Édition du jeudi 4 février 2016
Le gouvernement propose de durcir l'arsenal législatif antiterroriste
Au Conseil des ministres d’hier, le nouveau garde des Sceaux, Jean-Jacques Urvoas, a présenté le projet de loi de réforme de la procédure pénale et « renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement ». Ce texte a été aussitôt transmis à l’Assemblée nationale. Un autre texte très attendu a été annoncé – mais non publié : celui qui concerne la révision constitutionnelle.
Le projet de loi sur la procédure pénale (34 articles) couvre de nombreux domaines : lutte contre le blanchiment et le trafic d’armes, cybercriminalité, protection des témoins… Mais il contient aussi beaucoup de dispositions qui apparaissent comme une forme de prolongation à titre permanent de l’état d’urgence. Ainsi, l’article 1 assouplit le régime des perquisitions de nuit dans le cadre d’enquête sur le terrorisme ; le chapitre V du texte, « renforçant l’enquête et les contrôles administratifs », prévoit de faciliter « l’inspection et la fouille des bagages ». L’article 18 – l’un de ceux qui fera probablement le plus débat – autoriserait les forces de l’ordre « à l’occasion d’un contrôle ou d’une vérification d’identité, de retenir une personne lorsqu’il y a des raisons sérieuses de penser que son comportement est lié à des activités à caractère terroriste, le temps nécessaire à l’examen de sa situation », pendant un maximum de 4 heures, y compris pour les mineurs. Serait également rendue possible, toujours sur la base de « raisons sérieuses de penser », l’assignation à résidence pendant un mois de personnes revenant de « déplacements à l’étranger sur un théâtre d’opérations de groupements terroristes ». C’est notamment à propos de cette disposition que Jacques Toubon, le Défenseur des droits, parle « d’entrée dans l’ère du soupçon » (lire article ci-dessus).
Autre article qui sera très discuté : l’article 19, qui porte sur une extension du régime de la légitime défense. Afin d’éviter qu’un membre des forces de l’ordre puisse être condamné pour avoir fait usage de son arme hors de la stricte légitime défense, le gouvernement propose de permettre un usage des armes dans un cas précis : un policier ou un gendarme pourrait tirer sur un individu, y compris s’il est en train de s’enfuir, dans le cas où l’individu vient de commettre « un ou plusieurs homicides » et où « il existe des raisons réelles et objectives de penser que le ou les mêmes auteurs qui viennent de commettre les premiers actes sont susceptibles de réitérer ces actes dans un temps rapproché ». Cette disposition ne s’appliquerait donc pas uniquement en matière de terrorisme, mais pourrait également s’appliquer dans les affaires de droit commun (banditisme). Le texte est parfaitement clair sur le champ d’application de cette disposition : police et gendarmerie nationales, militaires déployés dans le cadre de Vigipirate, agents des douanes. Les policiers municipaux ne seraient donc pas concernés.
Autres annonces du gouvernement, hier : celles concernant la révision de la Constitution. Un premier projet de loi sera présenté « pour compléter le régime juridique de l’état d’urgence », avec l’instauration de « nouvelles mesures apparues nécessaires au cours de la mise en œuvre récente de ce régime » : saisie administrative des biens découverts à l’occasion d’une perquisition, mais aussi création d’un régime intermédiaire permettant « d’imposer une série d’obligations » à un individu soupçonné « sans nécessairement l’assigner à résidence ».
Par ailleurs, le gouvernement a confirmé sa volonté de modifier le régime de la déchéance de nationalité. Comme prévu (lire Maire info du 28 janvier) le texte qui sera présenté va proposer « d’unifier les régimes de déchéance aux personnes condamnées quelle que soit l’origine de leur appartenance à la Nation » (pas question donc de ne l’appliquer qu’aux binationaux) ; mais… sera « engagée la ratification de la convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie », ce qui aurait pour conséquence d’interdire à l’État français de créer des apatrides, et donc d’appliquer la déchéance de nationalité à des citoyens n’ayant que la seule nationalité française.
Il n’est pas sûr que ce stratagème du gouvernement, censé convaincre le plus grand nombre possible de députés, fonctionne. Alors que, au lendemain des attentats, la probabilité semblait importante pour que le gouvernement trouve au Parlement une majorité des trois cinquièmes, cette possibilité semble s’amenuiser de jour en jour. S’ils estiment que cette majorité des trois cinquièmes risque de ne pas être réunie, il reste toujours à François Hollande et Manuel Valls la possibilité d’organiser un référendum, si le texte a été adopté par les deux assemblées, à la majorité simple, en des termes identiques.
