Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 4 décembre 2020
Budget de l'état

PLF 2021 : le Sénat modifie les modalités d'attribution de plusieurs dotations et satisfait à plusieurs demandes des maires

Les sénateurs ont décidé de réformer la procédure d'octroi de la DETR et de rendre éligibles à la Dsil les investissements touristiques. Ils ont également soutenu la création de 40 cités éducatives supplémentaires et débloqué 150 millions d'euros à destination des actions de santé et d'accès aux soins dans les quartiers. Celles-ci ont, toutefois, peu de chance d'intégrer le texte final, le gouvernement y ayant donné un avis défavorable.

Les sénateurs ont adopté, cette semaine, les missions « Cohésion des territoires »  et « Relations avec les collectivités »  dans le cadre de l’examen, en première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2021. L’occasion pour eux de revenir sur ces relations entre l'État et les collectivités territoriales en 2020 et 2021, deux années qui sont « très particulières », a rappelé le rapporteur de la commission des finances Charles Guené (LR), jugeant que « l'effet ciseaux causé par la crise nécessite une compensation, qu'il faudra approfondir ». 

Le « cauchemar »  de la nationalisation des ressources

« Le problème de la compensation des pertes de recettes tarifaires n'est toujours pas résolu », a également estimé son homologue Claude Raynal (PS), soulignant au passage que « les effets de bord dus à la suppression de la taxe d'habitation n'ont pas encore été tous identifiés »  et pourraient entraîner « des surprises ». 
De son côté, la sénatrice d'Ille-et-Vilaine, Françoise Gatel (Union centriste), a fait part de son « impression d'être schizophrène ». Si elle a « salué l'effort du gouvernement en direction des collectivités territoriales, après une période de purge financière », en revanche elle « cauchemarde devant la nationalisation des ressources ». « Sans nouvelle gouvernance du système, il deviendra difficile de parler encore de libre administration des collectivités territoriales », a enchéri Charles Guené. 
« Surprise d'entendre que l'augmentation des crédits d'investissement serait un signe du retour de l'État jacobin »,  la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, Jacqueline Gourault, a défendu la ligne d’un « renforcement des moyens des collectivités territoriales, qui percevront 1,2 milliard d'euros de concours supplémentaires »  et rappelé que « depuis mars, l'État a mobilisé plus de 7,8 milliards d'euros au profit des collectivités territoriales, sous la forme de compensations, d'investissements ou d'avances ».

« On peut toujours dire que cela n'est pas suffisant (...), mais ce budget n'est pas la fin de l'histoire. Le gouvernement continuera à suivre attentivement l'évolution des finances locales, notamment en 2021 », a-t-elle assuré avant qu’une série d’amendements ne soient adoptés contre son avis.

Dsil : les investissements touristiques éligibles

La chambre haute a ainsi voté une modification de la répartition de la dotation de soutien à l’investissement local (Dsil) en incluant les investissements touristiques dans les catégories d’opérations éligibles sans en augmenter l'enveloppe. « Permettre aux collectivités territoriales de bénéficier de la Dsil pour tout projet de « développement de l’attractivité »  peut favoriser un renouvellement de l’offre touristique », ont estimé les sénateurs dans l’exposé des motifs de l’amendement concerné : « Ceci permettra également d’adapter le secteur aux enjeux sanitaires actuels, et de soutenir ces collectivités sur des investissements spécifiques qu’elles n’auraient pas pu réaliser avec des budgets fortement grevés par la perte de leurs recettes issues de l’activité touristique. » 

DETR plus favorable aux communes les moins peuplées

Ils ont également souhaité modifier la répartition de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) afin de favoriser les communes les moins peuplées et d’éviter, par exemple, « qu’une commune de 1 900 habitants à faible potentiel financier (puisse) percevoir le même montant qu’une commune de 300 habitants à potentiel financier plus élevé », comme c’est le cas actuellement. Pour y parvenir, « 25 % de la DETR seraient déterminés par la population et 25 % par le potentiel financier par habitant, à la manière de ce qui est actuellement le cas pour la DETR des EPCI ». 
« Opaque »  et « insatisfaisante »  pour ce qui est du pouvoir de la commission des élus, la procédure d’octroi de la DETR doit également être réformée, aux yeux des sénateurs. Ils proposent par un second amendement notamment de « rendre obligatoire la communication de l’ensemble des dossiers déposés à la commission », de « contraindre le préfet à respecter les catégories prioritaires d’opérations à financer fixées par la commission »  ou encore que celui-ci « rende compte de ses choix et des critères retenus pour sélectionner ou rejeter les demandes de subvention ». Enfin, l’amendement adopté prévoirait que « le règlement départemental ne puisse pas prévoir de critères excluant une commune autres que ceux prévus par la loi ».

