Budget 2025 : les sénateurs veulent atténuer les efforts demandés aux collectivités
Par A.W.
Après le rejet du budget remanié par l'Assemblée nationale, la veille, le Sénat a déjà pris le relais en s’attelant à l'examen de la partie « recettes » du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 dont l’avenir se jouera vraisemblablement, pour l’essentiel, au Palais du Luxembourg.
L’exécutif misant désormais sur une adoption du budget grâce à la commission mixte paritaire (CMP) - où les partis qui le soutiennent dans la coalition gouvernementale devraient être en mesure d’y avoir la majorité - , la chambre des territoires va avoir un rôle prépondérant dans la mise en oeuvre du texte final. Et les collectivités pourraient tirer leur épingle du jeu alors que le gouvernement prévoit notamment de ponctionner leurs recettes à hauteur de 5 milliards d’euros (via la création d’un fonds de précaution, le rabotage de la TVA et l’amputation du FCTVA).
L'amputation du FCTVA en sursis
Parmi les « quatre grands axes d’amélioration » du texte souhaités par la commission des finances, la participation des collectivités à l’effort de redressement des comptes publics figure ainsi en bonne place, a expliqué, hier, le rapporteur général du budget, Jean-François Husson (ex-LR) lors d’une conférence de presse.
Alors que le pays est « entré dans un état d’urgence budgétaire », ce dernier a insisté sur le fait qu’il ne « souhaite pas exonérer les collectivités » de l’effort collectif – qu’il estime « nécessaire » de leur part – , mais « pas à cette hauteur » de 5 milliards d’euros car elles « ne sont pas à l’origine du déficit ».
C’est pourquoi « les modalités de contribution des collectivités devront être justes et défendables », selon lui. Parmi la trentaine d’amendements qu’elle a adoptés hier matin, la commission a ainsi décidé de s’opposer à la réduction du taux et au recentrage du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) qui permettrait une économie de 800 millions d’euros.
Les sénateurs estiment en effet que ce dispositif présente « des inconvénients majeurs, qui (le) rendent inacceptable » en frappant, d’abord, « rétroactivement les collectivités » puisqu’il porte « à 85 % sur des investissements engagés en 2023 et 2024 ». En outre, il « réduit leurs capacités d’investissement et pèse plus lourdement sur les petites collectivités », a déploré Jean-François Husson, en précisant, dans son amendement, que ces effets « mettraient en difficulté des petites communes, qui ont besoin de stabilité des règles budgétaires et peuvent difficilement s’ajuster à de tels revirements ».
Bien qu’adoptée en commission, cette suppression des sénateurs reste encore symbolique et devra à nouveau être votée en séance, lors des débats dans l’hémicycle, pour intégrer le texte sénatorial. Mais celle-ci a de bonnes chances de figurer dans le texte final puisque, pour rallier les sénateurs à sa cause et avoir une CMP conclusive, Michel Barnier aurait déjà laissé entendre qu’il serait prêt à revenir sur cette économie de 800 millions d’euros sur le FCTVA.
Le fonds de précaution retravaillé « avec le gouvernement »
En revanche, s’agissant de la stabilisation des fractions de TVA affectées aux collectivités qui leur coûterait 1,2 milliard d’euros, la chambre des territoires ne semble pas prête à l’amender puisque le rapporteur du budget a jugé cette mesure « défendable ». « Ça n’est certes pas une mesure favorable aux collectivités mais elle se contente de créer une année blanche de hausse de ces fractions », a-t-il fait valoir.
Autre « question structurante » qui hérisse les collectivités : la ponction de 3 milliards d’euros sur les recettes des 450 plus importantes collectivités afin de créer un « fonds de précaution ».
Si le sujet sera examiné plus tard, lors de la discussion de la partie « dépenses » du PLF 2025, Jean-François Husson a fait savoir qu’il désirait que « le Sénat arrive à proposer un dispositif acceptable et raisonnable, qui ne pénalise pas les collectivités fragiles, en particulier les départements, et qui puisse même leur bénéficier ».
Car ce dispositif « n’est pas particulièrement bien imaginé ni bien construit », à ses yeux. Pour cette raison, il dit travailler « avec le gouvernement » sur un dispositif qui permettrait de « ne pas casser la dynamique d’investissement des collectivités qui réalisent à peu près 70 % de l’investissement public ».
FRR, prix de l'éléctricité, formation des enseignants...
La commission des finances a adopté un autre amendement intéressant les collectivités visant à « régler les cas de distorsions fiscales territoriales que la nouvelle cartographie » des zones France ruralités revitalisation (FRR) peut générer.
Elle a ainsi proposé la possibilité dérogatoire de classement en FRR d’une commune membre d’un EPCI qui remplit l’un des deux critères de classement (de densité de population et de revenu disponible). « Cette mesure serait d’une ampleur très limitée, du fait du plafonnement du nombre de communes concernées à 0,5 % au maximum du nombre de communes dans chaque région, mais est de nature à répondre à de réelles difficultés remontées du terrain », indique l’amendement du rapporteur.
Comme les députés lors des débats, les sénateurs s'opposent aussi à la hausse envisagée de la taxe sur les prix de l'électricité, pour « protéger le pouvoir d'achat ». Cette proposition, qui devait rapporter 3,4 milliards d'euros, pourrait faire l'objet d'une « clause de rendez-vous » dans les prochains mois pour moduler cette taxe et rester dans l'objectif d'une baisse globale de 9 % des tarifs réglementés au 1er février pour la plupart des Français, comme l'a annoncé mardi le Premier ministre, Michel Barnier. En revanche, le Sénat propose de relever la taxe sur le gaz, avec un milliard d'euros de recettes espérées.
Il a, par ailleurs, validé « 4 milliards d’euros d’économies en plus », selon Jean-François Husson. Ces nouvelles économies ciblent de « nombreux et divers » postes, la Haute assemblée ayant voté la réduction d'un milliard d'euros de crédits non consommés sur la formation des enseignants, le resserrement du budget de l'Aide médicale d'Etat (AME) ou encore la suppression du service national universel (SNU) et le ciblage d’« un certain nombre d’opérateurs de l’Etat qui disposent de trésoreries confortables ».
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