Programmation budgétaire : les sénateurs valident la modération des dépenses locales, mais rejettent le système de sanctions Â
Par A.W.
Alors que les sénateurs entament aujourd’hui l’examen, en première lecture, du projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP) pour les années 2023 à 2027, la commission des finances a d’ores et déjà amendé, la semaine dernière, ce texte qui venait d'être rejeté par les députés.
Si les sénateurs ont ainsi confirmé l’article fixant la trajectoire budgétaire des collectivités, ils se sont opposés à celui déterminant les sanctions contre celles qui ne respecteraient pas la règle régissant la modération de leurs dépenses.
Baisse des dépenses : l’État aligné sur les collectivités
À la différence des députés qui s’étaient opposés à toute limitation de la progression des dépenses de fonctionnement des collectivités, les sénateurs ont confirmé celle inscrite par le gouvernement dans le projet de loi : à savoir une évolution « à un rythme inférieur de 0,5 point au taux d’inflation » durant les cinq prochaines années (soit 3,8 % dès l’an prochain, puis à 2,5 % en 2024, 1,6 % en 2025 et 1,3 % en 2026 et 2027).
En contrepartie, et par souci de « responsabilité », « d’équité », et de « reconnai[ssance] des efforts demandés aux administrations locales », la commission a décidé d’appliquer le même objectif à l’État avec une diminution des dépenses de fonctionnement de 0,5 % en volume, chaque année, dès 2023 – une diminution donc « plus ambitieuse et sérieuse » que prévu. Ce qui représenterait « un effort plus rigoureux encore que sous les précédentes lois de programmation », dans le but de « retrouver le chemin de l’équilibre ».
Alors que l'État veut imposer aux administrations locales et sociales de réaliser « un effort d'économies compris entre 25 et 27 milliards d'euros [...], dans le même temps, les administrations centrales n'en réaliser[aie]nt pas », a critiqué le rapporteur général, Jean-François Husson (LR).
Celui-ci a, en effet, pointé dans son rapport des hypothèses macroéconomiques du gouvernement bien « trop optimistes » et « éloignées du consensus des économistes ». En outre, la trajectoire des finances publiques présentée « est en trompe-l'oeil » : l'exécutif « revendique de diminuer la dépense publique en volume de 2023 à 2027 mais ne retraite ni les mesures liées aux crises sanitaire, économique et énergétique, ni la charge de la dette ». Sans compter que, « au périmètre des dépenses "ordinaires", les dépenses publiques progresseront en réalité de 0,6 % en volume par an jusqu'en 2027 », a assuré le sénateur de Meurthe-et-Moselle.
L'amendement adopté prévoit ainsi que la nouvelle trajectoire appliquée à l'État ne s'appliquerait qu'à ces dépenses « ordinaires » des administrations centrales, c'est-à-dire hors mesures engagées face à l'urgence sanitaire, économique et énergétique, hors charge de la dette et du champ des dépenses régaliennes. Une nouvelle trajectoire qui permettrait de ramener le déficit public en dessous de 3 % du PIB dès l'année 2025, et non en 2027 comme prévu par l'exécutif.
« Inacceptable système de surveillance »
Via une série d’amendements (déposés par le rapporteur, les socialistes, les communistes et les écologistes notamment), les sénateurs ont, toutefois, supprimé les « contrats de confiance » inscrits à l’article 23 du projet de loi, cet « inacceptable système de surveillance et de sanctions des collectivités » qui concourt « à une sorte de mise sous tutelle inacceptable des collectivités territoriales ».
« Les collectivités territoriales ont démontré, dans les années récentes, la rigueur de leur gestion et leur esprit de responsabilité face à l'urgence de rétablir nos comptes publics », a rappelé le rapporteur dans un communiqué pour justifier sa décision.
« Depuis 2014, les collectivités ont déjà contribué à hauteur de 46 milliards d’euros au remboursement de la dette (42 milliards de baisse de dotation globale de fonctionnement et 4 milliards de gel de cette même dotation depuis 2018). Ces contraintes ont été sans effet sur le redressement des comptes publics, puisque le déficit de l’État est resté au même niveau en 2019 avant la crise covid, qu’en 2014 (3,5 % du PIB) », a souligné, de son côté, le groupe écologiste dans son amendement.
Lors des débats à l’Assemblée, le rapporteur du budget Jean-René Cazeneuve (Renaissance) avait assuré que ce dispositif « n’est en aucune manière une baisse des recettes des collectivités » et qu’il limitait « simplement la croissance de leurs dépenses de fonctionnement », celui-ci vantant une mesure de « bonne gestion ».
Alors que les sénateurs voient dans ces nouveaux contrats, « le retour [des contrats de Cahors] sous une forme renouvelée », le député du Gers estimait, pour sa part, que la méthode des contrats de confiance n'a « absolument rien à voir » avec les contrats de Cahors, « elle est même orthogonale ».
Pour rappel, cette mesure imposerait aux 500 collectivités ayant un budget supérieur à 40 millions d’euros d’économiser, sur la période, un total cumulé estimé à 15 milliards d’euros, selon une évaluation des députés d’opposition. Une proposition plus sévère que les contrats de Cahors qui limitaient la contrainte aux collectivités ayant un budget supérieur à 60 millions d’euros.
Même chose pour les pénalités puisqu'en cas de non-respect, ces collectivités se verraient privées, contrairement aux contrats de Cahors, « d’accès à toute dotation de l’État (Dsil, DETR, fonds vert…) ». Puis, si la situation perdure, elles pourraient être frappées de reprises financières avant de devoir mener, « avec le représentant de l’État », une « analyse des structures de la dépense de fonctionnement […], puis un travail pour un retour à une trajectoire financière de maîtrise des dépenses de fonctionnement ».
Consulter le PLPFP.
Consulter la présentation du rapporteur.
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