Petites communes : nouveau seuil pour les projets d'investissement

Dans la foulée, ils ont également décidé, à titre temporaire jusqu’au 31 décembre 2021, d’abaisser le seuil de participation des communes de moins de 2 000 habitants aux projets d’investissements à 10 %. Selon eux, « cela permettra à ces communes rurales de participer à la relance de l’économie plus facilement et d’accompagner l’activité des entreprises locales ».

Plus de libertés pour la solidarité communautaire

Un assouplissement des règles de répartition de la dotation de solidarité communautaire (DSC) entre les communes a également été validé. Son objectif est de donner « plus de libertés »  aux élus locaux dans la répartition des enveloppes et permettre d’éviter de nombreux contentieux liés à la complexité de la réforme de la DSC. Inscrite dans le PLF pour 2020, celle-ci serait, « dans la majorité des cas, incompatible avec les DSC versées auparavant par les intercommunalités à leurs communes membres ».

Politique de la ville : 10 millions d’euros pour la dotation

Concernant la politique de la ville, la chambre haute a décidé d’augmenter de 10 millions d'euros la dotation politique de la ville (DPV) afin de « lutter contre l’aggravation de la disparité des territoires dans le traitement de la gestion de crise ». Alors que les communes éligibles à la DPV ont été élargies, le montant de la dotation n’a pas été renforcé, ont rappelé les sénateurs pour qui, « cela a pour effet de mettre en difficulté les communes les plus précaires ».

40 cités éducatives supplémentaires

Ils ont également choisi de créer 40 cités éducatives supplémentaires alors que 40 nouvelles sont déjà prévues par le PLF 2021 (et que 80 cités éducatives ont été créées à la rentrée 2019). « C’est une forte demande des maires signataires de l’appel du 14 novembre qui témoignent de leur efficacité pour la mobilisation autour de l’école, la fidélisation des enseignants dans les quartiers autour du projet éducatif et la réduction du décrochage scolaire », expliquent les auteurs de l’amendement. Ceux-ci font état que, « en 2020, [les cités éducatives] ont notamment joué un rôle clef, là où elles existaient, pour lutter contre les conséquences scolaires de la crise sanitaire et le décrochage qui s’en est suivi ».

Quartiers : 15 millions d’euros pour les maisons de santé

Autre demande forte des maires ayant signé l’appel du 14 novembre, l’augmentation des moyens alloués aux actions de santé et d’accès aux soins dans les quartiers. Ceux-ci « pointaient la surinfection et la surmortalité liées au covid-19 dans les quartiers populaires », rappellent les sénateurs qui ont accordé une hausse de ces moyens de « 150 % », à hauteur de 15 millions d’euros. L’objectif d’Emmanuel Macron de doubler le nombre de maisons et de centres de santé d’ici 2022 n’est « pas en passe d’être atteint », justifient les sénateurs qui ont déposé l’amendement concerné.

Sport : un fonds de 10 millions d’euros

En parallèle, ils ont également augmenté de 10 millions d’euros les crédits du programme « politique de la ville »  pour la mise en œuvre d’un fonds de solidarité en faveur des acteurs sportifs des quartiers prioritaires de la politique de la ville. « Les associations sportives et les structures qui agissent au quotidien se sentent aujourd'hui démunies et abandonnées par l'Etat, face à la multitude de missions auxquelles elles font face », ont rappelé les sénateurs alors que 80 maires et élus ont demandé, mercredi, à la ministre des Sports, l'application du plan Borloo. « Ce fonds, qui a vocation a être renouvelé chaque année, pourra par la suite être alimenté par d'autres acteurs, privés comme publics, et sa gestion pourra être déléguée à l'Agence nationale du sport », précisent-ils.
A noter qu’ils ont également accordé la possibilité de reconduire en 2021 de la prime d’aménagement du territoire.

A.W.

Consulter le PLF pour 2021.

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2