Édition du mercredi 19 juin 2019
Projet de loi engagement et proximité (1) : vers de nouvelles souplesses dans le domaine de l'intercommunalité
Le projet de loi « relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique », dans sa version provisoire – on ne connaît pas encore son réel statut et il est probable que son contenu va encore évoluer – est aujourd’hui connu, depuis qu’il a été dévoilé par nos confrères du Monde et de Contexte. En une trentaine d’articles, ce projet de loi balaie toute une série de sujets – intercommunalité, eau et assainissement, urbanisme, pouvoirs de police du maire, statut de l’élu… – avec l’intention évidente, de la part de ses auteurs, d’accéder à un certain nombre de revendications portées par les associations d’élus, au premier rang desquelles l’AMF. Maire info décrypte aujourd’hui, en trois articles, les principales mesures de ce texte, qui devrait être présenté en Conseil des ministres le 15 juillet. Car même si des évolutions, à la marge, sont encore possibles, sans parler de l’avis du Conseil d’État, l’avant-projet publié donne le ton des pistes envisagées par le gouvernement.
Alors que l’on attendait, à l’origine, un texte essentiellement consacré au statut de l’élu, le gouvernement a finalement choisi de traiter aussi, dans le même projet de loi, les fameux « irritants » de la loi Notre. Les deux tiers du texte, dans sa rédaction actuelle, sont ainsi consacrés d’une façon ou d’une autre à la question des relations entre communes et EPCI.
Pactes de gouvernance : une multitude d'options
Dès l’article 1er, le texte prévoit, après chaque renouvellement des exécutifs municipaux, l’élaboration au sein des EPCI d’un « pacte de gouvernance » entre les communes membres et l’EPCI. L’élaboration de ce pacte ne serait pas obligatoire.
Le pacte pourrait notamment prévoir la création d’un « conseil de maires », « instance de coordination entre l’EPCI et les communes membres » – qui resterait obligatoire dans les métropoles. En dehors d’autres dispositions adoptées dans le pacte de gouvernance, les conseils des maires deviendraient obligatoires dans les communautés urbaines, d’agglomération ou de communes, dès lors que « 30 % des maires des communes membres en ont fait la demande » par écrit.
Les pactes pourraient également prévoir la création de « conférences territoriales des maires », sur des périmètres infra communautaires, destinées à être consultées « lors de l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de l’EPCI ». Ils pourraient enfin permettre aux présidents d’EPCI de déléguer aux maires « certaines dépenses d’entretien courant d’infrastructures et de bâtiments communautaires ».
L’article 3 prévoit que les conseillers communautaires seront renouvelés « en cas d’élection d’un nouveau maire, pour quelque cause que ce soit ». L’article 4, organise le remplacement d’un élu au sein d’une commission de l’EPCI « par un conseiller municipal de sa commune ».
Eau et assainissement : enfin de la souplesse
L’un des points essentiels de ce texte est la décision prise par le gouvernement de réintroduire enfin un peu de souplesse dans le très controversé transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux EPCI. La première décision concerne les conditions du report à 2026 de ce transfert. Rappelons que selon la loi du 3 août 2018, les communes membres d’une communauté de communes peuvent décider du report à 2026 du transfert de la compétence si 25 % d’entre elles représentant au moins 20 % de la population le décident.
Cette disposition ne concernait jusqu’à présent que les communautés de communes « n’exerçant pas les compétences relatives à l’eau et/ou l’assainissement ». Le texte faciliterait les possibilités d’opposition des communes même lorsque la communauté de communes exerce « en partie seulement l’une ou l’autre » de ces compétences, ce qui revient à introduire des possibilités d’adaptation des transferts des compétences « eau et assainissement ».
Par ailleurs, le texte propose de donner six mois de plus aux EPCI pour décider, en reportant la date limite du choix du 1er juillet 2019 au 1er janvier 2020. Ce qui, soit dit en passant, pose tout de même un problème, vu que le texte n’a aucune chance d’être adopté avant le 1er juillet prochain.
Mais surtout, il est proposé dans le texte de permettre aux communautés de communes et d’agglomération de subdéléguer par convention l’une ou l’autre de ces compétences, ou les deux, à l’une de leurs communes membres. À condition toutefois que celle-ci s’engage sur un « plan d’investissement » et un calendrier précis. Il s’agirait bien, précisons-le, d’une subdélégation, puisque l’EPCI resterait « responsable » de la compétence.