Le projet de loi sur la procédure pénale (34 articles) couvre de nombreux domaines : lutte contre le blanchiment et le trafic d’armes, cybercriminalité, protection des témoins… Mais il contient aussi beaucoup de dispositions qui apparaissent comme une forme de prolongation à titre permanent de l’état d’urgence. Ainsi, l’article 1 assouplit le régime des perquisitions de nuit dans le cadre d’enquête sur le terrorisme ; le chapitre V du texte, « renforçant l’enquête et les contrôles administratifs », prévoit de faciliter « l’inspection et la fouille des bagages ». L’article 18 – l’un de ceux qui fera probablement le plus débat – autoriserait les forces de l’ordre « à l’occasion d’un contrôle ou d’une vérification d’identité, de retenir une personne lorsqu’il y a des raisons sérieuses de penser que son comportement est lié à des activités à caractère terroriste, le temps nécessaire à l’examen de sa situation », pendant un maximum de 4 heures, y compris pour les mineurs. Serait également rendue possible, toujours sur la base de « raisons sérieuses de penser », l’assignation à résidence pendant un mois de personnes revenant de « déplacements à l’étranger sur un théâtre d’opérations de groupements terroristes ». C’est notamment à propos de cette disposition que Jacques Toubon, le Défenseur des droits, parle « d’entrée dans l’ère du soupçon » (lire article ci-dessus).
Autre article qui sera très discuté : l’article 19, qui porte sur une extension du régime de la légitime défense. Afin d’éviter qu’un membre des forces de l’ordre puisse être condamné pour avoir fait usage de son arme hors de la stricte légitime défense, le gouvernement propose de permettre un usage des armes dans un cas précis : un policier ou un gendarme pourrait tirer sur un individu, y compris s’il est en train de s’enfuir, dans le cas où l’individu vient de commettre « un ou plusieurs homicides » et où « il existe des raisons réelles et objectives de penser que le ou les mêmes auteurs qui viennent de commettre les premiers actes sont susceptibles de réitérer ces actes dans un temps rapproché ». Cette disposition ne s’appliquerait donc pas uniquement en matière de terrorisme, mais pourrait également s’appliquer dans les affaires de droit commun (banditisme). Le texte est parfaitement clair sur le champ d’application de cette disposition : police et gendarmerie nationales, militaires déployés dans le cadre de Vigipirate, agents des douanes. Les policiers municipaux ne seraient donc pas concernés.
Autres annonces du gouvernement, hier : celles concernant la révision de la Constitution. Un premier projet de loi sera présenté « pour compléter le régime juridique de l’état d’urgence », avec l’instauration de « nouvelles mesures apparues nécessaires au cours de la mise en œuvre récente de ce régime » : saisie administrative des biens découverts à l’occasion d’une perquisition, mais aussi création d’un régime intermédiaire permettant « d’imposer une série d’obligations » à un individu soupçonné « sans nécessairement l’assigner à résidence ».
Par ailleurs, le gouvernement a confirmé sa volonté de modifier le régime de la déchéance de nationalité. Comme prévu (lire Maire info du 28 janvier) le texte qui sera présenté va proposer « d’unifier les régimes de déchéance aux personnes condamnées quelle que soit l’origine de leur appartenance à la Nation » (pas question donc de ne l’appliquer qu’aux binationaux) ; mais… sera « engagée la ratification de la convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie », ce qui aurait pour conséquence d’interdire à l’État français de créer des apatrides, et donc d’appliquer la déchéance de nationalité à des citoyens n’ayant que la seule nationalité française.
Il n’est pas sûr que ce stratagème du gouvernement, censé convaincre le plus grand nombre possible de députés, fonctionne. Alors que, au lendemain des attentats, la probabilité semblait importante pour que le gouvernement trouve au Parlement une majorité des trois cinquièmes, cette possibilité semble s’amenuiser de jour en jour. S’ils estiment que cette majorité des trois cinquièmes risque de ne pas être réunie, il reste toujours à François Hollande et Manuel Valls la possibilité d’organiser un référendum, si le texte a été adopté par les deux assemblées, à la majorité simple, en des termes identiques.
Franck Lemarc
Télécharger le projet de loi de réforme pénale.Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2
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