Édition du jeudi 25 février 2010
Exception d'inconstitutionnalité: le Conseil d'État se dit prêt
Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d'État, Bernard Stirn, président de la section du contentieux au Conseil d'État, et Jacques Arrighi de Casanova, président-adjoint de la section du contentieux, ont indiqué à l'occasion d'une conférence de presse que la juridiction administrative était «prête pour examiner les questions prioritaires de constitutionnalité qui lui seront alors soumises, dans les conditions et les délais prévus par la loi organique».
On le sait, à compter du 1er mars prochain, comme le prévoit la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, tout justiciable, particulier, entité publique ou privée, aura la possibilité de soutenir, à loccasion dune instance en cours devant une juridiction administrative ou judiciaire, «quune disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit», selon les nouveaux termes de larticle 61-1 de la Constitution.
Si le Conseil constitutionnel estime effectivement que la disposition législative ainsi mise en cause nest pas conforme à la Constitution, son application sera non seulement écartée dans le procès concerné mais, ainsi que le prévoit larticle 62 de la Constitution, elle sera abrogée.
Les conditions dans lesquelles une «question prioritaire de constitutionnalité» peut ainsi être posée au juge ont été organisées par la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à lapplication de larticle 61-1 de la Constitution. La loi a prévu quune telle question devra faire lobjet dun double filtre par le juge du fond, tout dabord, puis ensuite par le Conseil dEtat ou la Cour de cassation, selon la nature de la juridiction devant laquelle la question aura été posée.
Selon le Conseil dEtat, «il ne sagit pas, à proprement parler, dune question préjudicielle que le juge naurait été tenu de transmettre que pour autant quelle aurait commandé lissue du litige dont il est saisi. Il sagit dune question prioritaire de constitutionnalité qui doit être examinée sans délai par les juridictions de fond et transmise au Conseil dEtat ou à la Cour de cassation si les trois conditions posées par la loi organique savèrent remplies.»:
- la disposition contestée doit être «applicable au litige»;
- elle ne doit pas avoir «déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif dune décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances»;
- elle ne doit pas être «dépourvue de caractère sérieux».
Le Conseil dEtat ou la Cour de cassation sont, quant à eux, chargés, dans un délai de trois mois, de vérifier les deux premières conditions et sagissant de la troisième, dapprécier si «la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux».
Si ces conditions sont remplies, la question doit être transmise au Conseil constitutionnel qui dispose lui-même également dun délai de trois mois, pour se prononcer.
Le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 (voir nos autres infos de ce jour) a précisé les modalités procédurales selon lesquelles les «questions prioritaires de constitutionnalité» devront être présentées par les parties et examinées par le juge. Sagissant des tribunaux administratifs, des cours administratives dappel et du Conseil dEtat, ce décret ajoute ainsi un nouveau chapitre au Code de justice administrative.
«La juridiction administrative est prête pour examiner les questions prioritaires de constitutionnalité qui lui seront alors soumises, dans les conditions et les délais prévus par la loi organique. Elle le fera, consciente de la responsabilité qui est la sienne dans la garantie de lEtat de droit.», ont conclu les magistrats.
Pour accéder au décret n° 2010-148 du 16 février 2010, voir lien ci-dessous.
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