Édition du jeudi 29 mars 2018
La profonde colère des maires de banlieue
Rien ne va plus entre nombre de maires de banlieue et le gouvernement. La démission, avant-hier, du maire de Sevran, Stéphane Gatignon, est le symptôme d’un mal plus profond et d’un désarroi total de beaucoup d’élus face à ce qu’ils appellent « le mépris » du gouvernement.
Cette crise intervient dans un contexte particulier : déjà, en octobre dernier, une centaine de maires de banlieue lançaient « l’appel de Grigny » et demandaient « un sursaut national » et « un plan national de solidarité ». Le gouvernement a, lui, promis un « plan banlieues » pour ce printemps, et dans quelques jours, l’ancien maire de Valenciennes et ancien ministre de la Ville Jean-Louis Borloo doit rendre un rapport très attendu sur ce sujet.
Le premier signe annonciateur de la tempête remonte déjà à une quinzaine de jours : le 15 mars, une cinquantaine d’élus sortent « furieux » d’une réunion avec le ministre de la Cohésion des territoires, Jacques Mézard, et le font savoir dans la presse. Dans Le Monde, ils parlent de « douche froide », « d’humiliation » et de « mépris ». « Le contrat de confiance est rompu », dira un élu dans le Journal du dimanche.
Puis avant-hier, au conseil municipal de Sevran (Seine-Saint-Denis), le maire, Stéphane Gatignon, annonce sa démission, se disant dégoûté du « mépris de l’État » et « usé par les blocages qui viennent d’en haut ». Interrogé par Le Monde le jour de sa démission, le maire de Sevran ne mâche pas ses mots, dénonçant notamment l’exigence du gouvernement de « tenir » la hausse des dépenses de fonctionnement sous la barre des 1,2 % inflation comprise : « J’avais dit (…) que je démissionnerai le jour où je n’y croirais plus. Nous y sommes. Aujourd’hui, les villes de banlieue sont tenues à la gorge. La loi de finances 2018 nous impose de ne pas augmenter nos budgets de fonctionnement de plus de 1,2 % : si le gouvernement ne revient pas sur cette mesure, on est morts. »
La démarche de Stéphane Gatignon n’est visiblement pas un coup de colère individuel. D’autres élus, de tendances politiques différentes de la sienne, se sont aussitôt exprimés pour dire aussi leur ras-le-bol. C’est le cas de Catherine Arenou (LR), maire de Chanteloup-les-Vignes et membre du comité directeur de l’AMF. Si elle ne soutient pas sa démarche de démission, elle comprend – et partage – son amertume « Ces combats, on les a menés ensemble, a-t-elle déclaré hier. Quel gâchis ! C’est la première fois que j’ai l’impression que (notre) combat ne sert à rien. C’est dur. »
Hier, l’association Ville et banlieues publiait une tribune de solidarité avec Stéphane Gatignon. « Nous, maires et conseillers municipaux et intercommunaux des banlieues, des centres anciens dégradés, des quartiers populaires des périphéries urbaines autant que des centre-bourgs ruraux, sommes tous des Stéphane Gatignon. Nous n’en pouvons plus. » Ces élus rappellent que le maire est celui « qui résiste le mieux à la perte de crédit dans la chose publique. Pourtant, l’un des nôtres a jeté l’éponge ». La colère se ressent à chaque ligne de cette tribune – parfois violente vis-à-vis de l’exécutif. Quant à la revendication, elle est conforme à ce que demande Stéphane Gatignon : « Nous portons l’exigence d’une dérogation pour nos communes aux règles du pacte de confiance État-collectivités. »
Enfin, hier toujours, des élus de toute tendance de la Seine-Saint-Denis ont adressé une « lettre ouverte » à Emmanuel Macron, intitulée « M. le président, la rénovation urbaine est en danger ». Des élus socialistes (Sylvine Thomassin, maire de Bondy ou Stéphane Troussel, président du département), communiste (Patrick Braouzec, président de l’EPT Plaine commune) ou LR (Bruno Beschizza, maire d’Aulnay-sous-Bois), réclament des moyens pour les quartiers populaires et « un soutien financier hors normes ». Ils pointent notamment les effets de la décision gouvernementale de diminuer les APL aux frais des bailleurs sociaux : « Sous les effets conjugués de l’application loi de finances 2018 et de la dégradation des financements de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), les bailleurs qui portent l’essentiel de l’effort financier nous alertent sur leurs difficultés à boucler le financement du nouveau programme ».
Il faut maintenant attendre la présentation du plan Borloo et surtout la réaction du gouvernement à ce plan. C’est ce que dit Stéphane Gatignon : le Plan Borloo, « c’est notre dernier espoir, celui de la dernière chance. Si Macron ne suit pas les préconisations de Borloo, cela veut dire que l’État laisse tomber les banlieues et leurs 5,5 millions d’habitants. »
Le gouvernement va-t-il entendre la colère et la détresse des maires de banlieue ? Réponse, sans doute, dès le début avril.
