Édition du lundi 26 septembre 2005
La France confrontée à un réseau ferré vieillissant faute d'investissements
La France, qui se targue souvent de son savoir-faire ferroviaire, se retrouve confrontée à un réseau ferré vieillissant faute d'investissements publics suffisants dans la maintenance des infrastructures.
«L'état moyen de l'infrastructure, sur une part importante du réseau, se dégrade continuellement et les prémices d'une dégénérescence apparaissent», prévient un audit publié cette semaine et commandé par la SNCF et par RFF à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne.
Des trains sont déjà obligés de ralentir sur plusieurs centaines de kilomètres de voies secondaires en mauvais état. Si rien n'est fait, 60% du réseau actuel ne sera plus exploité à l'horizon 2025, ne laissant en état de fonctionner que les lignes à grande vitesse et quelques grands axes, selon le scénario le plus noir.
Le réseau ferroviaire français est «dans un état de vétusté proche des infrastructures de certains pays d'Europe de l'Est, comme la Pologne», a jugé la semaine dernière le vice-président de la commission des transports du Parlement européen, le socialiste français Gilles Savary.
Pourtant, la SNCF et RFF, gestionnaire de l'infrastructure depuis 1997, ont «fourni leurs meilleurs efforts» pour assurer le fonctionnement et la sécurité sur les quelque 30.000 km de lignes, assurent les auditeurs. Mais elles ont bénéficié de «ressources nettement insuffisantes pour la maintenance (entretien et renouvellement) de l'infrastructure durant les 30 dernières années».
«Depuis 20 ans, les investissements dans l'entretien du réseau ferroviaire sont inférieurs de moitié à ce qu'ils devraient être», selon la Fédération nationale des travaux publics (FNTP).
La France dépense moins en moyenne pour ses lignes de chemin de fer que l'Italie, l'Espagne, la Suisse mais aussi la Grande-Bretagne. Elle investit aussi moins dans les gros travaux de remplacement notamment des voies, qui ne représentent qu'un tiers de ses efforts de maintenance contre deux tiers dans les autres réseaux européens, privilégiant l'entretien courant.
Or, «un patrimoine ancien exige plus d'entretien et finira, un jour ou l'autre, par devoir de toute manière être remplacé», soulignent les auditeurs.
Détectée trop tard, cette dérive «entraîne la ruine du réseau ferré et une dégradation de la sécurité et de la fiabilité des circulations». Elle induit à terme des besoins financiers colossaux de réhabilitation, de surcroît rapidement mobilisables. «La Grande-Bretagne en a fait l'amère expérience», rappellent-ils.
L'audit évalue les budgets nécessaires «de l'ordre de 3,1 milliards deuros par an» à l'horizon 2015-2020 et un effort annuel supplémentaire «d'environ 350 milliards deuros» entre 2011 et 2015. Pour 2005, l'enveloppe pour la maintenance du réseau atteint 2,7 milliards deuros.
Le ministère des Transports a annoncé une rallonge de 70 millions d'euros pour les dépenses de maintenance en 2006, ne se prononçant pas pour la suite.
Les experts suggèrent aussi des gains de productivité et une éventuelle suppression de lignes à faible trafic. Le ministre des Transports Dominique Perben a demandé lundi à la SNCF et à RFF de proposer un plan 2006-2010 sur la base de ces recommandations.
«Nous travaillons déjà avec RFF», notamment sur l'allongement des plages horaires de travaux, a affirmé le président de la SNCF Louis Gallois dans La Tribune de jeudi. Mais il va devoir attendre pour en discuter davantage l'arrivée du nouveau président de RFF, le gouvernement ayant mis fin aux fonctions de Jean-Pierre Duport.
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