Tourisme et PLUI
Deux autres chevaux de bataille de l’AMF sont abordés dans ce texte : les compétences tourisme et la question des PLU intercommunaux. Les communes touristiques classées station de tourisme pourraient « décider par délibération de retrouver l’exercice de la compétence promotion du tourisme », y compris la création d’offices du tourisme.
Autre motif de tensions, pendant des années, entre les maires et l’État : la généralisation des PLU intercommunaux, datant de la loi Notre. Des aménagements sont proposées dans l’avant-projet de loi, afin de donner un droit de regard aux maires sur le PLUI. Un maire pourrait ainsi « prendre l’initiative d’un projet de modification simplifiée » concernant le territoire de sa commune, l’EPCI informant le maire des suites qu’il entend donner. Les règles d’adoption d’un PLUi à la suite de l’avis défavorable d’un maire, sur les dispositions concernant sa commune, seraient assouplies avec une adoption à la majorité simple, dès lors que le projet serait modifié pour tenir compte de cet avis. À défaut d’en tenir compte, le PLUi sera toujours arrêté à la majorité des deux-tiers.
Périmètre des EPCI
Le texte s’attaque enfin à l’épineuse question du périmètre des EPCI et en particulier des intercommunalités XXL. Premièrement, conformément aux demandes réitérées de l’AMF, il propose de supprimer la révision régulière (tous les six ans) du schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI). Le texte étend aussi la procédure de sortie dérogatoire d’une commune aux communautés d’agglomération : le préfet pourrait autoriser une commune qui en fait la demande à se retirer d’un EPCI pour adhérer à un autre – dès lors que ce retrait ne fait pas passer l’EPCI sous la barre des 15 000 habitants ou des autre seuils définis à l’article L 5216-1 du CGCT.
Enfin – plus important encore – le projet de loi évoque pour la première fois la possibilité de scinder un EPCI en deux établissements ou plus, ce qui pourrait permettre de résoudre la question des intercommunalités géantes et/ou créées après des procédures « forcées », où les petites communes se sentent noyées : « Des EPCI à fiscalité propre peuvent être créés par partage d’un EPCI existant », dans les mêmes conditions que pour la création d’un EPCI et « après avis de l’organe délibérant » de l’EPCI concerné.
Dans « chacun des nouveaux périmètres », il faudra satisfaire aux règles de majorité définies par l’article L5211-5 du CGCT, qui sont comme chacun sait relativement complexes. Rappelons-les : il faut réunir l’accord « de deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci, ou par la moitié au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population », comprenant obligatoirement « la commune dont la population est la plus nombreuse lorsque celle-ci est supérieure au quart de la population totale concernée ».
Alors que l’on attendait, à l’origine, un texte essentiellement consacré au statut de l’élu, le gouvernement a finalement choisi de traiter aussi, dans le même projet de loi, les fameux « irritants » de la loi Notre. Les deux tiers du texte, dans sa rédaction actuelle, sont ainsi consacrés d’une façon ou d’une autre à la question des relations entre communes et EPCI.
Pactes de gouvernance : une multitude d'options
Dès l’article 1er, le texte prévoit, après chaque renouvellement des exécutifs municipaux, l’élaboration au sein des EPCI d’un « pacte de gouvernance » entre les communes membres et l’EPCI. L’élaboration de ce pacte ne serait pas obligatoire.
Le pacte pourrait notamment prévoir la création d’un « conseil de maires », « instance de coordination entre l’EPCI et les communes membres » – qui resterait obligatoire dans les métropoles. En dehors d’autres dispositions adoptées dans le pacte de gouvernance, les conseils des maires deviendraient obligatoires dans les communautés urbaines, d’agglomération ou de communes, dès lors que « 30 % des maires des communes membres en ont fait la demande » par écrit.
Les pactes pourraient également prévoir la création de « conférences territoriales des maires », sur des périmètres infra communautaires, destinées à être consultées « lors de l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de l’EPCI ». Ils pourraient enfin permettre aux présidents d’EPCI de déléguer aux maires « certaines dépenses d’entretien courant d’infrastructures et de bâtiments communautaires ».
L’article 3 prévoit que les conseillers communautaires seront renouvelés « en cas d’élection d’un nouveau maire, pour quelque cause que ce soit ». L’article 4, organise le remplacement d’un élu au sein d’une commission de l’EPCI « par un conseiller municipal de sa commune ».
