Édition du vendredi 14 septembre 2018
Le plan de lutte contre la pauvreté aura besoin des territoires
« Investir dans les solidarités pour l'émancipation de tous ». Le titre du plan de lutte contre la pauvreté, promis il y a un an, et dévoilé jeudi 13 septembre par le président de la République ne trompe pas : il ne portera ses fruits que sur la durée (sa mise en œuvre elle-même s'étale sur le quinquennat), il mise sur la prévention (en mettant l’accent par exemple sur le développement de l'accueil en crèche ou en rendant obligatoire la formation jusqu'à 18 ans), et fait de l'emploi le sésame pour une vie meilleure.
Une importante partie du plan concerne les crèches. 5 % des enfants défavorisés sont accueillis en crèche contre 22 % des enfants favorisés, selon une étude de la Drees de 2013. Le gouvernement veut réduire cet écart grâce à la création de nouvelles crèches là où elles font défaut, avec une aide financière à la clé. Il ne s’agit pas d’une nouveauté, même si les modélités doivent être précisées : la convention d'objectifs et de gestion signée en juillet entre l’État et la Cnaf évoque déjà cette mesure , avec la création de deux « bonus » pour les gestionnaires, un bonus mixité, pour augmenter l'accueil d'enfants de familles pauvres, et un bonus territoire, pour développer les crèches dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (lire Maire info du 20 juillet).
Autre écart à réduire, la maitrise du vocabulaire par les enfants, à l'entrée au CP, suivant le milieu social. 1000 mots séparent aujourd'hui le langage des enfants de milieux « défavorisés ». Le gouvernement veut s'inspirer de « Parler bambin » pour combler cet écart en changeant la pratique et la formation des professionnels de la petite enfance « Un référentiel pédagogique de la petite enfance sera élaboré sous l’égide du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge. Il sera déployé dans un plan exceptionnel de formation continue des 600 000 professionnels de la petite enfance, qui sera articulé avec les formations issues des assises de l’école maternelle pour les enseignants du 1er degré » précise le dossier de presse. Parler bambin a été à l'origine testé par la ville de Grenoble, dont Olivier Noblecourt, le délégué interministériel à la lutte contre la pauvreté, a été élu à l'action sociale… La politique sociale de la ville de Grenoble a d'ailleurs inspiré d'autres mesures de ce plan, comme les Points conseil budget, que le plan de lutte contre la pauvreté du précédent quinquennat avait déjà souhaité déployer.
Toujours sur la petite enfance, le plan veut « renforcer la transparence des modalités d'attribution des places de crèches ». Le gouvernement a pour cela confié avant l'été une mission à Élisabeth Laithier, co-présidente du groupe Petite enfance de l'AMF. Elle doit remettre son rapport début octobre. Ce volet enfance se complète de mesures axées sur l'école (maternelle et primaire), comme le dédoublement de classes dans l'éducation prioritaire (en cours de déploiement depuis la rentrée 2017) ou le renforcement du nombre d'adultes à l'école maternelle dans certains quartiers.
Les communes de moins de 10 000 habitants seront, elles, incitées à mettre en place des tarifs sociaux dans les cantines (pour proposer le tarif le plus bas à 1 euro maximum). La ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, a ce matin précisé sur France Inter que cela passerait par une aide financière dont les modalités restent également à préciser. À noter que lundi prochain s'ouvrent les travaux des ministères de l'Éducation nationale et de la Santé pour améliorer le parcours de santé des jeunes élèves.
