Édition du lundi 23 juillet 2018
Réforme constitutionnelle : pour André Laignel, une volonté « d'affaiblir les instances élues dans les territoires »
Le débat sur le projet de loi de réforme constitutionnelle est pour l’instant suspendu – conséquence inattendue de la non moins inattendue « affaire Benalla », qui a conduit l’opposition à refuser de continuer à débattre de la Constitution avant l’audition, ce matin, du ministre de l’Intérieur par la commission d’enquête parlementaire. Les premières semaines de débat ont néanmoins permis d’adopter une dizaine d’articles… et de rejeter un grand nombre d’amendements, dont plusieurs concernaient de très près les collectivités territoriales. André Laignel, maire d’Issoudun et premier vice-président délégué de l’AMF, a donné ce matin son sentiment à Maire info sur ces débats.
« Diversité des territoires »
Un nouvel article a été adopté, le 13 juillet, sur proposition des députés LaREM et MoDem, introduisant la notion de « diversité des territoires » dans la Constitution : « [La République] reconnaît la diversité de ses territoires par son organisation décentralisée ».
Cette formule a suscité d’âpres débats dans l’hémicycle – dont la majorité s’est étonnée puisqu’elle a estimé qu’il ne s’agit que de l’application de la volonté « girondine » du président de la République. C’est ce qu’a expliqué Marc Fesneau, président du groupe MoDem, en présentant l’amendement sur ce sujet : « Nous entendons faire reconnaître la diversité des territoires, en tirant d’une certaine façon par avance les conséquences du droit à la différenciation, (qui) a pour objet de permettre à nos collectivités locales de mieux adapter la répartition de leurs compétences ou l’exercice de celles-ci à la réalité locale. » Une fois encore, sur la forme, de nombreux députés ont vivement critiqué l’introduction de mesures de si grande portée par amendement, « sans étude d’impact », « sans réflexion sur les conséquences », voire de façon « improvisée ». Mais c’est sur le fond que les débats ont été les plus vifs : les adversaires de cet amendement ont parlé de « boîte de Pandore » (Sébastien Jumel), de « détricotage de la République » qui va « aboutir à des lois locales » (Bastien Lachaud).
C’est un point de vue que partage André Laignel, qui parle ce matin, à propos de cet ajout sur la « diversité des territoires », d’une formule « ambiguë, mal rédigée, bavarde et donc sans efficacité juridique ». Elle recèle surtout pour lui « des dangers », à savoir : « Mettre en cause l’unité de notre République ». Il s’agit bien, pour André Laignel, « d’une forme d’ouverture vers un fédéralisme qui ne dit pas son nom et qui pourrait, demain, justifier la création de lois locales ». Certes, rien de tel n’est encore écrit dans la Constitution. Mais ce que craint le maire d’Issoudun, c’est qu’il soit désormais possible de « s’appuyer sur cette formule » pour avancer d’un cran et permettre des lois locales – qui, du fait de l’existence de cette formule, ne seraient plus inconstitutionnelles.
La formule est de surcroît, pour le numéro deux de l’AMF, « parfaitement inutile » du point de vue du « droit à la différenciation » souhaité par le gouvernement : « Le Conseil d’État lui-même a clairement expliqué qu’il n’y a aucun besoin de réformer la Constitution pour organiser le droit à la différenciation, tous les outils existent. D’ailleurs, le cas particulier de la Métropole de Lyon a pu être réglé sans réforme constitutionnelle. Si ce n'est pas de la différenciation, je veux bien qu’on m’explique ce que c’est ! »
La loi de financement des collectivités rejetée
Un amendement correspondant à une demande forte de l’AMF et du CFL a été rejeté jeudi 19 juillet : il demandait la création d’une loi de financement spécifique pour les collectivités territoriales. Porté notamment par Charles de Courson et Christophe Jerretie (« contre l’avis » de son groupe, LaREM, a précisé ce dernier), cet amendement a fait l’objet d’un avis défavorable du gouvernement et du rapporteur du texte. De nombreux députés ont pourtant défendu cette idée, qui permettrait, selon Frédéric Reiss par exemple, « d’améliorer la lisibilité et la sincérité de la discussion budgétaire ». Côté adversaires de la mesure, il a été mis en avant « le calendrier » déjà très chargé de la discussion budgétaire. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a dit son opposition sur le fond : « Une telle loi de financement serait dans le meilleur des cas une fiction, sinon l’instrument d’une tutelle sur les collectivités. » L’amendement a été rejeté – mais de justesse.
