Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 19 avril 2021
Sécurité

Agressions contre les élus : un rapport parlementaire préconise une augmentation du montant des contraventions

Un rapport parlementaire, présenté le 14 avril, préconise 18 pistes pour protéger les maires dans l'exercice de leurs fonctions. Les faits de violence à l'encontre des élus locaux ont été multipliés par trois entre 2019 et 2020.

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1 276 agressions, menaces ou insultes contre des élus ont été recensées en 2020. « C’est trois fois plus que l’année précédente », alertent, dans un rapport publié le 14 avril, Philippe Gosselin (Manche, Les Républicains) et Naïma Moutchou (Val-d’Oise, La République en marche). Face à « la multiplication des faits de violence à l’encontre des maires et de la contestation de plus en plus fréquente de leur autorité », les deux députés* préconisent de créer un Observatoire national de la sécurité des élus locaux, d’augmenter le montant des contraventions mais aussi de resserrer les liens entre les maires et la justice. Ils plaident également pour un renforcement de la formation des élus et des agents municipaux (création d’une école nationale des polices municipales...).

505 maires ou adjoints agressés physiquement

Selon les derniers chiffres du ministère de l’Intérieur, « 505 maires ou adjoints ont été agressés physiquement, 350 ont été outragés, 68 atteintes contre des domiciles ont été recensées, et 63 véhicules ont été visés ». Déjà en 2019, année marquée par l’agression mortelle du maire de Signes (Var) Jean-Mathieu Michel, la commission des lois du Sénat dépeignait, dans un rapport, « la réalité d’une violence qui s’exerce à l’encontre des maires ».
Dans ce « contexte de tensions exacerbées », les associations d’élus ne disent pas autre chose. L’AMF a relevé, lors de son audition, que « de plus en plus d’infractions mineures sont sources d’agressivité et exposent physiquement l’élu qui tente de faire appliquer les lois, les textes réglementaires et autres règles de vie en communauté (tapages, fêtes improvisées, personnes alcoolisées ou mal garées, dépôts sauvages…) », tandis que l’association France urbaine a souligné que « des infractions a priori banales deviennent aujourd’hui des facteurs qui exposent dangereusement les maires qui tentent de faire appliquer la loi et les règles du vivre ensemble ». 
Parmi les incivilités les plus fréquemment relevées par les élus « figurent le dépôt de déchets sauvage, le non-respect des règles d’urbanisme, les nuisances sonores ou encore les difficultés occasionnées par les chiens dangereux et les rodéos motorisés ». Afin de lutter contre les rodéos motorisés et les dépôts de déchets sauvage justement, les députés soutiennent le développement respectif de brigades motorisées et de brigades vertes ainsi que la poursuite de la réflexion concernant le recours aux drones.

Augmentation des amendes pour infraction à un arrêté de police du maire

Parmi les autres moyens d'action, la loi Engagement et proximité du 27 décembre 2019 a bien renforcé les pouvoirs de police, d’astreinte et de sanction du maire. Le maire peut, par exemple, « infliger des amendes administratives », à des fins dissuasives, d’un montant maximal de 500 euros. « Toutefois, les conditions exigées pour mettre en œuvre l’amende et la nécessité de respecter un délai de dix jours, destiné à permettre à la personne intéressée de présenter des observations ou de faire cesser le manquement, empêcheraient d’y recourir dans certains domaines, et notamment dans le cas où le maire souhaiterait s’opposer à un dépôt de déchets sauvage, pour des raisons tenant à la salubrité publique », regrettent les élus, cités par les députés. 
Philippe Gosselin et Naïma Moutchou proposent donc d’aller plus loin en sanctionnant plus sévèrement encore les infractions aux arrêtés de police (sûreté, sécurité, salubrité publiques). « En l’état actuel du droit, le montant maximal des amendes pouvant être infligées dans le cas d’une infraction à un arrêté de police du maire s’élève à 38 euros. La mission recommande d’assimiler les infractions aux arrêtés de police à des contraventions de deuxième classe, pour lesquelles le montant maximal de l’amende est de 150 euros, voire de troisième classe, pour lesquelles ce montant atteint 450 euros ». 
Les deux députés encouragent, en outre, les maires à recourir davantage à la procédure de l’amende forfaitaire. « Le montant acquitté via la procédure de l’amende forfaitaire est certes moindre que dans le cas où la pénalité serait infligée par le juge, mais la simplicité de la procédure garantit un recouvrement rapide et l’immédiateté de la sanction renforce sa portée dissuasive. »  Ils demandent l’élargissement du champ des infractions pouvant en faire l’objet. Face à « des pouvoirs (déjà) très étendus et de plus en plus techniques et complexes », la formation des élus est donc plus que jamais une nécessité, rappelle l'AMF. Ce, d'autant plus, que « l’organisation par les services de l’État (préfet et procureurs territorialement compétents) d’une réunion d’information pour présenter aux maires leurs pouvoirs de police ne semble pas avoir été systématiquement mise en œuvre, notamment en raison des restrictions sanitaires », confirment les députés.

Relation avec la justice

« Resserrer les liens entre la justice et les élus municipaux »  est, enfin selon la mission, une « nécessité ». « En particulier, insistent les députés, les élus des petites communes témoignent d’un manque d’intérêt des magistrats et des procureurs en ce qui concerne les faits de délinquance intervenus sur leurs territoires. Les élus ont ainsi exprimé deux attentes principales vis-à-vis de la justice. D’une part, les élus disent n’être pas suffisamment informés des suites judiciaires données aux infractions signalées par eux ou constatées sur le territoire de leur commune, malgré des avancées récentes à ce sujet [les préfets doivent, depuis la circulaire du 7 septembre 2020, « systématiquement signaler aux parquets les faits dont les élus sont victimes et qui sont susceptibles de recevoir une qualification pénale », ndlr]. D’autre part, les élus souhaitent une plus grande exemplarité de la réponse pénale, et surtout que les suites données aux incivilités constatées sur le territoire de leur commune soient plus rapides. » 
Par conséquent, la mission préconise, pêle-mêle, de « généraliser la signature de conventions entre les parquets et les associations départementales d’élus, afin d’intensifier et de fluidifier les échanges », « d’intégrer la présence de magistrats au sein des CLSPD et des CISPD »  ou encore de « renforcer l’effectivité de la réponse pénale par l’exemplarité et la rapidité des sanctions »  ainsi que « la protection des maires sur les réseaux sociaux en matière de diffamations, d’injures et de menaces ». À ce sujet, la mission propose de renforcer la protection des maires sur les réseaux sociaux en créant « une incrimination spécifique dans les cas d’attaques sur ces réseaux ».


*Philippe Gosselin et Naïma Moutchou sont les rapporteurs de la mssion « flash »  sur les entraves opposées à l’exercice des pouvoirs de police des élus municipaux.

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