Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 18 décembre 2023
Budget de l'état

Budget 2024 : après un nouveau « 49.3 », le « Fonds territorial climat » écarté par le gouvernement

Engageant une nouvelle fois la responsabilité de son gouvernement, la Première ministre a également rétabli le caractère obligatoire des budgets verts pour les collectivités et conservé le nouveau régime fiscal des meublés de tourisme voulu par les sénateurs.

Par Aurélien Wälti

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Après avoir réussi à écarter une nouvelle fois, samedi, l’adoption d’une motion de censure sur la partie « recettes »  du projet de loi de finances (PLF) pour 2024, la Première ministre a dégainé, dans la foulée et pour la 22e fois depuis son arrivée à Matignon, l'article 49.3 de la Constitution sur l'ensemble du texte, en nouvelle lecture à l'Assemblée.

Avec les mêmes arguments que pour la première partie du projet de budget : alors que « les délais constitutionnels se rappellent à nous » , Élisabeth Borne a assuré que « nous ne pouvons pas nous passer d’un budget » . Un budget « amendé et enrichi grâce au travail parlementaire, grâce à la majorité et aux oppositions, grâce à l’Assemblée nationale et au Sénat », « qui renforce nos services publics, notamment notre école »  et qui « porte les investissements en faveur de la transition écologique à hauteur de 40 milliards d’euros ».

Comme à son habitude, le groupe LFI a déposé une nouvelle motion de censure – dans laquelle il dénonce « un déni de démocratie »  et la « déconnexion (du gouvernement) avec l’urgence sociale »  –, avant un nouvel examen du texte par les sénateurs et sa probable adoption définitive grâce à une dernière utilisation, dans la semaine, de l’arme constitutionnelle par la Première ministre à l’Assemblée.

Plan climat : vers une enveloppe au sein du Fonds vert ?

Alors que la création d’un « Fonds territorial climat »  de 200 millions d’euros proposée par les sénateurs semblait proche de voir le jour, celle-ci a finalement été écartée de la version du PLF retenue par l’exécutif.

Ces dernières années, les sénateurs avaient tenté d'introduire dans les projets de loi de finances une « dotation climat »  destinée à financer les plans climat-air-énergie territorial (PCAET), mais les gouvernements successifs avaient réussi, à chaque fois, à convaincre les députés de retirer cette disposition. Pourtant, cette fois, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, avait assuré, lors de l’examen du texte au Sénat, qu'il tenterait, « dans les jours qui viennent » , de concilier les différents « points de vue »  afin de faire aboutir la proposition sénatoriale transpartisane visant à instaurer un fonds permettant de financer les PCAET.

Contrairement au Fonds vert, « à la main des préfets », qui « ne permet pas aux territoires de suffisamment se projeter » , les financements du « fonds territorial climat »  devaient être « directement répartis entre les EPCI ayant adopté un PCAET, à raison de 4 euros par habitant » , expliquaient les sénateurs afin de permettre aux « collectivités »  de « disposer des moyens de mener leur politique de transition écologique et énergétique ».

Reste que le gouvernement ne devrait pas évacuer totalement cette idée et pourrait même « très prochainement annoncer qu'il réserve une enveloppe de 250 millions d'euros pour aider les intercommunalités »  à mettre en œuvre ces plans, selon une information de La Gazette des communes. Une enveloppe qui serait, toutefois, réservée « au sein du Fonds vert ».

« De source parlementaire, ce sont bien les actions du PCAET qui seront ainsi financées, mais un lien sera fait avec le contrat de réussite de la transition écologique (CRTE), car c’est bien par l’intermédiaire de ce mode de contractualisation entre l’Etat et les intercommunalités que cette nouvelle manne financière sera distribuée » , détaille le journal.

A noter, par ailleurs, que le gouvernement a rétabli le caractère « obligatoire »  de la mise en place de budgets verts pour les collectivités de plus de 3 500 habitants, contrairement au souhait des sénateurs qui la voulaient facultative (car trop « prématurée » ). Il a également rétabli l’application du budget vert à compter du compte administratif (ou du compte financier unique) pour l’exercice 2024. 

Meublés touristiques : la niche fiscale supprimée... par « erreur » 

Une surprise majeure, toutefois, accompagne ce PLF : le gouvernement a conservé dans son texte la réduction de l’abattement fiscal sur les meublés de tourisme voté par les sénateurs… auquel il s’opposait pourtant. Une « erreur matérielle »  qu’il entend corriger, a reconnu une source gouvernementale, soulignant par ailleurs que les règles de procédure parlementaire « ne permettent pas de corriger la disposition immédiatement ». 

L'article entraîne une « modification substantielle de la fiscalité pour les propriétaires » , et « sera modifié à l'occasion d'un prochain vecteur législatif au plus tard dans le budget 2025 » , selon elle, avant d'assurer que « la disposition n'a pas vocation à s'appliquer dans l'intervalle » . L'abattement pourrait ainsi être revu lors d'un futur projet de loi de finances rectificative.

« C’est une belle nouvelle »  qui va permettre de « se doter d’un outil pour réguler les Airbnb », s’est pourtant félicité sur X (Twitter) le député communiste de Seine-Maritime, Sébastien Jumel, confirmant que « Bercy a laissé dans le budget l’amendement parlementaire qui règle son sort à la niche fiscale ». Une « grande victoire » , s’est aussi réjoui le sénateur LR des Pyrénées-Atlantiques Max Brisson, à l’origine de l’amendement. 

Jugé trop avantageux et responsable de la pénurie de logements pour les locaux dans certaines parties du pays, le régime fiscal des locations de meublés de tourisme sera, en l’état, aligné sur celui des « locations nues »  avec l’application d’un abattement de 30 % (contre 71 % actuellement) dans la limite de 15 000 euros de recettes. Un régime dérogatoire est prévu dans les zones rurales avec un taux d’abattement de 51 %. 

Si « les propositions [voulues par le gouvernement] vont dans le bon sens »   (un abattement de 50 % dans la limite de 77 700 euros et 71 % en zone rurale), elles restent « insuffisantes pour remettre sur le marché des logements qui seraient affectés à la résidence principale » , expliquait Max Brisson dans son amendement.

Pour rappel, les mesures visant la réforme des zones de revitalisation rurale et une hausse supplémentaire de 100 millions d'euros de la DGF ont également été retenues par le gouvernement dans son texte (lire Maire info du 15 décembre).

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