S’appuyer sur les missions locales
L'innovation dans les territoires s'avère source d'inspiration aussi dans l'autre « gros » volet de ce plan, celui consacré à l'emploi et l'insertion. Initiée par l'association ATD Quart monde, l'expérimentation Territoires zéro chômeurs n'a pu se développer que grâce à l'engagement de collectivités locales, une dizaine aujourd'hui (pour 600 CDI créés). Le plan va offrir à d'autres l'opportunité de rejoindre l'expérience. Il est prévu « d'essaimer » l'initiative. Le fil rouge reste celui de la jeunesse, avec « un parcours de formation garanti pour tous les jeunes ». Le plan pauvreté doit permettre de renforcer l'accompagnement des jeunes « les plus vulnérables ». La Garantie jeunes va être dotée de 100 000 places supplémentaires par an. Les missions locales ne sont pas directement citées, mais c'est sur elles que reposera cette partie du plan. Plus globalement, le gouvernement veut instaurer une « obligation de formation jusqu'à 18 ans ». Là encore les missions locales seront au cœur de la mission de repérage et d'accompagnement. Le plan leur attribue 20 millions d'euros par an pour cela. Quel que soit l'âge, le plan de retour à l'emploi « des publics qui en sont le plus éloignés » mise sur le secteur de l'insertion par l'activité économique (100 000 postes d'insertion supplémentaires) et la création d'une « garantie d'activité », pilotée par Pôle emploi en lien avec les conseils départementaux, qui ressemble au dispositif d'accompagnement du RSA activité.
Territoires zéro non-recours
La présentation de ce plan se termine sur des chantiers sociaux. À commencer par la lutte contre le « non-recours », c’est-à-dire le fait que des personnes ne sollicitent pas les droits auxquels elles peuvent prétendre. Le plan a là aussi besoin des territoires, par exemple pour le développement des référents de parcours ou des « accueils sociaux inconditionnels », déjà amorcés sous le précédent quinquennat. Une expérimentation va être lancée dans 10 « territoires zéro non recours ». Toujours pour lutter contre le non-recours, l'aide à la complémentaire santé sera directement accessible via la CMU.
Au niveau national, le gouvernement veut enfin « simplifier et rendre plus équitable le système des minima sociaux » et propose pour cela d'aller « vers un revenu universel d’activité ». Il se substituerait « au maquis des prestations ». Autre chantier ouvert, le gouvernement propose aux « départements et collectivités qui le souhaitent » de s'engager sur des résultats, en contrepartie de moyens. Précisément, il s'agira d'un contrat signé avec l’État « qui permettra de mobiliser des moyens importants centrés sur des priorités partagées » et « sur un nombre limité d’objectifs (insertion, petite enfance, accompagnement social et éducatif, formation, accès aux droits, participation) ». Un fonds de lutte contre la pauvreté et d’accès à l’emploi, « doté de 200 millions d"euros à l’horizon du quinquennat », lui sera consacré.
Une importante partie du plan concerne les crèches. 5 % des enfants défavorisés sont accueillis en crèche contre 22 % des enfants favorisés, selon une étude de la Drees de 2013. Le gouvernement veut réduire cet écart grâce à la création de nouvelles crèches là où elles font défaut, avec une aide financière à la clé. Il ne s’agit pas d’une nouveauté, même si les modélités doivent être précisées : la convention d'objectifs et de gestion signée en juillet entre l’État et la Cnaf évoque déjà cette mesure , avec la création de deux « bonus » pour les gestionnaires, un bonus mixité, pour augmenter l'accueil d'enfants de familles pauvres, et un bonus territoire, pour développer les crèches dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (lire Maire info du 20 juillet).
Autre écart à réduire, la maitrise du vocabulaire par les enfants, à l'entrée au CP, suivant le milieu social. 1000 mots séparent aujourd'hui le langage des enfants de milieux « défavorisés ». Le gouvernement veut s'inspirer de « Parler bambin » pour combler cet écart en changeant la pratique et la formation des professionnels de la petite enfance « Un référentiel pédagogique de la petite enfance sera élaboré sous l’égide du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge. Il sera déployé dans un plan exceptionnel de formation continue des 600 000 professionnels de la petite enfance, qui sera articulé avec les formations issues des assises de l’école maternelle pour les enseignants du 1er degré » précise le dossier de presse. Parler bambin a été à l'origine testé par la ville de Grenoble, dont Olivier Noblecourt, le délégué interministériel à la lutte contre la pauvreté, a été élu à l'action sociale… La politique sociale de la ville de Grenoble a d'ailleurs inspiré d'autres mesures de ce plan, comme les Points conseil budget, que le plan de lutte contre la pauvreté du précédent quinquennat avait déjà souhaité déployer.
