Maire-info
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Édition du mardi 1er avril 2025
Agriculture

La proposition de loi sur l'épandage par drone bientôt discutée au Sénat

Adoptée par l'Assemblée nationale le 27 janvier dernier, la proposition de loi qui vise à autoriser l'épandage par drone de pesticides sur certaines cultures va être discutée en séance publique au Sénat le 9 avril prochain. Le but : limiter l'exposition des agriculteurs à certains produits.

Par Lucile Bonnin

En Europe, la pulvérisation aérienne des produits phytopharmaceutiques est interdite mais peut être possible sous plusieurs conditions et notamment « l’absence de solution viable ou la présence d’avantages manifestes en faveur de la pulvérisation aérienne, du point de vue des incidences sur la santé humaine et l’environnement, par rapport à une application terrestre. » 

L’article 82 de la loi Egalim du 30 octobre 2018 a autorisé pour trois ans à titre expérimental l’utilisation des aéronefs télépilotés pour la pulvérisation aérienne de produits autorisés en agriculture biologique ou dans le cadre d’une exploitation faisant l’objet d’une certification du plus haut niveau d’exigence environnementale (HVE) sur des surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 %. 

Une proposition de loi pour autoriser définitivement l’épandage par drone de certains produits phytosanitaires sur les parcelles agricoles et portée par le député macroniste Jean-Luc Fugit a été adoptée en première lecture le lundi 27 janvier à l’Assemblée nationale. Elle sera discutée en séance publique au Sénat la semaine prochaine. La commission des affaires économiques du Sénat l’a adoptée sans modification. 

Pente supérieure ou égale à 20 %, bananeraies et vignes mères porte-greffes

Le texte est constitué d’un unique article. Ce dernier propose d’autoriser le recours à des drones en vue du traitement des vignes en pente, des bananeraies et des vignes-mères de porte-greffes conduites au sol pour certains produits à faible risque ou autorisés en agriculture biologique, lorsque celui-ci présente des avantages manifestes pour la santé humaine et l’environnement par rapport aux applications terrestres. Ainsi, seuls pourront être utilisés les produits relevant d’une des trois catégories suivantes : les produits de biocontrôle, les produits autorisés en agriculture biologique, les produits à faible risque au sens du droit européen.

Cette technique de pulvérisation par drone permettrait, selon les soutiens du texte, d’éloigner les agriculteurs de la zone d’épandage et donc de les protéger davantage, de diminuer la quantité de produits utilisés sur des zones précises : « C’est une alternative sûre et efficace sur les parcelles à fortes pentes, où les équipements terrestres traditionnels comme les chenillards ou les pulvérisateurs à dos exposent les opérateurs à des risques de chutes, d’accidents graves, voire mortels » , a estimé en séance à l’Assemblée le député Hubert Ott (Les Démocrates). 

Il est difficile de savoir combien d’hectares exactement seraient visés par ces nouvelles autorisations. Les bananeraies sont essentiellement en Martinique (environ 5 000 hectares) et Guadeloupe (environ 2 000 hectares). Concernant les vignes-mères de porte-greffes, en 2023, 4 019 ha de vignes-mères ont été inscrites auprès de FranceAgriMer. Il est plus difficile de se faire une idée de l’étendue de cette mesure pour les terrains ayant une pente supérieure ou égale à 20 %. La Carte des pentes pour l'agriculture développée par l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) représente les zones où la pente dépasse 10 % en France métropolitaine. Difficile alors d’identifier précisément les terrains agricoles avec une pente supérieure ou égale à 20 %.

Des divisions et des appels à la prudence 

Plusieurs amendements de députés de gauche ont été déposés – et rejetés – à l’Assemblée nationale, mentionnant le rapport d’évaluation de l’expérimentation prévue par la loi Egalim publié par l’Anses en 2022. Les interprétations sur les conclusions du rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) sont différentes. D’un côté les députés de gauche estiment que l’évaluation est nuancée, à l’instar de Chantal Jourdan (Socialistes et apparentés) qui rappelle que « l’Anses ne conclut à aucun moment qu’elle est d’un intérêt généralisé pour tous les types de cultures ». Dans l’exposé d’un amendement présenté par le groupe communiste à l’Assemblée, il a aussi été mis en avant que l’Anses « avait formulé en conclusion la recommandation d’acquérir des données supplémentaires. »  La commission des affaires économiques s’aligne sur l’avis des défenseurs du texte en retenant de l’étude de l’Anses « les impacts positifs de l’usage de drones en agriculture »  et indiquant que « le développement des drones, beaucoup plus légers, manœuvrables et précis, justifie d’adapter le droit en vigueur » .

L’acceptation de la population et des élus concernant la réintroduction de l’épandage aérien, même encadré, risque d’être difficile dans certains territoires. Il serait en effet utile que le souci louable de protection des agriculteurs soit étendu aux populations riveraines. Un garde-fou avait pourtant été introduit mais finalement supprimé par un amendement du rapporteur du texte à l’Assemblée nationale qui prévoyait l’interdiction d’utiliser des drones à moins de 250 mètres des zones habitées. Jean-Luc Fergit rappelle que par ailleurs « la règlementation en vigueur autorise la pulvérisation par voie terrestre de produits qui dégagent des particules cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction, dites CMR, jusqu’à 20 mètres ». 

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