Édition du jeudi 11 juillet 2019
Déchets : le gouvernement inscrit le retour de la consigne dans son projet de loi
Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, a présenté, mercredi 10 juillet en Conseil des ministres, le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire. Annoncé depuis plusieurs mois, « le déploiement d’un système de consigne » a été confirmé, hier, par la secrétaire d’État. Il répond, selon le gouvernement, à un double objectif de lutte « contre la pollution plastique » et de « 100 % de plastique recyclé d’ici 2025 ». Ce taux était, selon Le Monde, de 26 % en 2018. Les collectivités collectent 60 % des bouteilles plastiques et ce taux progresse encore. Il ne s’agit pas, selon l'AMF, d’un problème de collecte, mais d’un problème d’industrie du recyclage. « La consigne ne portant que sur la collecte, elle ne permettra pas de faire progresser le taux de recyclage effectif. »
Concrètement, avec la consigne, le consommateur paie une taxe - comprise dans le prix d’achat d’une bouteille d’eau en plastique ou d’une canette par exemple - qu’il récupérera seulement s’il dépose la bouteille ou la canette dans un magasin ou un lieu public muni d’un récolteur. Effet pervers : les entreprises - qui vendraient, en moyenne, ces produits 10 à 20 centimes plus chers - pourraient donc s’enrichir dès lors que le taux de retour n’atteint pas 100 %.
Les « conditions et modalités de la mise en œuvre d’un dispositif de consigne » (emballages concernés, type de consigne choisi - pour réemploi ou recyclage, montant de la caution ou encore financement des dispositifs de déconsignation) seront, elles, définies ultérieurement. Sur France Inter, mercredi 10 juillet, François de Rugy, ministre de la Transition écologique et solidaire, a, toutefois, assuré que la consigne ne concernerait pas « seulement l'eau ou le soda mais aussi les autres emballages comme les produits ménagers, les shampoings ou les produits cosmétiques ». Cette déclaration « confirme les inquiétudes » de l’AMF « car c’est toute la collecte sélective qui serait alors compromise, vidant de sens les ambitions de développement de l’économie circulaire ».
Un manque à gagner pour les collectivités
Autant d’emballages qui ne se retrouveront plus dans les poubelles jaunes et que les collectivités ne pourront donc plus revendre aux opérateurs de tri chargés du recyclage. Nicolas Soret, président de la communauté de communes du Jovinien (Yonne) et co-président de la commission déchets à l’AMF, s’en est ému sur LCP. Sur son territoire, il estime à 300 000 euros « la revente des matériaux » à des opérateurs de tri. « Si demain, d’un trait de plume gouvernemental, on m’enlève la capacité à revendre ça, je n’ai plus qu’à augmenter mes impôts de 19,6 % », déplore-t-il. « Dans toute la « chaîne de valeur » des déchets, on est en train de donner au privé ce qui a de la valeur (votre bouteille de Cristalline, en « PET clair », une forme de plastique qui se revend chez moi 350 euros la tonne). Mais, on va y laisser tout ce qui a un coût (votre pot de yaourt en polystyrène, qu'il nous coûte de faire détruire) », a-t-il détaillé sur Twitter.
Invité à réagir au projet de loi sur RMC, Benoît Jourdain, président d'un syndicat de tri des déchets dans les Vosges, est, lui aussi, très inquiet. « Si demain il n’y a plus aucune bouteille plastique qui passe, la perte pour le département est entre 2 et 2,5 millions d’euros par an », affirme-t-il.
Les collectivités ont, en outre, investi depuis quelques années dans la modernisation des centres de tri (coût total estimé au niveau national : 1,4 milliard d’euros). « Pour le département des Vosges, c’est un centre de tri qui représente 15 millions d’euros d’investissement. Et aujourd’hui, le projet de loi, c’est un système concurrent qui va rendre obsolètes nos installations », alerte Benoit Jourdain.
