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Édition du vendredi 6 juin 2025
Agriculture

Une proposition de loi définitivement adoptée pour lutter contre les vignes en friches

Après avoir été adoptée au mars dernier par les députés, la proposition de loi visant à prévenir le développement des vignes non cultivées a été hier aussi adoptée au Sénat. Les sanctions contre les détenteurs de vignes laissées en friches seront facilitées, et ce dès cet été.

Par Lucile Bonnin

« En raison de l'accentuation de la crise viticole dans notre pays, conjuguée à la problématique du renouvellement des générations, nous assistons assez tristement à l'augmentation généralisée des surfaces de vignes laissées à l'abandon », explique le sénateur Sébastien Pla, rapporteur de la proposition de loi pour prévenir le développement des vignes non cultivées.

En effet, de plus en plus de parcelles sont abandonnées dans les communes situées dans des régions viticoles. Selon les chiffres du ministère de l’Agriculture, les surfaces viticoles abandonnées varient de quelques ares en régions Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est et Centre-Val de Loire, à plusieurs centaines d'hectares en Auvergne-Rhône-Alpes, voire plusieurs milliers d'hectares en Nouvelle-Aquitaine, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d'Azur. « En Gironde, la profession évoque le chiffre de 2 000 hectares de vignes laissées à l'abandon, souligne Sébastien Pla. Dans le Beaujolais, la profession a identifié environ 700 parcelles, quand ce chiffre se monte à plus de 1 900 en Languedoc-Roussillon. » 

Or ces surfaces en friches menacent les parcelles viticoles voisines à plusieurs titres. D’abord, les friches sont aussi un accélérateur du risque incendie, surtout dans les régions du sud du pays. Ces friches ont également un impact visuel qui peut être préjudiciable pour le paysage et mettre à mal le secteur de l'œnotourisme. Enfin, surtout, l'augmentation des vignes abandonnées amplifient les risques sanitaires pour les autres vignerons : « ces parcelles sont un réservoir pour les maladies classiques comme le mildiou et l'oïdium, et singulièrement pour la flavescence dorée » , explique le rapporteur. 

Cette maladie de la vigne, qui peut être à l’origine de pertes très importantes dans les vignes, fait l'objet de prescriptions de lutte obligatoire : « Les préfets de région délimitent des périmètres à l'intérieur desquels des mesures de prospection, d'arrachage et d'application d'insecticides sont obligatoires. »  En ne se conformant pas aux obligations d'arrachage édictées dans le cadre de la lutte contre la flavescence dorée, les propriétaires des parcelles abandonnées laissent se créer des « foyers de contamination et de recontamination des parcelles adjacentes ».

Amende et pouvoir d’injonction 

Ces propriétaires encourent actuellement jusqu'à six mois d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende. Une peine totalement disproportionnée, selon les députés et les sénateurs qui ont adopté définitivement la proposition de loi hier. Cette peine n’est d’ailleurs que rarement appliquée car sa procédure est lourde et complexe. Ainsi l’effet dissuasif pour les propriétaires qui manquent à leur obligation est inopérant.

L'article unique de la proposition de loi propose donc « un dispositif à deux étages »  avec « la mise en place d'une infraction contraventionnelle, plus proportionnée à la nature de la faute - une amende de 1 500 euros et de 3 000 euros en cas de récidive »  ainsi qu’un « pouvoir d'injonction pour obliger le propriétaire à se conformer à ses obligations dans un délai imparti. Le non-respect de cette injonction demeure, en revanche, un délit, ce qui permet de maintenir une gradation des peines. » 

Le texte ayant été adopté hier à l’unanimité par les sénateurs après son adoption à l’Assemblée, ces mesures devraient être effectives dans quelques mois.

La question des biens sans maître

Les discussions qui ont pu être menées par les parlementaires autour de ce texte ont également été l’occasion d’aborder la question des biens sans maître (voir article Maires de France). C’est notamment le sénateur d'Indre-et-Loire, Vincent Louault, qui a abordé le sujet lors de l’examen du texte en commission des affaires économiques en mai dernier. 

Il a estimé que « dans le cas d'espèce, les sanctions peuvent être nécessaires »  mais que « pour les biens sans maître, par exemple, les amendes ne peuvent rien, puisque le propriétaire est perdu, ce qui entraîne déjà une perte d'impôts fonciers » . Il a par la suite invité les sénateurs à « promouvoir auprès des maires la récupération pour réserve foncière des biens sans maître ». « Pour l'avoir fait dans ma commune, je puis dire que cela marche vraiment bien ! », a-t-il lancé. Il prend l’exemple du maire de Saint-Nicolas-de-Bourgueil qui « s'est aperçu que leur nombre n'était pas négligeable. » « Restera la question du financement de l'arrachage, qui coûte un peu d'argent » , a cependant nuancé le sénateur.  

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