Édition du jeudi 15 septembre 2016
Annie Genevard : « Retrouver de la lisibilité montagne dans les politiques publiques »
© Maires de France
Quel regard portez-vous sur le texte présenté hier en Conseil des ministres ?
Nos préconisations ont été bien prises en compte, même si je pense que l’examen du texte au Parlement permettra de le compléter sur quelques points. Le projet de loi est assez précis sur la gouvernance de la montagne, sur le travail saisonnier… Globalement, nous y retrouvons l’esprit de notre rapport, dont le fil conducteur était de retrouver dans les politiques publiques la spécificité reconnue à la montagne – qui s’était un peu perdue depuis 1985, date de la première loi Montagne. Pendant ces années, les politiques publiques ont perdu de vue deux choses : les handicaps naturels liés à la montagne, le fait que chez nous, tout est plus compliqué, du fait de la pente, du climat, etc. Et par ailleurs, la prise en compte de ce que la montagne apporte à la Nation, ce que l’on appelle les aménités de la montagne. Cet acte II de la loi Montagne vise à retrouver de la lisibilité montagne dans les politiques publiques et à introduire l’idée d’une reconnaissance de la Nation à l’égard de la montagne.
Quels sont les sujets sur lesquels vous souhaiteriez voir le texte évoluer ?
Nous sommes en train de préparer un certain nombre d’amendements, par exemple sur l’agriculture, domaine dans lequel nous voulons aller un peu plus loin dans la prise en compte de la compensation du handicap dans l’activité économique. Nous voudrions aussi compléter la disposition prise sur les grands prédateurs par une autre sur les petits nuisibles. Il s’agit de prendre davantage en compte les préoccupations du quotidien des élus de montagne. Nous aurons sans doute également l’occasion d’approfondir la question des agences de l’eau.
Une revendication importante des élus de montagne semble satisfaite – celle qui concerne les offices du tourisme, qui pourraient rester communaux ?
Vous savez que cela a été l’un des points les plus débattus dans la loi Notre. L’AMF était favorable à ce que la compétence tourisme puisse rester communale si les communes le souhaitaient, et nous ne l’avons pas obtenu. Mais le projet de loi Montagne – comme le Premier ministre s’y était engagé lors du Conseil national de la montagne à Chambéry, l’an dernier – prévoit que les stations touristiques de montagne puissent déroger à la loi Notre sur ce point. Il y aura débat, sans doute, sur ce sujet, car nous souhaiterions aller plus loin : que ce ne soit pas seulement les communes classées stations de tourisme qui soient concernées, mais toutes les stations de montagne. Pour l’instant, le gouvernement n’y est pas favorable.
Comment se fait-il que la question du Fpic, que vous aviez désignée dans votre rapport comme un enjeu majeur, ne figure pas dans ce texte ? Vous disiez l’an dernier que les communes de montagne contribuaient au Fpic « de façon déraisonnable » …
Il est tout à fait normal que l’on ne trouve rien dans ce texte à ce sujet : c’est un projet de loi cadre, qui ne contient donc aucun élément budgétaire. La question du Fpic relève des lois de finances, et c’est à cette occasion que nous en reparlerons.
En revanche, je voudrais souligner deux points tout à fait inédits concernant ce texte. D’une part, le Premier ministre s’est engagé à ce que nous continuions de travailler ensemble – gouvernement, rapporteurs, élus de la montagne – dans une démarche de coproduction, sur le niveau infralégislatif, c’est-à-dire la mise en œuvre de la loi, la rédaction des décrets d’application. C’est une chose très originale.
Par ailleurs, il semble se dessiner qu’il y aura deux rapporteurs sur ce texte à l’Assemblée nationale, l’une appartenant à la majorité et l’autre à l’opposition. Cela n’arrive jamais, dans le cadre d’un projet de loi ! C’est une démarche très originale, tout à fait conforme à l’esprit de la montagne.
Propos recueillis par F.L.
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