Toujours sur la petite enfance, le plan veut « renforcer la transparence des modalités d'attribution des places de crèches ». Le gouvernement a pour cela confié avant l'été une mission à Élisabeth Laithier, co-présidente du groupe Petite enfance de l'AMF. Elle doit remettre son rapport début octobre. Ce volet enfance se complète de mesures axées sur l'école (maternelle et primaire), comme le dédoublement de classes dans l'éducation prioritaire (en cours de déploiement depuis la rentrée 2017) ou le renforcement du nombre d'adultes à l'école maternelle dans certains quartiers.
Les communes de moins de 10 000 habitants seront, elles, incitées à mettre en place des tarifs sociaux dans les cantines (pour proposer le tarif le plus bas à 1 euro maximum). La ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, a ce matin précisé sur France Inter que cela passerait par une aide financière dont les modalités restent également à préciser. À noter que lundi prochain s'ouvrent les travaux des ministères de l'Éducation nationale et de la Santé pour améliorer le parcours de santé des jeunes élèves.
S’appuyer sur les missions locales
L'innovation dans les territoires s'avère source d'inspiration aussi dans l'autre « gros » volet de ce plan, celui consacré à l'emploi et l'insertion. Initiée par l'association ATD Quart monde, l'expérimentation Territoires zéro chômeurs n'a pu se développer que grâce à l'engagement de collectivités locales, une dizaine aujourd'hui (pour 600 CDI créés). Le plan va offrir à d'autres l'opportunité de rejoindre l'expérience. Il est prévu « d'essaimer » l'initiative. Le fil rouge reste celui de la jeunesse, avec « un parcours de formation garanti pour tous les jeunes ». Le plan pauvreté doit permettre de renforcer l'accompagnement des jeunes « les plus vulnérables ». La Garantie jeunes va être dotée de 100 000 places supplémentaires par an. Les missions locales ne sont pas directement citées, mais c'est sur elles que reposera cette partie du plan. Plus globalement, le gouvernement veut instaurer une « obligation de formation jusqu'à 18 ans ». Là encore les missions locales seront au cœur de la mission de repérage et d'accompagnement. Le plan leur attribue 20 millions d'euros par an pour cela. Quel que soit l'âge, le plan de retour à l'emploi « des publics qui en sont le plus éloignés » mise sur le secteur de l'insertion par l'activité économique (100 000 postes d'insertion supplémentaires) et la création d'une « garantie d'activité », pilotée par Pôle emploi en lien avec les conseils départementaux, qui ressemble au dispositif d'accompagnement du RSA activité.
Territoires zéro non-recours
La présentation de ce plan se termine sur des chantiers sociaux. À commencer par la lutte contre le « non-recours », c’est-à-dire le fait que des personnes ne sollicitent pas les droits auxquels elles peuvent prétendre. Le plan a là aussi besoin des territoires, par exemple pour le développement des référents de parcours ou des « accueils sociaux inconditionnels », déjà amorcés sous le précédent quinquennat. Une expérimentation va être lancée dans 10 « territoires zéro non recours ». Toujours pour lutter contre le non-recours, l'aide à la complémentaire santé sera directement accessible via la CMU.
Au niveau national, le gouvernement veut enfin « simplifier et rendre plus équitable le système des minima sociaux » et propose pour cela d'aller « vers un revenu universel d’activité ». Il se substituerait « au maquis des prestations ». Autre chantier ouvert, le gouvernement propose aux « départements et collectivités qui le souhaitent » de s'engager sur des résultats, en contrepartie de moyens. Précisément, il s'agira d'un contrat signé avec l’État « qui permettra de mobiliser des moyens importants centrés sur des priorités partagées » et « sur un nombre limité d’objectifs (insertion, petite enfance, accompagnement social et éducatif, formation, accès aux droits, participation) ». Un fonds de lutte contre la pauvreté et d’accès à l’emploi, « doté de 200 millions d"euros à l’horizon du quinquennat », lui sera consacré.
Cette notion d'obligation de résultats, à n'en pas douter, risque de faire débat : il ne serait pas surprenant que les associations d'élus s'y opposent - d'autant plus si, comme cela semble se dessiner, cette obligation était assortie de pénalités en cas de non-respect.
E.S.
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