Édition du jeudi 25 avril 2019
Reconstruction de Notre-Dame : un projet de loi qui ne répond pas à toutes les questions
Le gouvernement a présenté hier devant le Conseil des ministres, et déposé à l’Assemblée nationale dans la foulée, le projet de loi « pour la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et instituant une souscription nationale à cet effet ». La question de dons des collectivités territoriales y est clairement abordée.
La cathédrale de Notre-Dame, a expliqué hier le président de la République, est « le registre de nos destinées collectives » – tout à la fois « espace sacré et monument littéraire, lieu de mémoire, lieu de rassemblement et de recueillement populaire ». Sa restauration représente « un défi inédit », d’autant plus inédit d’ailleurs qu’Emmanuel Macron a fixé le calendrier particulièrement ambitieux d’une restauration complète en cinq ans – c’est-à-dire avant l’ouverture des JO de 2024.
La première partie du texte concerne la souscription nationale qui a été ouverte le 16 avril. Pas d’annonces très nouvelles dans le projet de loi, mais la confirmation d’un certain nombre d’information : les fonds seront reversés directement à l’État ou à un établissement public chargé de la restauration de la cathédrale ; ils peuvent être effectués à l’ordre du Trésor public, du Centre des monuments nationaux ou de trois fondations exclusivement (Fondation de France, Fondation du patrimoine et Fondation Notre-Dame) ; un comité de contrôle de ces fonds sera constitué autour du Premier président de la Cour des comptes et des présidents de la commission des finances et de celle de la culture de l’Assemblée nationale et du Sénat.
L’article 4 du projet de loi précise que « les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent opérer des versements au titre de la souscription nationale ». Aucune autre précision ne figure dans le texte lui-même, mais l’exposé des motifs du projet de loi est plus précis : « Il sera précisé par ailleurs que ces versements sont considérés comme des subventions d’équipement ». Ceci confirme une information donnée par le ministre Sébastien Lecornu aux lendemains de l’incendie (« nous avons décidé que les dons des collectivités locales seront comptabilisés en dépenses d’investissement, et non de fonctionnement » ). Et en effet, depuis l’ordonnance du 26 août 2005, les subventions d’équipement sont inscrites en section d’investissement.
Pas de trace en revanche, ni dans le projet de loi ni dans l’exposé des motifs, de la création d’un « fonds de concours » spécifique pour récolter les dons des collectivités. Dominique Bussereau, président de l’Assemblée des départements de France, affirmait pourtant le 18 avril que le ministre de la Culture s’était oralement engagé sur une telle disposition.
Pas de système de redistribution prévu
Un autre aspect de ce texte pose question : que deviendront les dons si leur montant devait dépasser le coût total des travaux ? Le texte du projet de loi est clair : les fonds recueillis « sont destinés au financement des travaux de restauration et de conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et de son mobilier » ; par ailleurs, ils pourront financer « la formation de professionnels disposant des compétences particulières qui seront requises pour ces travaux ». Le texte ne prévoit donc nullement qu’un éventuel « trop-perçu » puisse apparaître, ni qu’il soit, comme le demandait par exemple la semaine dernière le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, reversé aux collectivités pour les aider à financer d’autres travaux de réhabilitation du patrimoine.
Reste qu’il est impossible de savoir aujourd’hui si trop d’argent sera collecté, dans la mesure où personne n’est capable de dire combien coûteront les travaux. Tous les chiffres circulent : Pascal Asselin, président de l’Union des économistes de la construction, estimait hier dans la presse que la facture oscillerait « entre 300 et 600 millions d’euros » – soit moins que ce qui a déjà été récolté, la barre du milliard d’euros de promesses de don ayant été franchie hier. Mais le même jour, un expert de l’assureur britannique Lloyd’s estimait que le coût des travaux approcherait celui de la reconstruction du Parlement de Londres, soit… entre 6 et 7 milliards d’euros. La position la plus raisonnable à ce jour est certainement celle de Stéphane Bern, le « Monsieur Patrimoine » du gouvernement, qui estimait mardi qu’il est tout simplement impossible à cette heure d’établir un devis, les experts ne connaissant encore même pas toute l’ampleur des dégâts.
Régime dérogatoire
Précisons enfin que le gouvernement, pour tenir le délai extrêmement court de cinq ans, a décidé de passer outre un certain nombre de règles – ce qui fait déjà polémique. L’article 9 du projet de loi prévoit que le gouvernement prendra par ordonnance des dispositions permettant de déroger, « dans la mesure strictement nécessaire à l’atteinte de l’objectif », à à peu près toutes les règles habituellement en cours en matière d’urbanisme et de construction : mise en conformité des documents de planification, autorisations, participation du public, archéologie préventive, mais aussi « règles en matière de commande publique, de domanialité publique, de voirie et de transport ». Une décision qui fait déjà grincer quelques dents chez des élus qui dénoncent un « deux poids deux mesures » et pointent les risques juridiques élevés que va faire naître ce régime hautement dérogatoire.