Eau et assainissement : enfin de la souplesse
L’un des points essentiels de ce texte est la décision prise par le gouvernement de réintroduire enfin un peu de souplesse dans le très controversé transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux EPCI. La première décision concerne les conditions du report à 2026 de ce transfert. Rappelons que selon la loi du 3 août 2018, les communes membres d’une communauté de communes peuvent décider du report à 2026 du transfert de la compétence si 25 % d’entre elles représentant au moins 20 % de la population le décident.
Cette disposition ne concernait jusqu’à présent que les communautés de communes « n’exerçant pas les compétences relatives à l’eau et/ou l’assainissement ». Le texte faciliterait les possibilités d’opposition des communes même lorsque la communauté de communes exerce « en partie seulement l’une ou l’autre » de ces compétences, ce qui revient à introduire des possibilités d’adaptation des transferts des compétences « eau et assainissement ».
Par ailleurs, le texte propose de donner six mois de plus aux EPCI pour décider, en reportant la date limite du choix du 1er juillet 2019 au 1er janvier 2020. Ce qui, soit dit en passant, pose tout de même un problème, vu que le texte n’a aucune chance d’être adopté avant le 1er juillet prochain.
Mais surtout, il est proposé dans le texte de permettre aux communautés de communes et d’agglomération de subdéléguer par convention l’une ou l’autre de ces compétences, ou les deux, à l’une de leurs communes membres. À condition toutefois que celle-ci s’engage sur un « plan d’investissement » et un calendrier précis. Il s’agirait bien, précisons-le, d’une subdélégation, puisque l’EPCI resterait « responsable » de la compétence.
Tourisme et PLUI
Deux autres chevaux de bataille de l’AMF sont abordés dans ce texte : les compétences tourisme et la question des PLU intercommunaux. Les communes touristiques classées station de tourisme pourraient « décider par délibération de retrouver l’exercice de la compétence promotion du tourisme », y compris la création d’offices du tourisme.
Autre motif de tensions, pendant des années, entre les maires et l’État : la généralisation des PLU intercommunaux, datant de la loi Notre. Des aménagements sont proposées dans l’avant-projet de loi, afin de donner un droit de regard aux maires sur le PLUI. Un maire pourrait ainsi « prendre l’initiative d’un projet de modification simplifiée » concernant le territoire de sa commune, l’EPCI informant le maire des suites qu’il entend donner. Les règles d’adoption d’un PLUi à la suite de l’avis défavorable d’un maire, sur les dispositions concernant sa commune, seraient assouplies avec une adoption à la majorité simple, dès lors que le projet serait modifié pour tenir compte de cet avis. À défaut d’en tenir compte, le PLUi sera toujours arrêté à la majorité des deux-tiers.
Périmètre des EPCI
Le texte s’attaque enfin à l’épineuse question du périmètre des EPCI et en particulier des intercommunalités XXL. Premièrement, conformément aux demandes réitérées de l’AMF, il propose de supprimer la révision régulière (tous les six ans) du schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI). Le texte étend aussi la procédure de sortie dérogatoire d’une commune aux communautés d’agglomération : le préfet pourrait autoriser une commune qui en fait la demande à se retirer d’un EPCI pour adhérer à un autre – dès lors que ce retrait ne fait pas passer l’EPCI sous la barre des 15 000 habitants ou des autre seuils définis à l’article L 5216-1 du CGCT.
Enfin – plus important encore – le projet de loi évoque pour la première fois la possibilité de scinder un EPCI en deux établissements ou plus, ce qui pourrait permettre de résoudre la question des intercommunalités géantes et/ou créées après des procédures « forcées », où les petites communes se sentent noyées : « Des EPCI à fiscalité propre peuvent être créés par partage d’un EPCI existant », dans les mêmes conditions que pour la création d’un EPCI et « après avis de l’organe délibérant » de l’EPCI concerné.
Dans « chacun des nouveaux périmètres », il faudra satisfaire aux règles de majorité définies par l’article L5211-5 du CGCT, qui sont comme chacun sait relativement complexes. Rappelons-les : il faut réunir l’accord « de deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci, ou par la moitié au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population », comprenant obligatoirement « la commune dont la population est la plus nombreuse lorsque celle-ci est supérieure au quart de la population totale concernée ».
Franck Lemarc
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