Édition du mercredi 17 juillet 2019
Changement climatique : l'adaptation « très insatisfaisante » des territoires du littoral français
Les territoires du littoral français sont mal préparés aux conséquences du dérèglement climatique. C’est ce que souligne un rapport du groupe de réflexion La Fabrique écologique, publié lundi, qui détaille les risques physiques, économiques et sociaux et les pistes envisagées pour s'y adapter. Selon ses conclusions, les réponses et les stratégies d’adaptation face à l’élévation du niveau de la mer sur les littoraux métropolitains restent « encore très insatisfaisantes ». En cause notamment, des problèmes de coût, de financement ou techniques.
25 % des côtes en érosion, 864 communes vulnérables à la submersion marine
Ce danger de l’élévation du niveau de la mer et qui menace les côtes de l’Hexagone est amplifié par l’érosion et la submersion marine. Cette dernière menacerait ainsi 1,4 million de résidents, 590 000 ha de terres et 850 000 emplois. Selon La Fabrique écologique, « 165 000 bâtiments et 864 communes sont particulièrement vulnérables au risque de submersion » tandis que « de nombreux services publics, dont 160 établissements de santé, sont situés en zone à risque ». Les cinq départements les plus exposés à ce risque sont la Gironde, la Loire-Atlantique, la Seine-Maritime, le Nord et le Pas-de-Calais et représentent à eux seuls 50% de la population vulnérable à la submersion marine.
L’érosion, elle, touche d’ores et déjà 25 % des côtes, bien que 44 % d’entre elles restent stables. Mais, ces statistiques dissimulent une « hétérogénéité forte », notamment parce que « les côtes sableuses sont plus sensibles à l’érosion ». Résultat, 70 % des côtes sont en érosion dans le Pas-de-Calais, en Seine-Maritime, dans le Calvados et dans le Gard, contre 50 % dans les Pyrénées et seulement 5 % en Ille-et-Vilaine.
Pourtant, note l’auteure, la construction de logements dans les communes rurales du littoral est « 3,5 fois plus importante » que pour l’ensemble des communes rurales métropolitaines, tandis que « les pôles urbains sont trois fois plus nombreux sur le littoral que sur le reste du territoire », selon des chiffres de 2017 du CGDD. En 2040, alors que les conséquences du changement climatique vont se faire davantage ressentir, les différents scénarios prévoient une augmentation de 4,5 millions d’habitants dans les départements littoraux, qui accueilleront « 40 % de la population ».
Ouvrages de protection coûteux, relocalisation freinée, naturalisation à crédibiliser
Afin de protéger population, infrastructures et activités économiques, plusieurs options d’adaptation existent déjà. L’étude en a étudié quatre qui ne vont pas sans poser de difficultés.
La première solution consiste dans la mise en place d’ouvrages de protection grâce à des digues, des épis, des brise-lame ou encore des enrochements. Déjà présents sur « environ 20 % » du littoral, ils sont environ 16 000 pour une longueur totale de 2 300 km, dont 1 600 km en métropole. Jugés comme une « option pertinente », notamment en ce qui concerne la submersion, ces ouvrages sont toutefois particulièrement « coûteux ». De plus, les intercommunalités - qui en sont devenus les seules gestionnaires depuis 2018 à travers la compétence Gemapi - « n’auraient ni les capacités financières, malgré la possibilité de prélever une taxe, ni les capacités techniques (ingénierie, savoir-faire) », estime l’auteure de l’étude devant le scepticisme des acteurs de terrain qu’elle a rencontrés.
Pour cette raison, les « solutions fondées sur la nature » paraissent être une alternative intéressante puisque, outre leur faible coût, celles-ci s’accompagnent de nombreux bénéfices, tels que le redéploiement de la biodiversité locale, un renouveau paysager et de nouvelles perspectives d’écotourisme. Cependant, « les élus et les habitants ne connaissent pas ou ne perçoivent pas toujours suffisamment leur intérêt », reconnaît l’auteure.
