Budget 2024 : la généralisation des budgets verts pour les collectivités confirmée, après l'activation du « 49.3 » sur la partie « dépenses »
Par A.W.
Comme le camp présidentiel l’avait laissé entendre, la Première ministre n’a pas attendu, hier soir, la fin de l’examen des articles de la partie « dépenses » et l’ensemble du projet de loi de finances (PLF) pour 2024 pour engager, en première lecture, la responsabilité de son gouvernement en activant une nouvelle fois le « 49.3 ».
Déclenchée au cours des débats consacrés aux crédits de la défense, peu avant minuit, l'arme constitutionnelle lui permet de faire adopter le texte, sans vote, tout en intégrant et écartant les amendements de son choix. En retour, les députés de La France insoumise ont déposé, dans la foulée, une motion de censure dont les chances d’aboutir restent toujours bien minces.
« Cure d’austérité » contre « incurie budgétaire »
Dans un échange d’argumentaires désormais bien éprouvé – il s'agit du cinquième 49.3 d’Élisabeth Borne depuis la reprise des travaux parlementaires en septembre et du 16e depuis son arrivée à Matignon – , la Première ministre a expliqué ne pas pouvoir « priver la France de budget (et) nos concitoyens de services publics », d’autant qu’« aucun groupe d’opposition ne semble vouloir sortir de sa position de principe : rejeter le budget quoi qu’il contienne ».
« Nous le pouvons d'autant moins que nous savons bien qu'il n'existe aucune majorité alternative capable de s'entendre autour d'un budget », a justifié Élisabeth Borne devant l'hémicycle.
Défendant une « trajectoire budgétaire soutenable », celle-ci a reproché le « rythme particulièrement lent » de la discussion budgétaire et un « texte dénaturé » par « des milliards d’euros de dépenses qui ont été ajoutés » la veille, à l’occasion de la discussion des crédits des territoires d’outre-mer. Le député Renaissance du Gers Jean-René Cazeneuve a enchéri, sur X, en déplorant « l’incurie budgétaire de nos oppositions » dont les amendements en commission « portaient 500 milliards d’euros de dépenses supplémentaires ».
« D'un revers de main, le gouvernement bafoue une nouvelle fois la démocratie et les nombreuses victoires votées comme le recrutement de 4 000 AESH et l’ouverture de 10 000 places d’hébergement », a répondu, également sur l'ancien Twitter, la cheffe de file des députés Insoumis, Mathilde Panot, dont la motion dénonce la « cure d’austérité » instaurée dans ce budget et, notamment, les « 16 milliards d’euros d’économie par la sous-dotation structurelle de nos collectivités territoriales, de nos écoles, de nos hôpitaux, alors que nos services publics sont étranglés par l’inflation et au bord de la rupture ».
Budgets verts, outre-mer, festivals...
Si le texte sur lequel le gouvernement a engagé sa responsabilité n’était pas encore publié ce matin (et dont les détails restent donc toujours inconnus), la Première ministre en a dévoilé une partie du contenu après avoir sélectionné « des amendements de la majorité comme des oppositions ».
Parmi les dispositions pouvant intéresser les maires, Élisabeth Borne a annoncé avoir retenu des mesures qui vont permettre « d’instaurer un budget vert pour les collectivités », « des investissements supplémentaires dans les outre-mer, notamment dans les infrastructures du quotidien pour l’emploi ou pour la rénovation des réseaux d’eau » (« 27 amendements » ont été conservés selon Jean-René Cazeneuve), mais aussi « d’accentuer la lutte contre le harcèlement scolaire ».
S’agissant des budgets verts, ceux-ci devraient être rendus obligatoires pour les collectivités de plus de 3 500 habitants à compter de l’exercice budgétaire 2024. C’est en tout cas ce que prévoyait l’amendement de Jean-René Cazeneuve adopté la semaine passée en commission, et qui reprenait celui déposé initialement par David Valence (RE) mais finalement retiré.
Alors qu’un « nombre croissant de collectivités sont engagées dans une démarche similaire », l'objectif serait d’« harmoniser » cette démarche en mettant en place un cadre législatif. Il était également prévu, via un second amendement, de permettre à ces collectivités – celles « de plus de 3 500 habitants qui le souhaitent » – d’identifier et d’isoler, dans un compte séparé, la part de leur endettement consacré à financer leurs investissements liés à la transition écologique.
Concernant les territoires ultramarins, on peut rappeler que le gouvernement a fait abonder, lors de l’examen en séance lundi, de 40 millions d'euros (en autorisations d'engagement et 8 millions d’euros en crédits de paiement) le fonds exceptionnel d'investissement (FEI), qui finance les investissements des collectivités territoriales d’outre-mer, dans le but notamment d'améliorer les réseaux d'eau et d'assainissement ultramarins, mais aussi le traitement des déchets, la lutte contre les sargasses et les rénovations d’écoles. L’exécutif l'avait également augmenté de 10 millions d’euros supplémentaires dans le but « d’accroître les moyens dédiés aux investissements indispensables pour l’eau et l’assainissement à Mayotte ».
À retenir aussi, le déblocage de « 2 millions d’euros supplémentaires » pour soutenir les festivals et les territoires qui les accueillent, a annoncé Jean-René Cazeneuve.
Agents contractuels : des années comptabilisées pour la retraite
Quelques autres amendements consensuels approuvés lors de la discussion devraient se retrouver dans le texte final. Parmi eux, quelque 146 millions d'euros en faveur de la sécurité civile, pour lutter notamment contre les feux de forêts, mais aussi une mesure prévoyant 30 millions d'euros pour les « brigades anti-harcèlement » à l'école. Tout comme la décision de fixer l’extinction du fonds de soutien aux activités périscolaires (FSDAP) au 1er septembre 2025.
Reste que l'un des sujets les plus sensibles du moment, le logement, « n'a même pas été discutée en séance », s'est indigné l'Insoumis Éric Coquerel, président de la commission des finances, alors même que la question reste une « bombe sociale ». De la même manière, les crédits consacrés aux collectivités n’ont pas été débattus.
À noter, par ailleurs, que le gouvernement a décidé de « mieux prendre en compte », au titre de la retraite, la pénibilité à laquelle sont exposés les agents contractuels de la fonction publique. Une mesure qui a été intégrée à la version « 49.3 » du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024, définitivement adopté ce week-end après le rejet d'une motion de censure.
L’amendement retenu prévoit ainsi que « les périodes effectuées sur des emplois actifs ou super-actifs comme agents contractuels seront, lorsque les agents concernés seront titularisés, prises en compte dans la limite de 10 ans pour le décompte de la condition de durée en services actifs (17 ans) ou super actifs (27 ans en général) à remplir pour bénéficier d’un droit au départ anticipé ». Aujourd’hui, un fonctionnaire qui a commencé sa carrière en tant que contractuel sur des fonctions équivalentes à celles d’un agent titulaire relevant de la catégorie active ne peut en effet pas les valoriser au moment de son départ à la retraite.
Le probable rejet de la motion de censure visant l'ensemble du projet de budget 2024 entraînera la transmission de ce dernier Sénat, où il est attendu à partir du 23 novembre dans l'hémicycle.
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