Édition du mardi 15 septembre 2015
Annie Genevard : « Je n'avais pas augmenté la fiscalité depuis 17 ans...»
© Maires de France
Pouvez-vous, pour commencer, chiffrer la baisse des dotations sur le budget de votre commune de Morteau ?
Nous perdons 400 000 euros sur quatre ans, soit environ 90 000 euros par an, sur un budget de fonctionnement de 7 millions d’euros. Ces 90 000 euros représentent environ 5 points de fiscalité.
Comment la commune va-t-elle faire face ? Quelles sont les conséquences concrètes ?
J’ai toujours eu une politique fiscale extrêmement raisonnable, et pour la réaliser, j’ai économisé tout ce que je pouvais sur le fonctionnement. Les économies que l’on a faites là-dessus, on ne peut pas les renouveler. Cette année, nous sommes non seulement confrontés à la baisse des dotations, mais également à l’augmentation de certaines charges : revalorisation des catégories C, glissement vieillesse-technicité, réforme des rythmes scolaires – qui nous coûte 25 000 euros par an… Nous avons donc dû chercher à faire des économies. Sur le fonctionnement, j’ai dû réduire le périmètre budgétaire de certaines manifestations. Un exemple : la ville célèbre chaque année son produit-phare, la saucisse de Morteau, au cours d’une manifestation dont nous avons cette année réduit le financement de 40 %. J’ai aussi choisi de réduire le budget du fleurissement. Nous avons essayé, pour l’instant, de ne pas être dans des coupes drastiques, je n’ai pas touché aux services ni à la culture.
Sur l’investissement, on choisit, on arbitre… on est dans un rétrécissement global. Il y a un repli tous azimuts, sur les dépenses de fonctionnement, les investissements, l’emploi.
Et la fiscalité ?
Ma stratégie a été d’équilibrer l’effort… mais j’ai dû à mon grand regret me résoudre à augmenter la fiscalité, ce que je n’avais pas fait depuis 17 ans, grâce aux économies que nous avons faites sur le fonctionnement. Comme quoi, la vertu n’est pas récompensée. Ceux qui n’ont pas été dispendieux sont encore plus pénalisés. J’ai donc augmenté de deux points les taux, et je vais être obligée d’augmenter les taux de la taxe sur la consommation finale d’électricité, de deux points. C’est la seule manière de financer les opérations de développement durable qui me tiennent à cœur.
Vous dites que vous n’avez pas touché à la culture ou au sport. Pensez-vous que vous devrez vous y résoudre à l’avenir ?
Je ne l’exclus pas, hélas. La première victime de la baisse des dotations, c’est l’investissement. On ne peut pas tellement jouer sur la masse salariale, sauf sur du temps long, en ne remplaçant pas les départs en retraite. Mais je n’ai que 60 agents pour 7 000 habitants, on ne peut pas dire que ce soit excessif.
Nous avons déjà dû faire des choix sur les politiques publiques. Nous avons dû faire payer une partie des ateliers périscolaires, par exemple – ce que nous n’aurions pas fait il y a quelques années. Il n’est pas impossible que l’on doive toucher à la culture, au sport. Je ne m’y résoudrai qu’en dernière extrémité. Pour moi, le travail d’un maire, c’est d’essayer de rendre les gens heureux dans leur commune, de leur donner du bien-être. Ce n’est pas par choix idéologique que l’on s’en prend à la culture, c’est sous la contrainte.
Qu’allez-vous faire dans votre commune samedi, pour la journée nationale de mobilisation contre la baisse des dotations ?
Nous diffusons déjà, sur le site internet de la ville, le film réalisé par l’AMF, qui est très parlant parce qu’il montre ce qui se passerait dans la vie quotidienne si la commune n’était pas là. Cela permet de s’apercevoir que le bloc local intervient dans tous les aspects de la vie quotidienne des Français. Nous diffusons également la pétition.
Samedi, je serai sur la place du marché, avec les élus du conseil municipal, toutes tendances confondues. Nous allons faire signer la pétition et distribuer le Manifeste, en expliquant aux habitants que leurs élus ne sont pas dispendieux, qu’ils n’ont pas aggravé l’endettement du pays – en rappelant que le bloc local n’est responsable que de 4% de la dette de la France. Nous soulignerons aussi que les communes font tourner l’économie locale : aujourd’hui, le bâtiment et les travaux publics sont dans une véritable situation d’atonie, de dépression, à l’idée que les maires n’investissent plus.
Bref, nous allons expliquer que ce n’est pas seulement le combat des élus, mais celui de toute la population.
Propos recueillis par Franck Lemarc
Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2
S'ABONNER GRATUITEMENT
NOUS ÉCRIRE
DANS L'ÉDITION DU JOUR
Baisse des dotations : les présidents du bloc communal font front commun
La moitié du fonds d'investissement d'un milliard d'euros destinée aux communes rurales
Une rentrée parlementaire dominée par la Syrie et l'accueil des réfugiés
La flambée des prix du foncier dénoncée par une association de consommateurs
Retrouver une édition
Accéder au site