Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mardi 5 décembre 2023
Budget de l'état

Budget 2024 : la création d'un « fonds territorial climat » de 200 millions d'euros enfin proche de voir le jour

Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a assuré qu'il tenterait, « dans les jours qui viennent », de concilier les différents « points de vue » afin de faire aboutir la proposition sénatoriale transpartisane visant à instaurer un fonds permettant de financer les PCAET. Des rallonges pour le ferroviaire, les routes et les ponts ont par ailleurs été votées, sans l'aval de l'exécutif.

Par A.W.

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Les sénateurs ont adopté, hier, une mesure qui pourrait redonner aux collectivités « la liberté de mener leur politique environnementale ». Une mesure très attendue qui pourrait surtout, cette fois, se maintenir dans le texte final du projet de loi de finances (PLF) pour 2024 au regard de l’intérêt que lui a porté l’exécutif. 

Dans le cadre de l’examen des crédits consacrés à l’écologie et aux mobilités durables, en première lecture, le Sénat et le gouvernement ont ainsi laissé entrevoir un début de compromis dans le but de créer, à « titre expérimental », un nouveau « fonds territorial climat ». Destiné aux collectivités territoriales, il leur permettrait de « disposer des moyens de mener leur politique de transition écologique et énergétique ». 

Un fonds « à la main »  des collectivités

Contrairement au Fonds vert, « à la main des préfets », qui « ne permet pas aux territoires de suffisamment se projeter », les financements du « fonds territorial climat »  seraient « directement répartis entre les EPCI ayant adopté un Plan climat air énergie territorial (PCAET), à raison de 4 euros par habitant », expliquent les sénateurs dans un « amendement transpartisan »  qui doterait cette nouvelle ressource de 200 millions d’euros.

« Ce dispositif fonctionnerait de la même manière que la taxe de séjour : les collectivités devraient prouver au moment du vote de leur compte administratif que les sommes perçues ont bien servi à financer les mesures prévues dans le PCAET », a précisé la sénatrice des Hauts-de-Seine Christine Lavarde (LR), qui a estimé que « ce système est plus simple que le recours au Fonds vert et permettrait à chaque collectivité d'agir selon son calendrier et ses priorités ».

« Avec le fonds climat territorial, redonnons aux collectivités territoriales la liberté de mener leur politique environnementale », a lancé le sénateur centriste du Doubs, Jean-François Longeot, alors que Ronan Dantec, sénateur écologiste de Loire-Atlantique, a assuré au gouvernement que « ce sont les territoires qui savent »  quelles actions sont « les plus efficaces ». Pour lui, « il faut que les moyens redescendent ». 

Et ce dernier de préciser qu’il « ne s'agit pas de ramener l'intégralité du Fonds vert vers les intercommunalités, mais de faire entrer les projets dans une cohérence territoriale, dans un plan, afin de les rendre plus efficaces ». « Peut-être devrait-on ajouter dans la contractualisation une aide aux communes pour le montage de leurs projets ? », s’est-il interrogé.

Reconnaissant « plusieurs intérêts »  à cette mesure, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a décidé de se ranger à l’avis du Sénat et annoncé que, « dans les jours à venir, nous pourrons sans doute trouver une convergence entre nos points de vue, d'une manière satisfaisante pour tout le monde ». « L'idée est de s'assurer, derrière le caractère alléchant de la mesure, que nous ne susciterons pas d'espoirs déçus. Nous avons besoin de fixer des règles, même si, effectivement, elles doivent être les plus simples possible », a-t-il souligné.

Si la démarche devait aboutir, ce serait une excellente nouvelle pour les collectivités. Rappelons que l'AMF plaide depuis des années pour la création d'un tel fonds permettant de financer les PCAET, qui sont une compétence obligatoire, créée par la loi, mais sans accompagnement financier. À plusieurs reprises, ces dernières années, notamment en 2016, 2017 et 2019, les sénateurs ont tenté d'introduire dans les projets de loi de finances une « dotation climat »  destinée à financer les PCAET. Mais à chaque fois, les gouvernements successifs ont réussi à convaincre les députés de retirer cette disposition. Si le gouvernement devait cette fois donner son accord, cela représenterait un changement majeur – même si l'on est loin, en l'espèce, des 10 euros par habitant demandés par l'AMF et les sénateurs les années passées. 