De façon plus générale, l’ONG Zero Waste France regrette que le projet de loi « ne formule pas d’objectif de baisse de notre consommation nationale de plastique, ou bien d’objectifs spécifiques en matière de progression de la réutilisation des emballages ».
« Pollueur-payeur », « bonus-malus »
Outre la consigne, le projet de loi prévoit de lutter contre l’obsolescence programmée à travers une information du consommateur « claire et de confiance sur la qualité et les impacts environnementaux des produits ».
Il étend également le principe « pollueur-payeur ». De nouveaux produits, tels que les articles de sport et de loisirs, les produits du tabac, les lingettes pré-imbibées pour usage corporel ou domestique, les deux ou trois-roues motorisés, seront concernés, à partir de 2021, par la mise en place de filières REP (responsabilité élargie des producteurs). « Des pans entiers de notre économie ne prennent pas en charge le traitement de leurs déchets, qui est donc supporté par les collectivités, donc par les impôts locaux : les articles de bricolage, de jardinage, les jouets, les mégots…, déplorait Brune Poirson, dans une interview au JDD, le 7 juillet. Les entreprises devront s’organiser entre elles pour créer un éco-organisme qui gérera financièrement leurs déchets et les incitera à mieux concevoir leurs produits. »
« Les fabricants concevant leurs produits de manière écologique bénéficieront d’un bonus sur la contribution qu’ils versent pour la gestion et le traitement de la fin de vie de leurs produits. A contrario, les fabricants n’intégrant pas l’éco-conception dans leur manière de produire verront cette contribution augmenter avec un malus. Cela permettra de réduire le prix des produits vertueux », expliquait Brune Poirson hier. Selon Libération, ce « bonus-malus » peut faire varier le prix du produit de plus ou moins 20 %. On peut s'interroger sur l’avenir de ce dispositif car la modulation financière pèse sur les contributions financières qui seront réduites à zéro pour les emballages consignés. La consigne supprime le principe même de l’éco-contribution.
Enfin, le projet de loi « prévoit l’interdiction de l’élimination des invendus non alimentaires » dans un souci de « lutte contre la surproduction ». « Cette pratique sera désormais interdite pour tous les produits non alimentaires et notamment les textiles, les produits électroniques ou encore les produits d’hygiène quotidienne. Les invendus devront être donnés ou recyclés ».
Le texte devrait arriver au Sénat fin septembre, puis être discuté par l’Assemblée nationale à l’automne pour une adoption « avant les élections municipales » de mars 2020, fait savoir Le Monde.
Concrètement, avec la consigne, le consommateur paie une taxe - comprise dans le prix d’achat d’une bouteille d’eau en plastique ou d’une canette par exemple - qu’il récupérera seulement s’il dépose la bouteille ou la canette dans un magasin ou un lieu public muni d’un récolteur. Effet pervers : les entreprises - qui vendraient, en moyenne, ces produits 10 à 20 centimes plus chers - pourraient donc s’enrichir dès lors que le taux de retour n’atteint pas 100 %.
Les « conditions et modalités de la mise en œuvre d’un dispositif de consigne » (emballages concernés, type de consigne choisi - pour réemploi ou recyclage, montant de la caution ou encore financement des dispositifs de déconsignation) seront, elles, définies ultérieurement. Sur France Inter, mercredi 10 juillet, François de Rugy, ministre de la Transition écologique et solidaire, a, toutefois, assuré que la consigne ne concernerait pas « seulement l'eau ou le soda mais aussi les autres emballages comme les produits ménagers, les shampoings ou les produits cosmétiques ». Cette déclaration « confirme les inquiétudes » de l’AMF « car c’est toute la collecte sélective qui serait alors compromise, vidant de sens les ambitions de développement de l’économie circulaire ».