Afin de réduire la vulnérabilité des territoires, une autre option vise à la maîtrise de l’urbanisation dans ces zones, notamment via des plans de prévention des risques (PPR) « suffisamment rigoureux » (ceux-ci relevant de la responsabilité de l’État en termes d'initiative,d'élaboration, de financement). Seulement, le bilan est « plutôt mitigé ». « Plus de 7 ans après les circulaires renforçant cette politique, seulement 60 % des territoires désignés comme prioritaires à la suite de Xynthia sont dotés d’un PPR (alors que la durée réglementaire d’élaboration est de trois ans), sans compter les autres territoires non considérés comme prioritaires par ces circulaires mais qui sont pourtant concernés par un ou plusieurs risques littoraux », pointe La Fabrique écologique.
Dernière solution, la relocalisation. Encore très rare, cette manière de limiter les risques en déplaçant des populations, activités et biens en dehors de la zone de vulnérabilité est reconnue comme « pertinente » par l’État. Si cette recomposition spatiale comporte de « nombreux avantages », les expérimentations ont montré « de nombreux freins techniques, juridiques, économiques ou financiers » et que les modalités possibles d’une politique de relocalisation ne sont toujours pas fixées. De plus, les habitants peuvent refuser la relocalisation du fait de l’attachement à leurs biens et aussi le coût que celle-ci engendre. « Aujourd’hui, les acteurs de terrain sont en attente d’une politique claire sur la relocalisation, sur les moyens dédiés à cette relocalisation, sur les sources de financement et sur les modalités de mise en œuvre », constate l’auteure de l’étude.
À noter que la mission parlementaire sur « l’adaptation des territoires face aux évolutions du littoral », lancée en avril dernier par le ministre de la Transition écologique et solidaire de l’époque, François de Rugy – remplacé hier à ce poste par Élisabeth Borne – , proposait, dans ce cadre, d’« accompagner les collectivités locales qui s’engagent dans des projets de recomposition spatiale via une démarche de contractualisation avec l’État, et des financements faisant appel à la solidarité littorale ». Par ailleurs, dans un rapport publié lundi, les sénateurs ont, pour leur part, souhaité que soit mis en place « un système de financement ambitieux, pérenne et solidaire pour les opérations de réaménagement liées à l’érosion côtière » (lire Maire info d'hier).
Télécharger l’étude.
25 % des côtes en érosion, 864 communes vulnérables à la submersion marine
Ce danger de l’élévation du niveau de la mer et qui menace les côtes de l’Hexagone est amplifié par l’érosion et la submersion marine. Cette dernière menacerait ainsi 1,4 million de résidents, 590 000 ha de terres et 850 000 emplois. Selon La Fabrique écologique, « 165 000 bâtiments et 864 communes sont particulièrement vulnérables au risque de submersion » tandis que « de nombreux services publics, dont 160 établissements de santé, sont situés en zone à risque ». Les cinq départements les plus exposés à ce risque sont la Gironde, la Loire-Atlantique, la Seine-Maritime, le Nord et le Pas-de-Calais et représentent à eux seuls 50% de la population vulnérable à la submersion marine.
L’érosion, elle, touche d’ores et déjà 25 % des côtes, bien que 44 % d’entre elles restent stables. Mais, ces statistiques dissimulent une « hétérogénéité forte », notamment parce que « les côtes sableuses sont plus sensibles à l’érosion ». Résultat, 70 % des côtes sont en érosion dans le Pas-de-Calais, en Seine-Maritime, dans le Calvados et dans le Gard, contre 50 % dans les Pyrénées et seulement 5 % en Ille-et-Vilaine.
Pourtant, note l’auteure, la construction de logements dans les communes rurales du littoral est « 3,5 fois plus importante » que pour l’ensemble des communes rurales métropolitaines, tandis que « les pôles urbains sont trois fois plus nombreux sur le littoral que sur le reste du territoire », selon des chiffres de 2017 du CGDD. En 2040, alors que les conséquences du changement climatique vont se faire davantage ressentir, les différents scénarios prévoient une augmentation de 4,5 millions d’habitants dans les départements littoraux, qui accueilleront « 40 % de la population ».
