Budget 2024 : les députés débutent l'examen en séance, avant l'activation du « 49.3 »
Par A.W.
Les députés ont entamé, hier, l’examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2024 dans l’hémicycle. Après le rejet de la partie consacrée aux recettes par la commission des finances la semaine dernière, le texte ne devrait pas traîner très longtemps, en séance, puisque l’exécutif n’a pas fait mystère de son désir d’activer le « 49.3 » assez rapidement. Notamment à la suite de la tournure des débats en commission et de l’adoption d’une série d’amendements qui l'ont contrarié.
Si bien que les quelque 5 000 amendements déposés ne devraient, pour la plupart, pas être examinés.
Généralisation des « budgets verts »
Dans ce contexte, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, a accusé les oppositions, dès l’ouverture des débats, de demander « plus de dépenses publiques, plus de dette, plus de taxes » en « imaginant un monde où tout est gratuit ». « Des amendements dépensiers, il en pleut comme à Gravelotte », a-t-il dénoncé en ciblant les quelque 1 500 amendements des députés LR, les « inventions baroques » de ceux du RN ou encore le « déluge fiscal » de LFI, tout en vantant sa politique de maîtrise des comptes publics.
De son côté, le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, a réfuté l’idée selon laquelle le gouvernement ferait « porter l’effort sur les collectivités », rappelant la « hausse » de DGF de 220 millions d’euros, « l’extension » du fonds de compensation de la TVA aux dépenses d’aménagement ou encore la « pérennisation » du Fonds vert. Afin d’« accélérer le verdissement des dépenses publiques », il a proposé « la généralisation aux opérateurs et aux grandes collectivités » des « budgets verts », « notre boussole commune ».
Echouant à faire adopter une motion de rejet préalable du texte, la députée insoumise Charlotte Leduc (Moselle) a fustigé « le bal des chapelets de 49.3 à venir », un « usage autoritaire de la Constitution », s'alarmant de « l'austérité mortifère », de la « précarité » et de « la crise climatique ». Rappelant que « un Français sur six ne mange pas à sa faim », elle a pointé « la responsabilité immense du gouvernement dans cette situation ».
A droite, la députée LR Véronique Louwagie a réclamé à l'inverse une « réduction des dépenses publiques », en suggérant une baisse de 6 milliards d'euros du montant de l'indemnisation du chômage.
Des « convergences » sur les collectivités et le logement
Malgré les tensions, Thomas Cazenave a dit retenir « d’ores et déjà de nombreux […] points de convergence ».
Outre le soutien au pouvoir d’achat des Français notamment, le ministre perçoit des convergences pour « donner de nouvelles libertés aux collectivités afin qu’elles puissent faire face en cas de difficultés ou de besoins d’investissement » (avec l’assouplissement des règles de lien pour la THRS proposé par le groupe Horizons), mais aussi à travers l’exonération de la redevance sur la consommation d'eau potable pour la population de Mayotte (portée par le groupe Liot) qui doit permettre de « soutenir les territoires d’outre-mer ».
Il voit également, dans la proposition du groupe communiste visant à « exonérer de taxe d'habitation sur les résidences secondaires les fondations et associations reconnues d’utilité publique » un autre point d’accord, tout comme dans la « réponse rapide » à apporter à la crise du logement « en accélérant la libération du foncier » (avec « un abattement exceptionnel et temporaire pour les plus-values immobilières foncières » porté par le groupe du MoDem). Des initiatives que le ministre va « soutenir » et qui « vont enrichir le texte ».
Afin de contenir cette crise du logement, annoncée comme « une bombe sociale » par nombre d’élus, le gouvernement a notamment déposé un amendement réduisant de 71 % à 50 % l'abattement sur les revenus des meublés touristiques (type Airbnb), leur fiscalité étant jugée bien trop favorable en comparaison de celle des locations de longue durée et accusée d’entraîner une réduction de l’offre de logements pour les habitants. Un abattement supplémentaire de 21 % serait toutefois attribué dans « les territoires en déficit d’offre touristique, non concernés par la problématique d’attrition des résidences principales ».
Alors que le sujet a déjà été très débattu en commission, cette mesure semble insuffisante pour certains députés. Le MoDem, par la voix de Mohamed Laqhila, a d’ailleurs annoncé, lors de l’ouverture des débats, qu’il souhaitait « enrichir le texte pour qu’il puisse constituer une première réponse efficace à la crise du logement ».
Vers une nouvelle dotation pour les communes nouvelles ?
En commission toujours, les oppositions, mais aussi des députés MoDem et Renaissance, avaient empêcher le gouvernement de recentrer dans les « zones tendues » le dispositif du prêt à taux zéro, tout en préservant son prolongement jusqu’en 2027.
Là aussi, un amendement du gouvernement a été déposé alors que Bruno Le Maire a fait savoir sur RTL, ce matin, que le PTZ serait « élargi aux classes moyennes et à 200 villes supplémentaires » (lire article ci-dessous).
Deux autres amendements de l'exécutif devraient intéresser les collectivités. Le premier propose de transformer des exonérations facultatives de TFPB en exonérations de droit, « tout en laissant la faculté aux collectivités concernées de les limiter ou de les supprimer ». Le second permettrait de créer une dotation dédiée aux communes nouvelles, distincte de la DGF et financée par un prélèvement sur les recettes de l’État. L'objectif étant « d’engager un nouveau mouvement de création de communes nouvelles ».
A noter également que, s’agissant de la taxation des plus-values de cession de terrains nus rendus constructibles par une décision d’urbanisme, un amendement de Jean-Marc Zulesi (Renaissance) prévoit de créer une nouvelle taxe nationale obligatoire en remplacement des deux taxes actuelles dont « l’objet est identique ou proche » et induit « une complexité inutile et coûteuse ». Soutenu par l’AMF, celle-ci espère qu'il sera adopté dans la version 49.3 du PLF 2024.
Reste que le « 49.3 » du gouvernement est attendu aujourd’hui à l'Assemblée nationale de manière « probable » voire « très probable », selon des sources parlementaires et ministérielles auprès de l'AFP. L’objectif est de faire adopter sans vote le texte et en lui permettant d'écarter ou de conserver les amendements de son choix. On peut donc imaginer que le gouvernement intégrera ces amendements dit de « convergences » dans le texte adopté.
La Première ministre s'exposera, toutefois, dans les jours à venir à des motions de censure, mais dont les chances de succès restent faibles.
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