Édition du lundi 3 mai 2010
Voile intégral: en Ile-de-France, des maires de tous bords s'inquiètent des conséquences d'une loi
Ils sont de bords différents mais partagent le même constat: des élus de la banlieue parisienne interrogés par l'AFP disent réprouver le voile intégral mais s'inquiètent d'une montée des tensions avec la communauté musulmane, insistant sur l'effort de pédagogie.
Hostile au voile intégral qui est, selon lui, une «forme d'aliénation», Laurent Cathala, député et maire (PS) de Créteil, assure toutefois «comprendre» que «la communauté musulmane se sente stigmatisée» par une loi d'interdiction. «On a commencé par les minarets, on poursuit par la burqa et on prolonge avec la polygamie», ajoute-t-il.
«La stigmatisation excessive est un facteur de tensions», poursuit l'édile qui estime que «la manière dont le débat (sur le voile intégral) est engagé n'est pas propice à renforcer la cohésion sociale dans nos collectivités».
Pour Jacques J.P. Martin, maire (UMP) de Nogent-sur-Marne (Val-de-Marne), «il faut essayer de recueillir le plus large consensus possible». Selon l'élu, la procédure d'urgence, évoquée par certaines voix dans la majorité pour accélérer le vote de la loi, ne serait pas appropriée. «Avant toute mise en application, il faudra consacrer du temps, une période de six mois, aux explications et à la pédagogie pour éviter que tout cela ne soit considéré comme une stigmatisation de nos concitoyens musulmans», estime-t-il.
Dans ce sens, Eric Raoult, maire UMP du Raincy (Seine-Saint-Denis) et rapporteur de la mission parlementaire sur le voile intégral, a réuni mercredi dans sa mairie des représentants de la communauté musulmane pour instaurer un dialogue. «Il faut de la concertation» avec la communauté musulmane, a-t-il dit alors. «Il faut élaborer un projet de loi qui ne heurte pas, (...) il faut réussir à convaincre autant que contraindre», a répété M. Raoult.
Il a critiqué jeudi Jean-François Copé, le président des députés de son groupe à l'Assemblée nationale, estimant qu'il donnait un peu «l'impression d'une croisade» sur le voile intégral alors que le but n'est pas «de monter une communauté nationale contre une communauté musulmane».
Des élus interrogés par l'AFP s'accordent sur un autre point: la burqa reste un «phénomène marginal», selon l'expression du maire (UMP) de Melun, Gérard Millet. «C'est arrivé très peu de fois (d'avoir à faire à des femmes entièrement voilées, NDLR) mais lors de mariages, nous nous sommes appuyés sur la vérification de l'état civil pour voir le visage de la personne», observe-t-il.
Entre 1.900 et 2.000 femmes porteraient le voile intégral en France.
«Ce n'est pas un problème quotidien des gens», clame Olivier Léonhardt, maire (PS) de Sainte-Geneviève-des-Bois (Essonne), pourtant «favorable» à une interdiction. «Il ne faut pas faire oublier les problèmes majeurs des gens, les ghettos, l'emploi, la discrimination.»
Maire d'Yerres (Essonne) et président de Debout la République (DLR), Nicolas Dupont-Aignan ne montre toutefois aucune réserve: l'interdiction du voile sera «un instrument de réconciliation nationale», assure-t-il, jugeant que «cela permettra aux Français musulmans de ne plus être déconsidérés».
(AFP)
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