Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 1er février 2005
Logement

Encore trois millions de personnes dans des conditions de logement très précaires

Plus de trois millions de personnes en France vivent dans des conditions de logement très précaires, et plus de cinq millions d'autres pourraient basculer dans cette situation "à court ou moyen terme", notamment des personnes hébergées par des tiers faute de mieux, selon le 10e rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre sur le mal-logement. Le rapport sera présenté lors d'un colloque à Paris mardi. Sur près d'un million de personnes hébergées par des tiers (973 000 selon l'INSEE), la fondation en recense 150 000 à 300 000 qui le sont "faute d'autres solutions et qui vivent dans des conditions de logement peu acceptables". La Fondation dénonce, cette année encore, une "pénurie persistante" de 500 000 logements sociaux. Et si le plan de cohésion sociale de Jean-Louis Borloo prévoit leur construction dans les cinq prochaines années, l'association estime que cet objectif ne pourra être atteint qu'avec de nouvelles mesures, et seulement si les collectivités locales "acceptent de prendre la part qui leur revient". Au total, la Fondation recense 3 082 500 personnes vivant une "situation forte de mal-logement" en France, parmi lesquelles 86 500 SDF, 50 000 personnes hébergées à l'hôtel, 41 000 dans des "habitats de fortune" (cabanes, constructions provisoires), 1 150 000 dans des logements dépourvus de W.C., salle de bain et chauffage ou encore 35 000 installées dans des structures d'hébergement d'urgence. Mais l'association tire également le signal d'alarme sur le cas de 5 670 000 personnes qui vivent dans une situation de "réelle fragilité à court ou moyen terme". Si la Fondation englobe dans cette catégorie les ménages vivant dans des immeubles dégradés "nécessitant une intervention publique", ou encore en impayés de loyer depuis plus de deux mois pour cause de difficultés financières, elle prend aussi en compte l'hébergement chez des amis ou de la famille devenu une nécessité pour 150 000 à 300 000 personnes, véritable "cache misère" ou "palliatif" à la crise du logement. L'association pointe ainsi "l'augmentation du nombre de personnes qui sont hébergées par des membres de leur famille ou par des tiers et surtout le fait que ce mode d'hébergement constitue désormais une solution par défaut pour de nombreuses personnes que l'on ne s'attendrait pas à trouver dans cette situation". "Le recours à la solidarité privée est utilisé autant par des jeunes qui cherchent à décohabiter que par des ménages endettés ou expulsés qui ne peuvent plus se maintenir dans leur logement, ou pour traiter des problèmes spécifiques liés à des flux migratoires qui ont évolué", souligne la Fondation Abbé Pierre. "On compte aussi de nombreux adultes isolés, généralement des hommes ou des femmes divorcés ou séparés, ayant déjà eu un logement autonome pour la plupart d'entre eux, ainsi que des familles avec enfants". "Rupture familiale, éclatement des couples se conjuguent avec les problèmes liés à une baisse de revenus, à une perte d'emploi ou de logement pour décrire les raisons qui conduisent à un hébergement chez des proches", constate la Fondation. Et la situation est d'autant plus alarmante que la spirale de la grande précarité peut finir par faire basculer tout le monde, selon l'association. "Le plus souvent, l'hébergeant est dans une situation financière qui n'est guère plus enviable que celle de l'hébergé", note-t-elle. "Et s'il fait preuve de générosité en ouvrant sa porte, il peut alors se retrouver en mauvaise posture. Une solidarité qui ne s'exerce qu'entre personnes modestes trouve forcément ses limites".</s

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