Édition du jeudi 20 avril 2017
Damien Carême : « Multiplions les centres d'accueil et d'orientation ! »
© D.R.
Quelle a été votre première réaction quand vous avez appris la destruction du camp de la Linière ?
Ce soir-là, j'étais à Paris quand j'ai pris connaissance de l'incendie. Ma première réaction a été la stupéfaction, et ce sentiment m'habite encore aujourd'hui. Le choc vers 22h, le 11 avril, fut très brutal. J'ai tenu bien sûr à savoir très rapidement s'il y avait des victimes et essayé de comprendre ce qui avait pu se passer. Même si on sentait des tensions ces derniers mois dans la cohabitation entre réfugiés afghans et irakiens, rien ne laissait présager un tel dénouement. J'avoue que je suis encore très perplexe.
Vous aviez mené un combat sans relâche pour édifier ce camp humanitaire. Quel est votre état d’esprit aujourd’hui ?
En un instant, des journées et des journées de travail, de réunions, de négociations se sont écroulées. Je repense à toutes ces personnes, aux humanitaires qui se sont démenés pour concrétiser ce projet. J'ai pu personnellement faire des rencontres extraordinaires, bien loin du cliché misérabiliste dont on entoure parfois le réfugié. Comme ce médecin irakien qui travaillait dans un hôpital de Bagdad et qui est prêt, une fois ses équivalences passées, à exercer sur Grande-Synthe en tant que généraliste...
L'Etat s'est-il impliqué comme vous le souhaitiez ?
Autant pour la construction du camp, il a fallu se battre bec et ongles pour se faire reconnaître par l'Etat, autant ses services ont été très réactifs lors des événements du 11 avril. Le préfet du Nord, Michel Lalande, a fait preuve d'une dignité, d'un soutien et d'une efficacité remarquables. Nous avons travaillé côte à côte pendant trois jours pour trouver des solutions aux 1400 migrants qui fréquentaient le camp de la Linière au moment des faits. Dans un premier temps, plus d'un millier d'entre eux ont été hébergés dans cinq gymnases, dont trois à Grande-Synthe. Puis le préfet a su mobiliser ses collègues et les élus pour trouver des places en CAO (centre d'accueil et d'orientation). Une très grande partie des réfugiés du camp est aujourd'hui relogée. Il reste sur la région quelques récalcitrants qui veulent coûte que coûte, rejoindre l'Angleterre mais ils sont minoritaires.
Vous avez lancé un appel à la solidarité nationale. Espérez-vous être entendu ?
Ce que j'ai voulu faire passer comme message aux maires, c'est que l'avenir passe par l'ouverture de nouveaux CAO. Il faut absolument les multiplier à travers l'hexagone. Les retours d'expérience plaident en leur faveur : je n'ai jamais entendu de situations où un CAO avait suscité des troubles ou des actes délictueux à répétition. Cela se passe bien. A mon sens, ces structures constituent la seule solution. D'ailleurs, si des CAO avaient existé en 2015, jamais je n'aurais eu l'idée d'un camp humanitaire. J'aurais tout fait pour placer les premiers réfugiés dans une structure adaptée. L'arrivée de migrants est une réalité. Le flot ne se tarira pas et on n'arrivera pas à l'endiguer par de seules mesures sécuritaires. C'est une vue de l'esprit.
Propos recueillis par Thierry Guerraz
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