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Édition du jeudi 17 octobre 2024
Budget de l'état

Budget 2025 : les députés réclament des précisions sur le « fonds de précaution », cet « objet étrange » ponctionné sur les recettes des collectivités

Réunie hier pour débuter l'examen du projet de budget, la commission des finances a réclamé, d'emblée, au gouvernement un éclairage sur ce mécanisme d'auto-assurance encore flou qui vise à prélever, dès l'an prochain, 3 milliards d'euros sur les recettes des plus grosses collectivités.

Par A.W.

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Les députés font face à un « OFNI », « un objet financier non identifié ». Et le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, Charles de Courson (Liot), compte bien percer les zones d’ombre qui entourent toujours le très décrié « fonds de précaution ». Un « objet un peu étrange »  que le gouvernement souhaite créer dès 2025 en prélèvant 3 milliards d’euros sur les recettes des quelque 450 plus importantes collectivités.

Et il n’aura pas fallu longtemps pour que ce futur dispositif d’auto-assurance se retrouve au cœur des débats des députés. Même brièvement.

« Qu’est-ce que c’est que ce prélèvement ? » 

Réunie hier soir pour entamer l’examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, la commission des finances de l’Assemblée a, dès le début de la discussion, adopté un amendement visant à éclaircir les contours de ce « fonds de précaution », dont le nom même reste encore incertain (il est parfois aussi appelé, dans les documents officiels, « fonds de résilience des finances locales »  ou « fonds de réserve au profit des collectivités territoriales » ).

Porté par le député de la Marne, cet amendement – « un peu technique, mais qui va passionner les passionnés de finances publiques »  – vise donc à obtenir du gouvernement des « précisions »  sur la « nature juridique »  de ce prélèvement afin de savoir à quelles recettes fait référence l’exécutif lorsqu’il en parle.

Si le PLF indique bien que ce prélèvement est « effectué sur le montant des impositions versées aux communes, aux EPCI à fiscalité propre, aux départements et aux régions », Charles de Courson s’interroge, dans l’exposé des motifs de son amendement : « S’agit-il d’une imposition de toute nature ? ».

Car « c’est quand même un objet financier non identifié, un OFNI », a ironisé le rapporteur général, en commission, qui souhaite donc comprendre : « Qu’est-ce que c’est que ce prélèvement ? ». 

Sans « dynamique des recettes », cela n’a « pas de sens » 

Rappelant avoir déjà « travaillé sur cette affaire »  par le passé, le député macroniste de l’Oise, Éric Woerth, avait étudié la possibilité de « créer un fonds de réserve lorsqu’il y a une dynamique des impositions qui est forte et l’écrêter pour éviter les effets de cycle, comme c’est le cas, par exemple, avec les DMTO ».

« Le gouvernement présente quelque chose d’un peu différent », a souligné l’ancien président de la commission des Finances de l'Assemblée, sous l’étiquette LR à l’époque. « J’aurais tendance à considérer que c’est sous le coup de l’urgence, mais il faudrait retrouver un chemin un tout petit peu différent d’ici l’année prochaine ou dans deux ans avec la création d’une forme d’auto-assurance des collectivités fondée sur la dynamique de la fiscalité pour essayer de contrebalancer d’autres périodes moins propices », a fait valoir Eric Woerth.

Soutenant ce raisonnement, Charles de Courson a estimé que « cela aurait un sens s’il y avait une dynamique des recettes, mais ce n’est pas le cas ». Et « c’est pour cela que c’est un objet un peu étrange », a assuré le rapporteur général du budget qui voit, par ailleurs, dans ce prélèvement, « une sorte de punition collective qui touchera [les collectivités] qui sont bien gérées comme les autres »  et préférerait qu’on leur « fiche la paix » 

En 2026, le fonds alimentera notamment le Fpic

Pour rappel, cette ponction de 3 milliards est le premier étage du plan de 5 milliards d’euros de prélèvements voulu par le gouvernement sur les recettes des collectivités (complété par un gel de la TVA et l’amputation du FCTVA). Celle-ci impacterait environ 450 des plus grosses d’entre elles (celles « dont les dépenses de fonctionnement sont supérieures à 40 millions d’euros » ) et serait alimentée par un prélèvement plafonné à « un maximum de 2 % »  de leurs recettes de fonctionnement lorsqu’est « constaté le dépassement d’un solde de référence ».

Ce système « d'auto-assurance »  devrait ainsi permettre la mise en réserve du fonds en 2025 afin d’en restituer, dans une seconde étape, l’épargne aux collectivités à partir de 2026, dont les règles de répartition seront définies après « consultation »  du Comité des finances locales (CFL).

La ministre du Partenariat avec les collectivités, Catherine Vautrin, a d’ailleurs confirmé, mardi, devant les députés, que cette épargne alimentera « les trois principaux fonds de péréquation »  des collectivités. Comme l’indique le PLF, elle sera ainsi répartie « entre les trois instruments nationaux de péréquation horizontale du bloc communal (fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le Fpic), des départements (fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux perçus par les départements) et des régions (fonds de solidarité régionale) ».

Et le CFL pourra « chaque année majorer ou minorer cet abondement dans la limite de 10 %, la différence étant régularisée l’année suivante ». 

Afin d'exclure les collectivités les plus fragiles de ce prélèvement, l'ancienne présidente du grand Reims a également indiqué que l'exécutif a « regardé les collectivités bénéficiaires de la dotation de solidarité urbaine (DSU) »  et celles qui sont « bénéficiaires du Fpic ». « Le but de la manoeuvre était d'éviter que ces collectivités ne soient concernées »  par la ponction, a expliqué la ministre, en soulignant que la version actuelle du PLF a encore « vocation à évoluer ».

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