Cette crise intervient dans un contexte particulier : déjà, en octobre dernier, une centaine de maires de banlieue lançaient « l’appel de Grigny » et demandaient « un sursaut national » et « un plan national de solidarité ». Le gouvernement a, lui, promis un « plan banlieues » pour ce printemps, et dans quelques jours, l’ancien maire de Valenciennes et ancien ministre de la Ville Jean-Louis Borloo doit rendre un rapport très attendu sur ce sujet.
Le premier signe annonciateur de la tempête remonte déjà à une quinzaine de jours : le 15 mars, une cinquantaine d’élus sortent « furieux » d’une réunion avec le ministre de la Cohésion des territoires, Jacques Mézard, et le font savoir dans la presse. Dans Le Monde, ils parlent de « douche froide », « d’humiliation » et de « mépris ». « Le contrat de confiance est rompu », dira un élu dans le Journal du dimanche.
Puis avant-hier, au conseil municipal de Sevran (Seine-Saint-Denis), le maire, Stéphane Gatignon, annonce sa démission, se disant dégoûté du « mépris de l’État » et « usé par les blocages qui viennent d’en haut ». Interrogé par Le Monde le jour de sa démission, le maire de Sevran ne mâche pas ses mots, dénonçant notamment l’exigence du gouvernement de « tenir » la hausse des dépenses de fonctionnement sous la barre des 1,2 % inflation comprise : « J’avais dit (…) que je démissionnerai le jour où je n’y croirais plus. Nous y sommes. Aujourd’hui, les villes de banlieue sont tenues à la gorge. La loi de finances 2018 nous impose de ne pas augmenter nos budgets de fonctionnement de plus de 1,2 % : si le gouvernement ne revient pas sur cette mesure, on est morts. »
La démarche de Stéphane Gatignon n’est visiblement pas un coup de colère individuel. D’autres élus, de tendances politiques différentes de la sienne, se sont aussitôt exprimés pour dire aussi leur ras-le-bol. C’est le cas de Catherine Arenou (LR), maire de Chanteloup-les-Vignes et membre du comité directeur de l’AMF. Si elle ne soutient pas sa démarche de démission, elle comprend – et partage – son amertume « Ces combats, on les a menés ensemble, a-t-elle déclaré hier. Quel gâchis ! C’est la première fois que j’ai l’impression que (notre) combat ne sert à rien. C’est dur. »
Hier, l’association Ville et banlieues publiait une tribune de solidarité avec Stéphane Gatignon. « Nous, maires et conseillers municipaux et intercommunaux des banlieues, des centres anciens dégradés, des quartiers populaires des périphéries urbaines autant que des centre-bourgs ruraux, sommes tous des Stéphane Gatignon. Nous n’en pouvons plus. » Ces élus rappellent que le maire est celui « qui résiste le mieux à la perte de crédit dans la chose publique. Pourtant, l’un des nôtres a jeté l’éponge ». La colère se ressent à chaque ligne de cette tribune – parfois violente vis-à-vis de l’exécutif. Quant à la revendication, elle est conforme à ce que demande Stéphane Gatignon : « Nous portons l’exigence d’une dérogation pour nos communes aux règles du pacte de confiance État-collectivités. »
Enfin, hier toujours, des élus de toute tendance de la Seine-Saint-Denis ont adressé une « lettre ouverte » à Emmanuel Macron, intitulée « M. le président, la rénovation urbaine est en danger ». Des élus socialistes (Sylvine Thomassin, maire de Bondy ou Stéphane Troussel, président du département), communiste (Patrick Braouzec, président de l’EPT Plaine commune) ou LR (Bruno Beschizza, maire d’Aulnay-sous-Bois), réclament des moyens pour les quartiers populaires et « un soutien financier hors normes ». Ils pointent notamment les effets de la décision gouvernementale de diminuer les APL aux frais des bailleurs sociaux : « Sous les effets conjugués de l’application loi de finances 2018 et de la dégradation des financements de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), les bailleurs qui portent l’essentiel de l’effort financier nous alertent sur leurs difficultés à boucler le financement du nouveau programme ».
Il faut maintenant attendre la présentation du plan Borloo et surtout la réaction du gouvernement à ce plan. C’est ce que dit Stéphane Gatignon : le Plan Borloo, « c’est notre dernier espoir, celui de la dernière chance. Si Macron ne suit pas les préconisations de Borloo, cela veut dire que l’État laisse tomber les banlieues et leurs 5,5 millions d’habitants. »
Le gouvernement va-t-il entendre la colère et la détresse des maires de banlieue ? Réponse, sans doute, dès le début avril.
F.L.
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