Édition du jeudi 5 février 2009
Le conseil général du Jura refuse à nouveau l'agrément pour adoption à un couple homosexuel
Le conseil général du Jura a opposé le 28 janvier dernier un second refus d'agrément pour l'adoption à Emmanuelle B., tout juste un an après l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH, 22 janvier 2008) qui condamnait la France pour discrimination basée sur l'orientation sexuelle.
Suite à cet arrêt, Emmanuelle B., dont l'agrément avait été refusé par le même département du Jura en 1998 à cause de son homosexualité, avait déposé une nouvelle demande d'agrément le 28 avril 2008.
Les avis des enquêtes sociale et psychologique, menées pendant neuf mois et au cours desquelles Emmanuelle B. et sa compagne Laurence R. ont été entendues toutes deux, étaient favorables. Les deux femmes avaient en outre demandé à être reçues par la commission d'agrément, une audition non-obligatoire, qui a duré une dizaine de minutes.
Le conseil général du Jura a cependant de nouveau refusé l'agrément, estimant que la compagne d'Emmanuelle B. ne serait pas impliquée dans le projet et qu'il existerait un désaccord dans le couple sur l'âge de l'enfant à adopter.
Emmanuelle B. vient de saisir la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour légalité (HALDE).
Après un arrêt du tribunal administratif de Besançon qui avait annulé cette décision du président du conseil général le 24 février 2000, la cour administrative dappel de Nancy avait annulé le jugement, puis, le 5 juin 2002, le Conseil dEtat avait rejeté le pourvoi, au motif quil ne sagissait pas dune position de principe concernant les orientations sexuelles de lintéressée, mais de lappréciation des besoins et de lintérêt dun enfant adopté. Doù la saisine de la Cour européenne des droits de l'homme, qui sétait prononcée le 22 janvier 2008.
Pour la CEDH, la référence à lhomosexualité de la requérante était implicite mais certaine, et linfluence de son homosexualité sur lappréciation de sa demande par le conseil général avait revêtu un caractère décisif. Elle avait jugé que, la discrimination portant uniquement sur lorientation sexuelle, elle devait reposer, pour être légitime, sur des raisons particulièrement graves et convaincantes.
Or, estimait la Cour, de telles raisons nexistaient pas puisque le droit français autorise ladoption dun enfant par un célibataire, ouvrant ainsi la voie à ladoption par une personne célibataire homosexuelle. De plus, le Code civil français ne précise pas la nécessité dun référent de lautre sexe et, par ailleurs, la requérante présentait, pour reprendre les termes de larrêt du Conseil dEtat, «des qualités humaines et éducatives certaines».
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