Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du vendredi 14 février 2025
Budget

Budget : le Conseil constitutionnel juge « conformes à la Constitution » les mesures qui frappent les collectivités

Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision, hier, sur le budget pour 2025. Les différentes dispositions du texte sont jugées conformes à la Constitution dans leur immense majorité, notamment celles qui touchent les finances locales.

Par Franck Lemarc

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© D.R.

C’était la dernière étape d’un interminable processus qui a débuté au Parlement en octobre dernier. Après cinq mois de rebondissements, le projet de budget pour 2025 a été adopté par le Parlement après application de l’article 49.3. Il ne restait plus qu’à le faire valider par le Conseil constitutionnel. C’est chose faite depuis hier, et plus rien ne s’oppose à la promulgation de ce texte par le président de la République : dans les tout prochains jours, le projet de loi, devenu loi de finances, paraîtra au Journal officiel et le pays aura enfin un budget. 

L’opposition avait saisi les Sages pour contester le caractère constitutionnel de nombreuses dispositions, sur le fond comme sur la forme. Pour résumer la décision qui a été rendue hier, on peut dire que sur le fond, les Sages n’ont admis aucun des arguments de l’opposition, et ont jugé toutes les dispositions du texte conforme à la Constitution. Sur la forme en revanche, une dizaine d’articles du texte (sur environ 200) ont été jugés contraires à la Constitution, non pas du fait de leur contenu mais parce qu’ils constituent des « cavaliers législatifs », c’est-à-dire qu’ils n’ont pas leur place dans une loi de finance. 

Le « Dilico », conforme à la Constitution

Les dispositions les plus importantes pour les collectivités n’ont pas été retoquées par les Sages, malgré les tentatives de l’opposition. C’est le cas, notamment, du fameux « Dilico »  (dispositif de lissage conjoncturel), qui prévoit d’opérer une ponction sur les recettes de plus de 2 000 collectivités pour un montant d’un milliard d’euros (500 millions pour les communes et leurs intercommunalités, 220 millions pour les départements et 280 millions pour les régions). Cette ponction constituera un fonds de réserve pour le budget de l’État, et les collectivités ponctionnées se verront reverser 90 % de cette « contribution »  par tiers, sur trois ans. Les 10 % restant seront versés à divers fonds de péréquation.

L’opposition a estimé que cette mesure réduit les ressources des collectivités à tel point que cela constitue une atteinte à la libre administration. Les Sages ne l’ont pas entendu de cette oreille : il a relevé que le prélèvement ne pouvait dépasser 2 % des recettes réelles de fonctionnement et que les sommes prélevées seraient reversées aux collectivités. Dans ces conditions, ces dispositions ne sont pas contraires « aux principes de libre administration et d’autonomie financière des collectivités territoriales ». On notera au passage que le Conseil constitutionnel relève que ces principes sont, au demeurant, « inopérants »  pour les EPCI. 

Autre point très important pour les collectivités : le gel de la fraction de TVA qui leur est dû – gel qui va leur coûter 1,2 milliard d’euros. Même argument de l’opposition : ces dispositions sont contraires à la libre administration des collectivités. Et même réponse des Sages : la minoration des recettes qui va découler de cette mesure ne représente « qu’environ 0,35 % du total des ressources propres »  des collectivités, ce qui n’est pas d’une ampleur suffisante pour « entraver la libre administration ». 

Notons enfin que les Sages n’ont pas non plus censuré le très décrié article 32 de la loi, qui diminue le chiffre d’affaires en dessous duquel s’applique la franchise de TVA. En passant ce plancher à 25 000 euros par an, certaines activités exercées par les collectivités, comme la location de salles par exemple, vont devenir éligibles à la TVA. Le Conseil constitutionnel n’a pas vu de problème dans ces dispositions, rappelant qu’il appartient bien au législateur de fixer les règles en matière d’impôts et de taxes, et que ces dispositions ne constituent aucunement une rupture du principe d’égalité. 

Dix « cavaliers » 

En revanche, 10 articles ont été retoqués en tant que cavaliers législatifs. Dans ce cas, rappelons-le, les Sages ne se prononcent pas sur le fond, c’est-à-dire sur le fait de savoir si ces dispositions contreviennent à un principe constitutionnel, mais les rejettent parce qu’elles n’ont pas leur place dans un texte de loi spécifique. Le périmètre d’une loi de finances est très précisément fixé par la Constitution et la Lolf (loi organique relative aux lois de finances), et tout ce qui n'entre pas dans ce périmètre est directement censuré. 

Parmi les 10 articles censurés, plusieurs concernent les collectivités. 

C’est le cas de l’article 155, qui permettait aux EPCI de reverser aux communes membres la totalité du Fonds de national de garantie individuelle des ressources communales et intercommunales, ainsi que le montant de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle. Même punition pour l’article 174, qui « modifie les modalités de cession de certains contrats d’achat d’électricité détenus par les entreprises locales de distribution », et pour les articles 179, 180 et 181, relatifs aux conditions de réunion, d’information et de consultation des commissions consultatives départementales sur la DETR. L’article 181, notamment, diminuait de 100 000 à 50 000 euros le montant de la subvention DETR à partir duquel la commission devait être saisie. 

Lourde facture

On le voit, ces quelques articles censurés ne vont pas changer grand-chose à la tonalité générale de ce budget, qui, même après avoir été quelque peu adouci par rapport à la version « Barnier », va coûter fort cher aux collectivités locales. Si le gouvernement s’en tient à sa version, selon laquelle ce seraient « seulement »  2,2 milliards d’euros qui seraient enlevés aux collectivités – ce qui est déjà considérable –, le Comité des finances locales présidé par André Laignel considère que la facture est en réalité beaucoup plus lourde. Le gouvernement, pour aboutir aux 2,2 milliards, ne retient en effet que le Dilico (un milliard d’euros) et le gel de l’augmentation de la fraction de TVA (1,2 milliard). Mais en ajoutant à cela la très forte augmentation des cotisations CNRACL (qui ne figurent pas dans la loi de finances mais ont été décidées par décret), la baisse du Fonds vert, le gel des dotations d’équipement, etc., le CFL aboutit à une facture qui dépasserait, en réalité, les 7 milliards d’euros. 

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