Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 28 juin 2021
Élections

Distribution des plis électoraux : au deuxième tour, pas mieux

Il ne semble pas que la situation se soit arrangée, à l'occasion du second tour des élections, sur le front de la distribution des plis électoraux. Le Sénat a annoncé, vendredi, l'ouverture d'une commission d'enquête. 

Par Franck Lemarc

Il fallait s’y attendre : ce qui n’a pas pu être fait correctement en trois semaines ne risquait pas de l’être en trois jours. Malgré les engagements du gouvernement à « tout faire »  pour que le second tour se passe mieux, malgré la « reprise »  par La Poste de quelque 5 millions de plis électoraux à Adrexo, la distribution des deux fois 48 millions d’enveloppes (pour deux scrutins) contenant la propagande électorale du second tour s’est mal passée dans de nombreux départements. 

Foule de témoignages

Les réseaux sociaux se sont fait l’écho de ces difficultés, une fois de plus. D’innombrables tweets, ce week-end, photos à l’appui, ont montré des boîtes aux lettres vides samedi soir, des enveloppes mal adressées, des paquets d’enveloppes laissés à l’abandon. Certains émanent de salariés d’Adrexo eux-mêmes, comme une photo postée sur un réseau montrant une montagne de cartons non ouverts dans un entrepôt, prise à 21 h samedi. Un autre tweet d’un salarié en colère, posté samedi : « 21 heures, je suis encore en train de distribuer vos tracts ». Un électeur raconte avoir reçu son enveloppe « à 21 h 58 »  samedi ; une autre a également reçu son enveloppe samedi soir mais, électrice en Bourgogne-Franche-Comté, il s’agissait d’une enveloppe du Grand Est. « Rien, zéro document, zéro papier ! », twittait rageusement, dimanche, un électeur de Vollore (Puy-de-Dôme). Mieux encore : ce matin, une électrice a enfin reçu la précieuse enveloppe… le lendemain du vote. 

De nombreux élus se sont aussi exprimés ce week-end sur les réseaux sociaux, notamment dans le Puy-de-Dôme, visiblement particulièrement mal desservi : « Malgré les alertes du premier tour, dans le Puy-de-Dôme le second s’avère encore plus catastrophique, écrivait samedi la députée Christine Pires Beaune. Enval, Marsat, Mozac, Ménétrol déjà 4 communes sur 8 du canton qui n’ont reçu aucun pli électoral. Il va falloir rendre des comptes. »  Le sénateur de l’Isère André Vallini a parlé ce week-end « d’amateurisme révoltant »  ; celui de la Manche, Philippe Bas, de « défaillance sans précédent dans l’organisation des élections en France ». Et l’on pourrait encore en citer beaucoup. 

Commission d’enquête

La société Adrexo a pris les devants, cette fois, en publiant dès hier un communiqué indiquant avoir rencontré « de nombreuses difficultés »  dans la distribution des plis du second tour. « Force est de constater que de nombreuses difficultés sur l'ensemble de la chaîne logistique jusqu'à la distribution, incluant les impressions et le routage, ont été relevées sur l'ensemble du territoire, dans ces délais exceptionnellement courts pour l'acheminement de plis sur deux scrutins simultanés », écrit la société. 
Le délai particulièrement restreint entre les deux tours est évidemment une difficulté à prendre en compte, au point que la semaine dernière, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a évoqué l’idée de modifier la loi pour aller vers un délai minimum de deux semaines entre deux tours de scrutin, comme cela se fait pour l’élection présidentielle. 

Mais il reste que le choix de cette société – dont les organisations syndicales, dès février, indiquaient que la distribution des plis électoraux serait une « mission impossible »  – interroge, quand La Poste elle-même, pourtant habituée à cette tâche, a connu des difficultés. 

C’est la raison pour laquelle le Sénat a décidé, jeudi, de créer une commission d’enquête « pour faire la lumière sur ce fiasco ». Les sénateurs ont autorisé la commission des lois à « se doter pour six mois »  des prérogatives d’une commission d’enquête, afin de comprendre « les dysfonctionnements constatés dans l’organisation des élections départementales et régionales de juin 2021 ». La commission ne se penchera pas seulement sur le fonctionnement d’Adrexo, mais également « sur les rouages de l’État », et en particulier sur le rôle des préfets, dont certains ont été aux abonnés absents, selon de nombreux maires, face aux dysfonctionnements relevés avant le premier tour. 

La commission d’enquête va auditionner, dès demain, les dirigeants d’Adrexo. 

Sur un autre front, il reste à voir ce qu'il adviendra de la déclaration du ministre de l’Intérieur, la semaine dernière, qui a annoncé que si le Parlement souhaitait que la distribution de matériel électoral soit reprise en régie, le gouvernement ne s’y opposerait pas. Il faut donc maintenant guetter une proposition de loi sur ce sujet, ce qui ne devrait pas forcément tarder, à 10 mois de l’élection présidentielle.

La semaine dernière, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait prévenu que la distribution « ne passerait pas à 100 % en trois jours », mais que tout serait fait pour permettre « une amélioration générale ». Il semble évident que cet engagement n’a pas pu être tenu. 

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