C’est un nouveau motif de déception pour André Laignel, qui y voit « la preuve que Bercy ne veut pas que les choses soient trop claires ». « Comme il y a eu un engagement du gouvernement de ne pas baisser la DGF, les diminutions des concours aux collectivités se feront par d’autres biais, de façon diluée, éclatée, pour que cela ne se voie pas. Si cela avait été dans un texte unique comme nous le demandons, cela se serait vu ! »
La conclusion du président du CFL est donc sans appel : « Ce projet de loi constitutionnelle est vide de tout progrès réel pour les collectivités. Le rejet d’un certain nombre d’amendements est le signe concret d’une volonté d’affaiblissement des instances élues dans les territoires. »
« Diversité des territoires »
Un nouvel article a été adopté, le 13 juillet, sur proposition des députés LaREM et MoDem, introduisant la notion de « diversité des territoires » dans la Constitution : « [La République] reconnaît la diversité de ses territoires par son organisation décentralisée ».
Cette formule a suscité d’âpres débats dans l’hémicycle – dont la majorité s’est étonnée puisqu’elle a estimé qu’il ne s’agit que de l’application de la volonté « girondine » du président de la République. C’est ce qu’a expliqué Marc Fesneau, président du groupe MoDem, en présentant l’amendement sur ce sujet : « Nous entendons faire reconnaître la diversité des territoires, en tirant d’une certaine façon par avance les conséquences du droit à la différenciation, (qui) a pour objet de permettre à nos collectivités locales de mieux adapter la répartition de leurs compétences ou l’exercice de celles-ci à la réalité locale. » Une fois encore, sur la forme, de nombreux députés ont vivement critiqué l’introduction de mesures de si grande portée par amendement, « sans étude d’impact », « sans réflexion sur les conséquences », voire de façon « improvisée ». Mais c’est sur le fond que les débats ont été les plus vifs : les adversaires de cet amendement ont parlé de « boîte de Pandore » (Sébastien Jumel), de « détricotage de la République » qui va « aboutir à des lois locales » (Bastien Lachaud).
C’est un point de vue que partage André Laignel, qui parle ce matin, à propos de cet ajout sur la « diversité des territoires », d’une formule « ambiguë, mal rédigée, bavarde et donc sans efficacité juridique ». Elle recèle surtout pour lui « des dangers », à savoir : « Mettre en cause l’unité de notre République ». Il s’agit bien, pour André Laignel, « d’une forme d’ouverture vers un fédéralisme qui ne dit pas son nom et qui pourrait, demain, justifier la création de lois locales ». Certes, rien de tel n’est encore écrit dans la Constitution. Mais ce que craint le maire d’Issoudun, c’est qu’il soit désormais possible de « s’appuyer sur cette formule » pour avancer d’un cran et permettre des lois locales – qui, du fait de l’existence de cette formule, ne seraient plus inconstitutionnelles.
La formule est de surcroît, pour le numéro deux de l’AMF, « parfaitement inutile » du point de vue du « droit à la différenciation » souhaité par le gouvernement : « Le Conseil d’État lui-même a clairement expliqué qu’il n’y a aucun besoin de réformer la Constitution pour organiser le droit à la différenciation, tous les outils existent. D’ailleurs, le cas particulier de la Métropole de Lyon a pu être réglé sans réforme constitutionnelle. Si ce n'est pas de la différenciation, je veux bien qu’on m’explique ce que c’est ! »
La loi de financement des collectivités rejetée
Un amendement correspondant à une demande forte de l’AMF et du CFL a été rejeté jeudi 19 juillet : il demandait la création d’une loi de financement spécifique pour les collectivités territoriales. Porté notamment par Charles de Courson et Christophe Jerretie (« contre l’avis » de son groupe, LaREM, a précisé ce dernier), cet amendement a fait l’objet d’un avis défavorable du gouvernement et du rapporteur du texte. De nombreux députés ont pourtant défendu cette idée, qui permettrait, selon Frédéric Reiss par exemple, « d’améliorer la lisibilité et la sincérité de la discussion budgétaire ». Côté adversaires de la mesure, il a été mis en avant « le calendrier » déjà très chargé de la discussion budgétaire. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a dit son opposition sur le fond : « Une telle loi de financement serait dans le meilleur des cas une fiction, sinon l’instrument d’une tutelle sur les collectivités. » L’amendement a été rejeté – mais de justesse.
C’est un nouveau motif de déception pour André Laignel, qui y voit « la preuve que Bercy ne veut pas que les choses soient trop claires ». « Comme il y a eu un engagement du gouvernement de ne pas baisser la DGF, les diminutions des concours aux collectivités se feront par d’autres biais, de façon diluée, éclatée, pour que cela ne se voie pas. Si cela avait été dans un texte unique comme nous le demandons, cela se serait vu ! »
La conclusion du président du CFL est donc sans appel : « Ce projet de loi constitutionnelle est vide de tout progrès réel pour les collectivités. Le rejet d’un certain nombre d’amendements est le signe concret d’une volonté d’affaiblissement des instances élues dans les territoires. »
F.L.
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