PLF 2021 : les députés adoptent le « budget de relance » en première lecture
Confrontée à de nombreuses incertitudes économiques en pleine crise sanitaire, l'Assemblée nationale a adopté, hier, en première lecture le projet de loi de finances (PLF) pour 2021 qui contient le plan de relance de 100 milliards d'euros. Son examen au Sénat débutera à partir de demain.
Ce PLF a été soutenu par 355 voix contre 202, lors du vote solennel qui s’est déroulé hier en fin d'après-midi, l’adoption définitive par le Parlement devant avoir lieu avant la fin décembre.
Budget « caduc »
Le député des Vosges, Christophe Naegelen (UDI), a ainsi critiqué un projet de budget devenu « littéralement caduc » puisque « les prévisions financières qui le sous-tendent sont désormais anachroniques ». « En voulant allier, de manière inédite, urgence et relance, (celui-ci) a perdu une partie de sa substance et de sa lisibilité », a-t-il estimé alors que l'Insee vient d'annoncer que la rechute du PIB au dernier trimestre 2020 pourrait être de 2,5 % à 6 %, selon la durée du reconfinement.
Le ministre chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt, a assuré qu’il veillerait, « tout au long des prochaines semaines, à ce que les hypothèses sur lesquelles nous travaillons et qui figurent dans le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale soient actualisées, afin que les textes que vous aurez à voter à la fin du mois de décembre soient construits sur des hypothèses plausibles et, évidemment, identiques d’un texte à l’autre ».
Impôts de production, jour de carence et relance écologique
Alors que la députée de Seine-et-Marne Patricia Lemoine (Agir ensemble) a jugé que « le gouvernement a rapidement mis en place des mesures de soutien massives à destination des acteurs économiques, des collectivités territoriales et des publics les plus fragiles », c’est la baisse de 10 milliards des impôts dits de production des entreprises qui a une nouvelle fois concentré les critiques des oppositions, notamment de gauche. Celles-ci ont dénoncé une « politique de l'offre » favorable aux « grandes entreprises » et aux « géants d’internet » ainsi que l'absence de toute « contrepartie écologique ou sociale », bien qu’un amendement demandant aux entreprises de plus de 50 salariés d'améliorer leur « performance » en matière « écologique, de parité et de gouvernance » ait été adopté. Un « gadget » pour l’opposition (lire également Maire info du 13 octobre).
« Nous baissons les impôts de production pour alléger la fiscalité des entreprises, poids sous lequel les TPE et PME courbent l’échine, et qui grève leur capacité à innover et à créer les emplois de demain », a justifié le député LaREM des Français établis hors de France Alexandre Holroyd. « Vous prévoyez 6,6 milliards de baisse d’impôts pour les 9 200 plus grosses entreprises et ETI, mais seulement 3,4 milliards d’euros pour les 560 000 petites et moyennes entreprises », a fustigé le député du Nord, Fabien Roussel (PCF), qui a enjoint le gouvernement à « aider les collectivités, plutôt que de les priver de recettes fiscales » car « ce sont elles qui recherchent des solutions pour couvrir les loyers des PME et des commerçants, pour compenser leurs pertes de recettes malgré l’argent public mis sur la table ».
La députée socialiste du Tarn-et-Garonne, Valérie Rabault, a d’ailleurs repris les conclusions du rapport publié lundi par l’Institut des politiques publiques selon lesquelles « les entreprises qui ont le plus pâti de la crise ne bénéficieront pas particulièrement du plan de relance », contrairement à l’industrie et aux grandes entreprises. Elle a également pointé les « engagements non tenus » du gouvernement sur le jour de carence : « Le 15 septembre dernier, la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques a déclaré (...) qu’il serait suspendu à nouveau si l’état d’urgence sanitaire reprenait. Or, l’état d’urgence sanitaire a repris », sans que le jour de carence ne soit pour autant supprimé (lire Maire info du 16 novembre).