La cathédrale de Notre-Dame, a expliqué hier le président de la République, est « le registre de nos destinées collectives » – tout à la fois « espace sacré et monument littéraire, lieu de mémoire, lieu de rassemblement et de recueillement populaire ». Sa restauration représente « un défi inédit », d’autant plus inédit d’ailleurs qu’Emmanuel Macron a fixé le calendrier particulièrement ambitieux d’une restauration complète en cinq ans – c’est-à-dire avant l’ouverture des JO de 2024.
La première partie du texte concerne la souscription nationale qui a été ouverte le 16 avril. Pas d’annonces très nouvelles dans le projet de loi, mais la confirmation d’un certain nombre d’information : les fonds seront reversés directement à l’État ou à un établissement public chargé de la restauration de la cathédrale ; ils peuvent être effectués à l’ordre du Trésor public, du Centre des monuments nationaux ou de trois fondations exclusivement (Fondation de France, Fondation du patrimoine et Fondation Notre-Dame) ; un comité de contrôle de ces fonds sera constitué autour du Premier président de la Cour des comptes et des présidents de la commission des finances et de celle de la culture de l’Assemblée nationale et du Sénat.
L’article 4 du projet de loi précise que « les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent opérer des versements au titre de la souscription nationale ». Aucune autre précision ne figure dans le texte lui-même, mais l’exposé des motifs du projet de loi est plus précis : « Il sera précisé par ailleurs que ces versements sont considérés comme des subventions d’équipement ». Ceci confirme une information donnée par le ministre Sébastien Lecornu aux lendemains de l’incendie (« nous avons décidé que les dons des collectivités locales seront comptabilisés en dépenses d’investissement, et non de fonctionnement » ). Et en effet, depuis l’ordonnance du 26 août 2005, les subventions d’équipement sont inscrites en section d’investissement.
Pas de trace en revanche, ni dans le projet de loi ni dans l’exposé des motifs, de la création d’un « fonds de concours » spécifique pour récolter les dons des collectivités. Dominique Bussereau, président de l’Assemblée des départements de France, affirmait pourtant le 18 avril que le ministre de la Culture s’était oralement engagé sur une telle disposition.
Pas de système de redistribution prévu
Un autre aspect de ce texte pose question : que deviendront les dons si leur montant devait dépasser le coût total des travaux ? Le texte du projet de loi est clair : les fonds recueillis « sont destinés au financement des travaux de restauration et de conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris et de son mobilier » ; par ailleurs, ils pourront financer « la formation de professionnels disposant des compétences particulières qui seront requises pour ces travaux ». Le texte ne prévoit donc nullement qu’un éventuel « trop-perçu » puisse apparaître, ni qu’il soit, comme le demandait par exemple la semaine dernière le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, reversé aux collectivités pour les aider à financer d’autres travaux de réhabilitation du patrimoine.
Reste qu’il est impossible de savoir aujourd’hui si trop d’argent sera collecté, dans la mesure où personne n’est capable de dire combien coûteront les travaux. Tous les chiffres circulent : Pascal Asselin, président de l’Union des économistes de la construction, estimait hier dans la presse que la facture oscillerait « entre 300 et 600 millions d’euros » – soit moins que ce qui a déjà été récolté, la barre du milliard d’euros de promesses de don ayant été franchie hier. Mais le même jour, un expert de l’assureur britannique Lloyd’s estimait que le coût des travaux approcherait celui de la reconstruction du Parlement de Londres, soit… entre 6 et 7 milliards d’euros. La position la plus raisonnable à ce jour est certainement celle de Stéphane Bern, le « Monsieur Patrimoine » du gouvernement, qui estimait mardi qu’il est tout simplement impossible à cette heure d’établir un devis, les experts ne connaissant encore même pas toute l’ampleur des dégâts.
Régime dérogatoire
Précisons enfin que le gouvernement, pour tenir le délai extrêmement court de cinq ans, a décidé de passer outre un certain nombre de règles – ce qui fait déjà polémique. L’article 9 du projet de loi prévoit que le gouvernement prendra par ordonnance des dispositions permettant de déroger, « dans la mesure strictement nécessaire à l’atteinte de l’objectif », à à peu près toutes les règles habituellement en cours en matière d’urbanisme et de construction : mise en conformité des documents de planification, autorisations, participation du public, archéologie préventive, mais aussi « règles en matière de commande publique, de domanialité publique, de voirie et de transport ». Une décision qui fait déjà grincer quelques dents chez des élus qui dénoncent un « deux poids deux mesures » et pointent les risques juridiques élevés que va faire naître ce régime hautement dérogatoire.
Franck Lemarc
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