Budget 2024 : les principales mesures à retenir
Par A.W.
On pourra retenir de ce projet de loi de finances (PLF) pour 2024 qu’il aura été adopté, définitivement et de manière expéditive, au beau milieu du débat hystérisé qui entoure le projet de loi Immigration depuis quelques jours. Juste après la houleuse séance de questions au gouvernement consacrée au sujet et juste avant la lecture de l’accord trouvé in extremis en commission mixte paritaire. Afin de clore ce nouvel exercice budgétaire, la Première ministre a ainsi activé, une ultime fois, mardi, l’article « 49.3 » de la Constitution.
Ultime « 49.3 »
Quelques heures plus tôt, celui-ci avait été rejeté par les sénateurs en nouvelle lecture, avant même d’être examiné, ces derniers dénonçant un « mépris pour [leur] travail », malgré les 120 amendements sénatoriaux repris par l’exécutif dans son texte final.
« Le Parlement a été piétiné tout au long de la procédure », lançait hier encore le rapporteur général du budget au Sénat, Jean-François Husson (LR), lors des questions au gouvernement, déplorant un recours à l’arme constitutionnelle « non pas pour mettre un terme au débat, mais pour empêcher tout débat ».
Sous les vives protestations des députés, Elisabeth Borne a, elle, assuré avoir « tendu la main aux oppositions et tenté de trouver des points d’accord », en se disant contrainte de dégainer une nouvelle fois le « 49.3 » dans le but de « donner des moyens inédits à notre sécurité, […] pour permettre des investissements sans précédent dans la transition écologique, pour augmenter le salaire des enseignants [et] pour accroître la DGF de nos communes ».
« Pas de maintien du PTZ [sur tout le territoire], pas de fonds d’urgence climatique pour les collectivités, pas de prise en compte des demandes du Sénat sur les dotations [et] pas un centime des quotas carbone ne sera mis au service des autorités organisatrices de la mobilité en province. […] Les quelques accords trouvés sont des écrans de fumée », a fustigé Jean-François Husson, lors de l’examen du PLF à la « chambre des territoires ».
Le texte ne sera, toutefois, considéré comme définitivement adopté que si l’ultime motion de censure visant ce texte est rejetée. Ce qui a toujours été le cas jusqu’à présent et reste plus que probable. Le président de la commission des finances Eric Coquerel (LFI), qui défendra cette motion de censure déposée par son groupe (mais aussi par les socialistes, les communistes et les écologistes), a dit sa « satisfaction dans cette période sombre » que sa commission ait « rejeté massivement le PLF 2024 lors de son examen final », juste avant le « 49.3 ».
Logement : la niche fiscale « Airbnb » supprimée, le PTZ recentré
En pleine crise du logement, plusieurs mesures ont été retenues par l’exécutif, dont une « à l’insu de son plein gré », ont ironisé plusieurs parlementaires. L’article du Sénat supprimant la niche fiscale bénéficiant aux meublés de tourisme a, en effet, été conservé par « erreur » par le gouvernement.
Jugé trop avantageux et responsable de la pénurie de logements pour les habitants locaux dans certaines parties du pays, le régime fiscal des locations de meublés de tourisme sera donc aligné sur celui des « locations nues » avec l’application d’un abattement de 30 % (contre 71 % actuellement) dans la limite de 15 000 euros de recettes. Un régime dérogatoire est, toutefois, prévu dans les zones rurales avec un taux d’abattement de 51 %.
Souhaitant revenir sur cette « erreur », le gouvernement a expliqué que l'article serait « modifié à l'occasion d'un prochain vecteur législatif au plus tard dans le budget 2025 », la disposition n'ayant « pas vocation à s'appliquer dans l'intervalle ».
S’agissant du prêt à taux zéro (PTZ), l'exécutif a décidé de le recentrer sur les seuls « logements neufs en collectif » dans les zones tendues ou sur « les logements anciens sous conditions de rénovation » en zone détendue. Il sera, toutefois, désormais ouvert à 6 millions de Français grâce à l’élargissement « aux classes moyennes et à 200 villes supplémentaires »
A noter que, sur les logements sociaux, il a prévu 40 millions d'euros de plus pour leur rénovation énergétique, par un redéploiement de crédits.
