Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 1er décembre 2022
Éducation

Un rapport pointe le manque de « co-construction » entre État et collectivités en matière d'éducation 

L'Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR), vient de rendre un rapport sur « l'articulation des compétences des collectivités territoriales et de l'État » dans les politiques de l'enfance et de l'éducation. Ce rapport conclut clairement que les collectivités doivent avoir un rôle accru dans la gouvernance de la politique éducative. 

Par Franck Lemarc

Ce rapport est en réalité terminé depuis plusieurs mois (il a été remis au gouvernement en mars), mais il vient seulement d’être rendu public. 

Quarante ans après les grandes lois de décentralisation, l’articulation entre l’État et les collectivités territoriales dans le domaine de l’éducation n’a encore trouvé ni « son équilibre institutionnel »  ni « sa maturité opérationnelle », constatent les auteurs du rapport, et elle fait encore l’objet de « divergences d’approche ». 

Les collectivités ne veulent plus être des « prestataires » 

Le rapport décrit des procédures administratives qui rendent la coopération entre État et collectivités « complexe et peu lisible ». Les collectivités, qui se sont vu confier de nombreuses responsabilités de gestion des établissements, se sentent trop souvent cantonnées au rôle de simples « prestataires », alors qu’elles souhaitent « participer à la définition des projets éducatifs et à leur conception ». Face à cette volonté, l’État, écrivent les rapporteurs, fait preuve d’une excessive « prudence vis-à-vis d’un rôle plus prégnant des collectivités ».

Toutefois, les choses ont commencé à changer avec la volonté de l’État d’initier des dispositifs de gouvernance partagée (cités éducatives dans les quartiers politique de la ville, Territoires éducatifs ruraux, Projets éducatifs de territoire). 

La mission estime que « les collectivités ont largement pris leur place dans le paysage et particulièrement en termes d’investissements », mais qu’elles ne se satisfont pas, globalement, de l’articulation avec les services de l’État, qui apparaît « encore imparfaite, parfois instable et en attente des décisions de fond qui permettraient d’appliquer réellement le principe de libre administration ». 

Zoom sur les PEDT

Le rapport aborde de façon approfondie de nombreux sujets : périscolaire, numérique, question du bâti scolaire, éducation populaire, PEDT… Ce chapitre sur les PEDT est intéressant, dans la mesure où il permet de faire le point sur le dispositif, qui patine clairement. Seulement un quart des communes qui disposent d’une école publique ont un PEDT, avec une « baisse continue »  du nombre de ces communes depuis 2018, avec le retour à la semaine de quatre jours. En particulier, les rapporteurs notent que « les PEDT tendent à devenir plus mono-communaux que pluri-communaux. Les communes les plus rurales qui s’inscrivaient souvent dans un PEDT intercommunal ont renoncé plus que les autres à la démarche. » 

La démarche PEDT a aussi été victime « d’un manque de budget », soulignent les rapporteurs, avec un État qui « s’est progressivement désengagé au profit des collectivités ».

Co-construction

Dans leurs préconisations, les rapporteurs concluent à la nécessité de mettre en place une véritable co-construction entre État et collectivités. Ils appellent à revoir le fonctionnement et l’architecture des instances de concertation – rappelant au passage que depuis 2013 et la suppression du Conseil territorial de l’Éducation nationale (CTEN), « il n’existe plus d’instance officielle de dialogue entre le ministère et les associations d’élus ». Dans les instances où siègent encore les élus, notamment le Conseil supérieur de l’éducation (CSE), leur avis est peu entendu – ils y sont d’ailleurs sous-représentés, puisque sur 100 membres, 12 seulement sont des représentants des collectivités locales. Le CSE est uniquement consultatif, et les rapporteurs notent que les textes qui y sont discutés ne sont quasiment jamais modifiés, même quand les élus s’y opposent – voire quand le Conseil rend un avis négatif. 

La liste des préconisations de la mission donne donc une place essentielle à cette question de la « co-construction ». Il est notamment proposé de « refondre les instances nationales, académiques et locales », en donnant aux instances territoriales « une fonction de co-construction des projets éducatifs locaux ». « Pour qu’une articulation efficace entre l’État et les collectivités territoriales puisse s’installer dans la durée, il convient de définir, au niveau national, un nouveau type de concertation et des instances de gouvernance dans lesquelles les acteurs impliqués selon leurs compétences respectives seront représentés », concluent les rapporteurs. 

Cette problématique de la gouvernance est prise en compte par Pap Ndiaye, ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, qui a installé une instance informelle de dialogue entre le ministère et les associations nationales d’élus, dont la première séance s’est tenue le 22 septembre. Un des axes de réflexion porte notamment sur les instances de concertation locales (CAEN, CDEN…). 

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