De son côté, le député de la Marne, Charles de Courson (Libertés et territoires), a regretté que « le dispositif de soutien à la construction ne soit pas à la hauteur », constatant que « la relance écologique se fait sans les collectivités territoriales ». Aujourd’hui, celles-ci « portent 52 % de l’investissement lié à la transition écologique dans des secteurs aussi structurants que les transports en commun, la gestion des déchets ou le traitement de l’eau potable... Comment, dans ces conditions, pouvez-vous créer la confiance alors même que les incertitudes liées aux ressources des collectivités locales, et surtout à la chute de leur auto-financement, sont majeures ? », a-t-il demandé.
DMTO : le « filet de sécurité » adapté aux petites communes
Alors qu’aucun « filet de sécurité » n’est pour l’heure prévu dans le budget 2021, comme c’est le cas en 2020 pour les pertes de recettes des communes et des intercommunalités (lire Maire info des 2 et 12 novembre), le gouvernement vient d’annoncer qu’un amendement serait déposé lors de l’examen du PLF pour 2021 au Sénat afin que « les modalités de reversement des DMTO spécifiques pour les petites communes ne les pénalisent pas ». En effet, les communes de moins de 5 000 habitants qui ne sont pas classées station de tourisme perçoivent cette recette avec un décalage d’un an, ont rappelé les trois ministres Jacqueline Gourault (cohésion des territoires), Olivier Dussopt (comptes publics) et Joël Giraud (ruralité), dans un communiqué publié hier.
L’objectif est ainsi « d’étendre le « filet de sécurité » aux recettes de DMTO reversées aux communes par les conseils départementaux en 2021 afin que celles-ci ne soient pas inférieures à l’enveloppe moyenne distribuée entre 2018 et 2020 ». Le montant de cette nouvelle garantie est estimé pour l’instant par le gouvernement « entre 15 millions d’euros et 50 millions d’euros ». Deux tiers des communes qui en bénéficieraient seraient des communes de moins de 1500 habitants.
A noter à ce sujet que le quatrième projet de budget rectificatif (PLFR 4) pour 2020, qui intègre la compensation des pertes de recettes fiscales et domaniales prévue par l’Etat pour le bloc communal en 2020 (actualisée et finalement évaluée à environ 250 millions d’euros), devait être examiné, hier soir, en commission mixte paritaire.
DETR, taxe de séjour, ZRR…
Durant l’examen en séance, les députés ont voté un grand nombre d’amendements intéressant les collectivités. Ils ont ainsi réduit fortement, à partir de 2022, la fraction de TVA dévolue aux départements, aux intercommunalités et à la Ville de Paris pour le calcul de la compensation du foncier bâti transféré aux communes, d’un côté, et de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales, de l’autre (lire Maire info du 21 octobre).
Ils ont également prolongé jusqu’en 2022 les zones de revitalisation rurale, les zones franches urbaines ainsi que cinq autres dispositifs zonés de soutien aux territoires en difficulté (lire Maire info du 9 novembre), mais aussi le prêt à taux zéro et le dispositif Pinel (lire Maire info du 17 novembre) et ils ont décidé d’accorder des dérogations aux collectivités sur les projets de rénovation énergétique de leurs bâtiments afin de faciliter leurs mises en œuvre (lire Maire info du 27 octobre).
Par ailleurs, ils ont décidé, en fin de semaine dernière, de recentrer la DETR sur les territoires ruraux, de réajuster les prélèvements sur la dotation d’intercommunalité, d’autoriser les collectivités à augmenter la taxe de séjour pour les hébergements touristiques non classés, mais également de prolonger jusqu'en 2021 le fonds de stabilisation et de l’élargir à une cinquantaine de départements et de collectivités à statut particulier. Ils ont également reporté d’un an le calendrier de l’expérimentation du compte financier unique (CFU) et de deux mois, au 1er décembre 2020, la date limite des délibérations permettant aux collectivités et aux EPCI d’instaurer des exonérations de TFPB, de CFE et de CVAE dans les zones de revitalisation des centres-villes et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (lire Maire info du 13 novembre).
A.W.
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