Climat : généralisation des budgets verts
La disposition n’était pas dans le texte initial, mais a été ajoutée durant les débats par le camp présidentiel : les « budgets verts » seront généralisés aux « collectivités, groupements de collectivités, ou établissements publics locaux » de plus de 3 500 habitants, à compter de l’exercice budgétaire 2024.
Alors que la création d’un « Fonds territorial climat » de 200 millions d’euros proposée par les sénateurs (et directement répartis entre les EPCI ayant adopté un Plan climat air énergie territorial (PCAET), à raison de 4 euros par habitant) semblait proche de voir le jour, celle-ci a finalement été écartée de la version du PLF retenue par l’exécutif.
En définitive, l’exécutif pourrait « très prochainement annoncer qu'il réserve une enveloppe de 250 millions d'euros pour aider les intercommunalités » qui serait, toutefois, réservée « au sein du Fonds vert ». Un fonds « à la main des préfets » et qui « ne permet pas aux territoires de suffisamment se projeter », ont reproché les sénateurs durant les débats.
A noter que les régions Hauts-de-France et Bretagne vont bénéficier d'un fonds de soutien exceptionnel, à la suite des intempéries qu’elles ont subies.
Ruralité : les ZRR refondues
A compter du 1er juillet prochain, les zones de revitalisation rurale (ZRR) vont se transformer en France ruralité revitalisation (FRR). Il s’agira de la fusion des ex-ZRR et de deux autres dispositifs, les BER (bassins d’emplois à revitaliser) et des Zorcomir (zones de revitalisation des commerces en milieu rural).
Durant les débats, cette réforme a évolué sur plusieurs points avec un assouplissement des critères financiers permettant de « faire entrer 4 000 communes de plus que prévu » dans le dispositif qui devrait désormais concerner environ 17 600 communes et l’ajout au classement, notamment, des communes de moins de 20 000 habitants appartenant à un EPCI dont au moins la moitié de la population est située en zone de montagne, sous réserve de critères financiers.
Finances : DGF, DPEL, communes nouvelles…
S’agissant des finances, la DGF sera finalement augmentée de 320 millions d’euros par rapport à 2023, comme l’avait annoncé la Première ministre lors du congrès des maires, fin novembre. Mais ni la « chambre des territoires » ni le gouvernement n’a souhaité l’indexer sur l’inflation, au dam des associations d’élus qui réclament une telle mesure. On peut, cependant, constater que cette hausse sera, l'an prochain pour le bloc communal, assez proche de l'indexation (+ 2,3% de l’enveloppe pour une inflation 2024 prévue à +2,6 %).
Comme le rappelait le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, plusieurs autres « avancées » votés notamment par les sénateurs sont à retenir. Parmi lesquelles, « la contemporanéisation des versements de TVA aux collectivités, à leur demande, l’extension et l’augmentation de la dotation garantie pour les communes nouvelles, […] l’attribution de la dotation particulière relative aux conditions d’exercice des mandats locaux (DPEL) sans critère de potentiel financier, le renforcement de l’assouplissement des règles de lien, notamment entre la taxe d’habitation sur les résidences secondaires et la taxe foncière, à la demande des élus, ou encore la mise en place du fonds de sauvegarde pour les départements en difficulté, faisant face à une baisse de leurs ressources, en particulier les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ».
Pêle-mêle, on peut également rappeler que le gouvernement avait prévu une augmentation de la dotation pour les titres sécurisés (DTS), le report à 2025 du fonds de soutien au développement des activités périscolaires (FSDAP) ou encore le maintien de l’amortisseur « électricité » recentré sur les collectivités qui ont signé des contrats signés au plus mauvais moment et qui « sont coincées avec des prix exorbitants ».
Consulter le texte sur lequel le gouvernement a engagé sa responsabilité.
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