Une autre disposition pour laquelle le gouvernement a suivi l’avis du Sénat : la mise en place de « commissions consultatives composées d’élus »  pour le Fonds vert. Celles-ci seraient érigées « sur le modèle de celles pour la DETR »  et permettraient « d’améliorer la gouvernance de ce fonds en impliquant davantage les élus ». Une demande là aussi de l’AMF pour laquelle les modalités d’attribution du Fonds vert manquent de transparence.

Soutenu par les sénateurs, le gouvernement a de son côté fait adopter un amendement permettant d’étendre le bénéfice du chèque énergie aux habitants des HLM. Il ouvre ainsi son usage pour « le paiement des charges locatives dans les logements locatifs sociaux ».

Soutiens au ferroviaire, aux routes et aux ponts

En parallèle, la « chambre des territoires »  a voté plusieurs rallonges budgétaires destinées à soutenir le ferroviaire, les routes et les ponts qui, elles, risquent de ne pas survivre à la navette parlementaire, l’exécutif s’y étant opposé.

Les sénateurs ont ainsi décidé de débloquer 100 millions d’euros à la modernisation du réseau ferroviaire et 30 millions d’euros supplémentaires afin de soutenir le développement du fret ferroviaire. 

En outre, une enveloppe de 5 millions d'euros a été votée pour accompagner la mise en œuvre des dispositifs de coordination entre autorités organisatrices de la mobilité (AOM) « prévus par la LOM », la loi d'orientation des mobilités.

Ils ont également débloqué 30 millions d'euros pour les ponts du réseau routier national non concédé et 20 millions d'euros pour l'entretien des routes nationales non concédées. 

Par ailleurs, 20 millions d'euros ont été prévus pour étendre le dispositif de « leasing social » . Ce dispositif, qui sera lancé en 2024, doit faciliter la location de longue durée de véhicules électriques pour les ménages modestes. Alors que « les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) doivent être déployées dans une quarantaine d’agglomérations d’ici à 2025, il apparaît nécessaire de favoriser un accès plus large »  à ce dispositif, explique le sénateur socialiste de la Gironde, Hervé Gillé, dans son amendement. 

Électricité : un chèque énergie ciblé sur les plus modestes

Autre point de divergence avec l’exécutif, la « chambre des territoires »  a, enfin, décidé de substituer au « bouclier tarifaire »  voulu par le gouvernement un « chèque énergie ». Ce nouveau dispositif, « plus ciblé », permettrait d’aider les ménages à faire face à l'augmentation du prix de l'électricité, mais ne concernerait plus que les 60 % des plus modestes, soit 18 millions de ménages, contrairement au mécanisme voulu par le gouvernement qui est généralisé.

Il apportera aux foyers éligibles « une aide permettant de contenir à un niveau inférieur à 10 % la hausse de leurs charges résultant de leur consommation d’électricité », explique Christine Lavarde, dans son amendement, ajoutant que « le montant de l’aide sera même renforcé pour les ménages les plus modestes et pour les familles nombreuses ». Ainsi, « un ménage dont le revenu fiscal de référence par unité de consommation est inférieur à 5 700 euros et qui se compose de quatre personnes disposera d’une aide exceptionnelle de 200 euros »  tandis qu’un ménage « dont le revenu fiscal de référence par unité de consommation est de 11 000 euros, bénéficierait d’une aide de 140 euros », a illustré la sénatrice des Hauts-de-Seine.

« On soutient en priorité les plus modestes car ils sont prisonniers de la vie. Ceux-là, on va les aider plus et mieux que votre dispositif uniforme et aveugle », a fait valoir le rapporteur général du budget, Jean-François Husson (LR), qui estime à au moins 500 millions d'euros le montant des économies par rapport à la mesure gouvernementale.
 

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