Un manque à gagner pour les collectivités
Autant d’emballages qui ne se retrouveront plus dans les poubelles jaunes et que les collectivités ne pourront donc plus revendre aux opérateurs de tri chargés du recyclage. Nicolas Soret, président de la communauté de communes du Jovinien (Yonne) et co-président de la commission déchets à l’AMF, s’en est ému sur LCP. Sur son territoire, il estime à 300 000 euros « la revente des matériaux » à des opérateurs de tri. « Si demain, d’un trait de plume gouvernemental, on m’enlève la capacité à revendre ça, je n’ai plus qu’à augmenter mes impôts de 19,6 % », déplore-t-il. « Dans toute la « chaîne de valeur » des déchets, on est en train de donner au privé ce qui a de la valeur (votre bouteille de Cristalline, en « PET clair », une forme de plastique qui se revend chez moi 350 euros la tonne). Mais, on va y laisser tout ce qui a un coût (votre pot de yaourt en polystyrène, qu'il nous coûte de faire détruire) », a-t-il détaillé sur Twitter.
Invité à réagir au projet de loi sur RMC, Benoît Jourdain, président d'un syndicat de tri des déchets dans les Vosges, est, lui aussi, très inquiet. « Si demain il n’y a plus aucune bouteille plastique qui passe, la perte pour le département est entre 2 et 2,5 millions d’euros par an », affirme-t-il.
Les collectivités ont, en outre, investi depuis quelques années dans la modernisation des centres de tri (coût total estimé au niveau national : 1,4 milliard d’euros). « Pour le département des Vosges, c’est un centre de tri qui représente 15 millions d’euros d’investissement. Et aujourd’hui, le projet de loi, c’est un système concurrent qui va rendre obsolètes nos installations », alerte Benoit Jourdain.
De façon plus générale, l’ONG Zero Waste France regrette que le projet de loi « ne formule pas d’objectif de baisse de notre consommation nationale de plastique, ou bien d’objectifs spécifiques en matière de progression de la réutilisation des emballages ».
« Pollueur-payeur », « bonus-malus »
Outre la consigne, le projet de loi prévoit de lutter contre l’obsolescence programmée à travers une information du consommateur « claire et de confiance sur la qualité et les impacts environnementaux des produits ».
Il étend également le principe « pollueur-payeur ». De nouveaux produits, tels que les articles de sport et de loisirs, les produits du tabac, les lingettes pré-imbibées pour usage corporel ou domestique, les deux ou trois-roues motorisés, seront concernés, à partir de 2021, par la mise en place de filières REP (responsabilité élargie des producteurs). « Des pans entiers de notre économie ne prennent pas en charge le traitement de leurs déchets, qui est donc supporté par les collectivités, donc par les impôts locaux : les articles de bricolage, de jardinage, les jouets, les mégots…, déplorait Brune Poirson, dans une interview au JDD, le 7 juillet. Les entreprises devront s’organiser entre elles pour créer un éco-organisme qui gérera financièrement leurs déchets et les incitera à mieux concevoir leurs produits. »
« Les fabricants concevant leurs produits de manière écologique bénéficieront d’un bonus sur la contribution qu’ils versent pour la gestion et le traitement de la fin de vie de leurs produits. A contrario, les fabricants n’intégrant pas l’éco-conception dans leur manière de produire verront cette contribution augmenter avec un malus. Cela permettra de réduire le prix des produits vertueux », expliquait Brune Poirson hier. Selon Libération, ce « bonus-malus » peut faire varier le prix du produit de plus ou moins 20 %. On peut s'interroger sur l’avenir de ce dispositif car la modulation financière pèse sur les contributions financières qui seront réduites à zéro pour les emballages consignés. La consigne supprime le principe même de l’éco-contribution.
Enfin, le projet de loi « prévoit l’interdiction de l’élimination des invendus non alimentaires » dans un souci de « lutte contre la surproduction ». « Cette pratique sera désormais interdite pour tous les produits non alimentaires et notamment les textiles, les produits électroniques ou encore les produits d’hygiène quotidienne. Les invendus devront être donnés ou recyclés ».
Le texte devrait arriver au Sénat fin septembre, puis être discuté par l’Assemblée nationale à l’automne pour une adoption « avant les élections municipales » de mars 2020, fait savoir Le Monde.
Ludovic Galtier
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