuté fin septembre, avec la présentation du projet de loi de finances pour 2023. À la stupéfaction des associations d’élus, le gouvernement ressortait de son chapeau des contrats ressemblant furieusement aux Contrats de Cahors de triste mémoire : le principe étant de demander aux grandes collectivités de limiter la hausse de leurs dépenses de fonctionnement à un demi-point en-dessous de l’inflation. C’est-à-dire, autrement dit, de les diminuer. En pleine période d’explosion des tarifs de l’énergie et des prix en général, alors que l’État a imposé la hausse du point d’indice, alors que les taux d’intérêts repartent à la hausse – rappelons que le paiement des intérêts de la dette entre dans les dépenses de fonctionnement –, cette obligation nouvelle semblait lunaire.

D’autant qu’elle a été décidée sans le moindre début de concertation. Et qu’elle était assortie de sanctions, en cas de non-respect, nettement plus brutales que feu les Contrats de Cahors, puisqu’il était prévu que les collectivités récalcitrantes se voient privées de tout accès aux dotations de l’État. 

Ce dispositif de « participation des collectivités à l’effort de redressement des comptes publics »  a été très mal reçu par les associations d’élus, à commencer par l’AMF, qui n’a cessé de répéter que les collectivités, qui votent des budgets à l’équilibre, n’ont strictement aucune raison de « contribuer »  à combler un déficit dont elles ne sont pas responsables. 

Malgré l’opposition du Sénat et de plusieurs groupes d’opposition à l’Assemblée nationale, le gouvernement a essayé de tenir bon : lors du premier passage au 49-3 à l’Assemblée nationale, le 2 novembre, il a maintenu le contrats (lire Maire info du 3 novembre). 

En nouvelle lecture, au Sénat, l’article 40 quater, qui traitait de ces contrats, a été supprimé. En dernière lecture, à l’Assemblée, le groupe Renaissance prévoyait de le rétablir, sous la plume du rapporteur du texte, Jean-René Cazeneuve, qui avait prévu par amendement de remettre en place le dispositif. 

Le gouvernement ne l’a pas suivi, et dans la version proposée hier via le 49-3, l’article 40 quater a bien disparu. 

Mais cela ne signifie pas forcément que le dispositif ait complètement disparu : il est toujours en discussion dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques. Celui-ci sera débattu, en commission mixte paritaire, jeudi prochain, le 15 novembre. Le gouvernement obtiendra-t-il le principe d’une « trajectoire budgétaire »  pour les collectivités, sans sanction ? ou le dispositif sera-t-il là aussi supprimé, face à l’opposition d’une grande partie des sénateurs et de l’opposition à l’Assemblée ? Rendez-vous le 15 décembre pour le savoir.

Amortisseur : en attendant le décret

Cette deuxième partie du PLF pour 2023 comprend également, à l’article 42 ter, les modalités générales de « l’amortisseur électricité »  qui sera mis en place dès le 1er janvier 2023. Mais sans grandes précisions supplémentaires, puisque l’essentiel de ces modalités sera défini par décret. Il est désormais indiqué dans le texte que les agents du fisc peuvent délivrer aux fournisseurs d’accès les informations dont ils disposent pour vérifier qu’un client est bien éligible à l’amortisseur électricité. S’il s’avère qu’un client a perçu l’aide prévue de façon indue (et délibérément), il devra rembourser le montant de l’aide, majorée d’une pénalité de 20 %. 

Rappelons que l’amortisseur électricité, qui bénéficiera à toutes les collectivités, consiste à la prise en charge par l’État de la moitié de la différence entre le prix payé par le client par mégawattheure et un prix de référence, qui ne figure pas dans la loi mais sera fixé par décret. Selon les informations données par le gouvernement, le dispositif prendra effet à partir de 180 euros par MWh, mais sera plafonné à partir de 500 €/MWh. 

Il faut donc maintenant attendre, après la promulgation du PLF, les décrets d’application de ce dispositif. 

Communes nouvelles : dispositifs prolongés

Bonnes nouvelles également du côté des communes nouvelles. Le gouvernement a répondu aux demandes de l’AMF, qui souhaitait que des mesures soient prises pour ne plus voir les communes nouvelles pénalisées financièrement. Deux articles du PLF concernent celles-ci, les articles 45 bis B et 45 ter. 

Le 45 bis B dispose qu’à titre exceptionnel, en 2023, le « pacte de stabilité »  pour les communes nouvelles soit prolongé d’un an pour celles qui ont été créées à compter du 2 janvier 2017. Il stabilise également et pour un an la DSR des communes nouvelles créées avant cette date. Ce dispositif prolongé d’un an doit « permettre une concertation avec les parlementaires en 2023, après évaluation des communes nouvelles, pour donner davantage de lisibilité aux communes concernées ». 

L’article 45 ter prévoit, lui, que les communes nouvelles créées à partir du 2 janvier 2022 puissent bénéficier d’une garantie dans l’attribution de la dotation particulière élu local (DPEL). Elles se voient garantir, jusqu’aux prochaines élections municipales, « une attribution au moins égale à la somme des attributions perçues au titre de chacune de ces parts par les anciennes communes l’année précédant la création de la commune nouvelle. » 

CPF :  quid des agents publics ?

En matière de fonction publique territoriale, les élus retiendront que l’article 40 octies A a supprimé l’article 621-9 du Code général de la fonction publique, qui faisait du 1er mai un jour « férié et chômé »  pour les agents publics. Cette disposition est entrée en vigueur le 1er mars dernier et elle signifiait que les agents travaillant ce jour-là devaient être payés double, et non plus seulement toucher une majoration comme pour tout autre jour férié. Attention, cet article de suppression ne prendra effet qu’au 1er janvier prochain. Donc, les agents qui ont travaillé le 1er mai 2022 doivent vraisemblablement être payés double, pour une seule année. 

Signalons enfin que le gouvernement a introduit dans cette ultime version du PLF un discret amendement qui vise à faire financer par les salariés une partie de leur CPF (compte personnel de formation). Dans l’exposé des motifs, le gouvernement souligne que le CPF a coûté à l’État, depuis son ouverture en 2019, 6,7 milliards d’euros. Il est donc prévu « d’instaurer une participation du titulaire », dont les modalités seront fixées par décret. 

L’amendement modifie le Code du travail, et concerne donc les salariés du privés. Mais il est à craindre que la mesure soit, à terme, automatiquement transposée aux agents de la fonction publique. Reste à savoir quand. 

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