Ouvrages de protection coûteux, relocalisation freinée, naturalisation à crédibiliser
Afin de protéger population, infrastructures et activités économiques, plusieurs options d’adaptation existent déjà. L’étude en a étudié quatre qui ne vont pas sans poser de difficultés.
La première solution consiste dans la mise en place d’ouvrages de protection grâce à des digues, des épis, des brise-lame ou encore des enrochements. Déjà présents sur « environ 20 % » du littoral, ils sont environ 16 000 pour une longueur totale de 2 300 km, dont 1 600 km en métropole. Jugés comme une « option pertinente », notamment en ce qui concerne la submersion, ces ouvrages sont toutefois particulièrement « coûteux ». De plus, les intercommunalités - qui en sont devenus les seules gestionnaires depuis 2018 à travers la compétence Gemapi - « n’auraient ni les capacités financières, malgré la possibilité de prélever une taxe, ni les capacités techniques (ingénierie, savoir-faire) », estime l’auteure de l’étude devant le scepticisme des acteurs de terrain qu’elle a rencontrés.
Pour cette raison, les « solutions fondées sur la nature » paraissent être une alternative intéressante puisque, outre leur faible coût, celles-ci s’accompagnent de nombreux bénéfices, tels que le redéploiement de la biodiversité locale, un renouveau paysager et de nouvelles perspectives d’écotourisme. Cependant, « les élus et les habitants ne connaissent pas ou ne perçoivent pas toujours suffisamment leur intérêt », reconnaît l’auteure.
Afin de réduire la vulnérabilité des territoires, une autre option vise à la maîtrise de l’urbanisation dans ces zones, notamment via des plans de prévention des risques (PPR) « suffisamment rigoureux » (ceux-ci relevant de la responsabilité de l’État en termes d'initiative,d'élaboration, de financement). Seulement, le bilan est « plutôt mitigé ». « Plus de 7 ans après les circulaires renforçant cette politique, seulement 60 % des territoires désignés comme prioritaires à la suite de Xynthia sont dotés d’un PPR (alors que la durée réglementaire d’élaboration est de trois ans), sans compter les autres territoires non considérés comme prioritaires par ces circulaires mais qui sont pourtant concernés par un ou plusieurs risques littoraux », pointe La Fabrique écologique.
Dernière solution, la relocalisation. Encore très rare, cette manière de limiter les risques en déplaçant des populations, activités et biens en dehors de la zone de vulnérabilité est reconnue comme « pertinente » par l’État. Si cette recomposition spatiale comporte de « nombreux avantages », les expérimentations ont montré « de nombreux freins techniques, juridiques, économiques ou financiers » et que les modalités possibles d’une politique de relocalisation ne sont toujours pas fixées. De plus, les habitants peuvent refuser la relocalisation du fait de l’attachement à leurs biens et aussi le coût que celle-ci engendre. « Aujourd’hui, les acteurs de terrain sont en attente d’une politique claire sur la relocalisation, sur les moyens dédiés à cette relocalisation, sur les sources de financement et sur les modalités de mise en œuvre », constate l’auteure de l’étude.
À noter que la mission parlementaire sur « l’adaptation des territoires face aux évolutions du littoral », lancée en avril dernier par le ministre de la Transition écologique et solidaire de l’époque, François de Rugy – remplacé hier à ce poste par Élisabeth Borne – , proposait, dans ce cadre, d’« accompagner les collectivités locales qui s’engagent dans des projets de recomposition spatiale via une démarche de contractualisation avec l’État, et des financements faisant appel à la solidarité littorale ». Par ailleurs, dans un rapport publié lundi, les sénateurs ont, pour leur part, souhaité que soit mis en place « un système de financement ambitieux, pérenne et solidaire pour les opérations de réaménagement liées à l’érosion côtière » (lire Maire info d'hier).
A.W.
Télécharger l’étude.
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