Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 4 octobre 2004

Haute autorité de lutte contre les discriminations: les députés se saisissent du texte

Les députés vont véritablement commencer les travaux législatifs de la nouvelle session parlementaire avec l'examen, mardi, du projet de loi créant une Haute autorité de lutte contre les discriminations, annoncée il y a deux ans par le président Jacques Chirac. Les débats, qui s'achèveront au plus tard mercredi, s'annoncent plutôt consensuels: Patrick Bloche, porte-parole du groupe PS sur ce texte, souligne que les socialistes sont "favorables sur le principe" à cette initiative, même s'ils se posent des questions sur son "utilité réelle". Réclamée par de nombreuses associations, la création de cette autorité indépendante avait été annoncée par M. Chirac lors d'un discours sur l'intégration des immigrés prononcé en octobre 2002 à Troyes, et confirmée en décembre dernier dans son allocution sur la laïcité. Présenté en Conseil des ministres au lendemain du 14 Juillet, le projet de loi reprend pour l'essentiel les conclusions d'une mission confiée à l'ancien Médiateur de la République, Bernard Stasi. Il doit ainsi permettre à la France de se conformer à des directives européennes prises en application du traité d'Amsterdam. Baptisée Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, l'institution aura compétence sur toute forme de discrimination légale, qu'elle soit fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge, ou l'orientation sexuelle. Elle sera composée de onze membres, huit nommés par le pouvoir politique (chef de l'Etat, Premier ministre, présidents des deux assemblées), les trois autres par les présidents du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation, du Conseil économique et social. La Haute autorité, qui pourra être saisie directement par les plaignants, devra favoriser la résolution amiable des différends, par voie de médiation. Mais le texte lui donne également tout pouvoir pour saisir le parquet pour des faits de discrimination, et aider les victimes à préparer leurs dossiers. Sans disposer de pouvoirs de police judiciaire, elle bénéficiera de moyens d'investigation auprès de l'administration et des personnes privées, et pourra exiger des documents administratifs ou professionnels. En cas d'obstruction, elle sera habilitée à saisir le juge des référés. A l'image d'un collectif d'associations qui redoute que l'institution soit "une coquille vide", M. Bloche craint qu'elle ne soit qu'un "super observatoire", permettant seulement de voir, au fil de ses rapports annuels, "si les discriminations reculent ou progressent". Bien que prévoyant un vote positif des socialistes, le député PS s'inquiète surtout de la composition de la Haute autorité qu'il juge "très institutionnelle", et souhaite y voir siéger des "représentants de la société civile". Rejetant cette critique, le président de la commission des lois, Pascal Clément (UMP), également rapporteur du texte, se dit hostile à l'intégration de droit des associations, "par définition militantes", mais souligne que cette instance pourra "travailler en association étroite" avec elles. M. Clément craint en revanche que l'autorité soit "submergée de demandes", car "beaucoup de gens s'appuieront sur la discrimination pour contester une décision administrative". Avec un budget annuel qui devrait s'élever à 10,7 millions d'euros, la secrétaire d'Etat à l'Intégration, Catherine Vautrin, affirme que la Haute autorité aura "les moyens de travailler" et de "recruter les collaborateurs nécessaires".

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