Une jurisprudence du Conseil d'État à connaître, sur les élections municipales dans les communes de moins de 1000 habitants
Par Franck Lemarc
Le Conseil d’État a eu à trancher sur une décision du tribunal administratif de Rennes, qui, au mois de mai dernier, a annulé l’élection au premier tour de 7 conseillers municipaux de la commune de Locronan (Finistère).
Le 7 avril 2024, à la suite de la démission d’un tiers des membres du conseil municipal, la commune de Locronan (777 électeurs) a organisé une élection municipale partielle. Les sept candidats déclarés ont recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés. Ils ont donc été proclamés élus à l’issue du premier tour… un peu vite, comme on va le voir.
Conditions cumulatives
En effet, le préfet a constaté que les 7 candidats avaient bien recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés, mais que ces suffrages exprimés n’atteignaient pas la barre des 25 % des inscrits. Or le Code électoral prévoit clairement, pour le premier tour des élections municipales dans les communes de moins de 1000 habitant, deux conditions cumulatives : la majorité absolue des suffrages exprimés et « un nombre de suffrage égal au quart de celui des électeurs inscrits » (article L253).
Cette seconde condition n’étant pas acquise, le préfet a déféré le scrutin devant le tribunal administratif, qui a annulé l’élection des 7 candidats.
Pourtant, a reconnu la rapporteure publique au Conseil d’État, Céline Guibé, les arguments des candidats et du maire, qui ont contesté cette décision, ne « manquaient de bon sens » : « Les requérants font valoir que, le nombre des candidats étant égal au nombre de sièges à pourvoir et ces candidats ayant chacun obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour de scrutin, leur élection au second tour était acquise. » Il n’y avait donc, selon eux, pas besoin d’organiser un second tour. De surcroît, aucun autre candidat ne pouvait être élu au second tour puisque, depuis la loi du 17 mai 2013, « seuls peuvent se présenter au second tour de scrutin les candidats présents au premier tour, sauf si le nombre de candidats au premier tour est inférieur au nombre de sièges à pourvoir » – ce qui n’était pas le cas.
La rapporteure a cependant fait valoir qu’il n’y a pas d’automaticité en la matière : ce n’est pas parce que des candidats ont obtenu la majorité absolue au premier tour qu’ils l’obtiendront, mécaniquement, au second. Il existe en effet « une probabilité certes réduite, mais pas nulle », qu’un candidat « restant en lice à l’issue du premier tour ne soit pas élu au second ».
Logique « utilitariste » contre « logique démocratique »
Il convient donc, a confirmé le Conseil d’État, d’appliquer la loi, à savoir les deux conditions cumulatives : si un candidat n’a pas atteint la barre des 25 % des inscrits, il faut procéder à un second tour. Lors de ce second tour, rappelons-le, l’élection a lieu à la majorité relative, sans seuil minimal de voix. Comme l’explique la rapporteure dans ses conclusions : au premier tour, l’obligation d’obtenir les voix d’un quart des inscrits est justifiée par un objectif « démocratique », qui est « de tenir compte de la participation des électeurs, en subordonnant l’élection des intéressés à leur représentativité au regard de l’ensemble du corps électoral ». Ce n’est qu’au second tour que « la logique utilitariste, qui commande de pourvoir les sièges pour permettre au conseil municipal de fonctionner, reprend le dessus sur celle de la légitimité démocratique ».
Il était donc nécessaire d’organiser un second tour, même si son résultat était presque assurément acquis d’avance. Le Conseil d’État a donc confirmé l’annulation du scrutin.
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